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Jean-Louis Maubois retrace 50 ans de recherche appliquée

À l’occasion du colloque Intégration des membranes dans les procédés, en juin dernier, Jean-Louis Maubois, pionnier des applications de cette technologie dans l’industrie du lait, a partagé la mémoire de ses recherches.

Jean-Louis Maubois, père
de l’utilisation des opérations
membranaires dans l’industrie
du lait.
Jean-Louis Maubois, père
de l’utilisation des opérations
membranaires dans l’industrie
du lait.
© rd

Toute invention tire son origine d’un rêve, le rêve de l’inventeur ou le rêve de l’utilisateur », considèrent les historiens des techniques. Jean-Louis Maubois, le père de l’utilisation des opérations membranaires dans l’industrie du lait, a retracé l’histoire de ses cinquante années de travaux à l’occasion du colloque Intégration des membranes dans les procédés, le 7 juin dernier à Saint-Malo.

Les premiers développements commencent dans les années 1960 alors que les fromagers ont recours à des procédés qui sont encore très empiriques. C’est l’époque où Jean-Louis Maubois entre au Laboratoire de recherche laitière de Rennes et s’intéresse à l’égouttage. « Très vite, nous avons compris que l’égouttage dépend d’une multitude de facteurs, et qu’il est difficile à maîtriser quels que soient les progrès des technologies classiques. » Au moment où les procédés membranaires se popularisent dans le monde de la recherche (les militaires menaient à l’époque des travaux sur le dessalement de l’eau de mer), Jean-Louis Maubois a l’idée d’employer l’ultrafiltration (UF) pour mener à bien cette opération. Le chercheur dépose en 1969 un brevet qui bouleverse les codes de la transformation fromagère. « Nous avons entièrement changé l’ordre des opérations pour imaginer un procédé selon lequel on prépare, par ultrafiltration, un pré-fromage qui est encore à l’état liquide mais présente déjà la composition du fromage en extrait sec. » En 2016, 600 000 tonnes de fromages ont été fabriquées, dans le monde, selon ce procédé avantageux en termes économiques : la rétention des protéines du lactosérum dans le pré-fromage accroît le rendement de 20 %, la suppression de l’étape d’égouttage divise par huit l’écart-type pour les fromages vendus à la pièce, et la consommation de présure est réduite de 80 %.

« JEAN-CLAUDE GUILLOTEAU A CRU EN NOTRE PROCÉDÉ »

Porter le procédé au stade de l’industrialisation prenait du temps à l’époque, mais dans les années 1980, un cadre du groupe Danone, Jean-Claude Guilloteau, accélère le cours des choses. « Il a cru en notre procédé. Il est venu nous voir en disant : ‘Je ne sais pas à quoi ressemblera le fromage que je mettrai sur le marché, mais je sais qu’il sera fabriqué selon votre procédé’. » L’année suivante, Jean-Claude Guilloteau crée la Fromagerie Guilloteau et lance la première recette de son Pavé d’Affinois qui remporte immédiatement du succès jusqu’à générer 65 millions d’euros de chiffre d’affaires aujourd’hui. Durant la mise au point du produit, Jean-Louis Maubois rencontre pourtant des difficultés car lorsque l’UF est appliquée directement au lait, elle débouche sur des fromages acides et granuleux du fait d’une modification de la minéralisation phospho- calcique du pré-fromage. « Nous avons dû adapter les paramètres d’emprésurage. Nous avons montré qu’ajouter du NaCl permet d’emprésurer à pH plus bas et d’éliminer les défauts de texture. » Les Recettes de Madame Loïc, fabriquées par La Laiterie nouvelle de l’Arguenon, seront la deuxième concrétisation des travaux du chercheur.

« NOTRE LABORATOIRE ÉTAIT CLASSÉ SECRET DÉFENSE »

De nombreux autres développements seront ensuite mis au point, notamment des développements concernant la valorisation des composants du lactosérum. « Nous voulions apporter une solution au problème de la valorisation du lactosérum. Dans ce domaine, l’évolution a été considérable puisque ce coproduit de la fabrication fromagère est passé d’un sous-produit qui était donné aux cochons, à une palette de produits de valeur qui sont aujourd’hui destinés à l’alimentation humaine pour les seniors, les sportifs, les bébés ou encore les malades en réanimation entérale. » Qui aurait dit que les procédés membranaires connaîtraient une telle percée dans l’industrie du lait ? « Dans les années 1960, effectivement, les procédés membranaires servaient de voie d’enrichissement isotopique de l’uranium, et je raconte toujours que notre laboratoire était au départ classé secret défense parce nous avions des relations étroites avec le Commissariat à l’énergie atomique. » Jean- Louis Maubois, qui a débuté sa carrière de chercheur en 1961 après des études à l’Institut national agronomique de Paris, a aussi mis au point, dans les années 1980, l’épuration microbiologique des laits à basse température par filtration membranaire. Le chercheur a déposé 25 brevets au total.

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