Réforme de la Pac
Coalition contre l'exclusivité des dénominations animales
Des industriels et associations forment une coalition pour contester la réservation des dénominations carnées et laitières aux produits d’origine animale prévue dans la nouvelle Pac, suscitant surprise et incompréhension dans les filières bovine et laitière.
Des industriels et associations forment une coalition pour contester la réservation des dénominations carnées et laitières aux produits d’origine animale prévue dans la nouvelle Pac, suscitant surprise et incompréhension dans les filières bovine et laitière.
Dans une lettre commune adressée au Parlement européen le 28 août, des entreprises fabriquant des produits végétaux et des associations engagées contre l’élevage remettent en cause l’exclusivité des dénominations carnées et laitières aux produits d’origine animale prévue dans les amendements 169 et 171 de la prochaine politique agricole commune (Pac).
Les signataires, parmi lesquels figurent Nestlé, Unilever et Proveg International, estiment que la nouvelle réglementation est contraire aux attentes des consommateurs et aux objectifs environnementaux de la stratégie européenne De la ferme à la table et invoquent la violation du « principe de proportionnalité ». La lettre explique également que cette nouvelle réglementation serait un frein à « l’expansion et au développement de segments innovants de l’industrie alimentaire dans l’Union européenne ».
Après l’adoption en France du texte relatif à la « Transparence du consommateur sur les produits agricoles et alimentaires » et l’avancée des discussions européennes, les filières bovine et laitière, pensant le sujet clos, ont accueilli cette action de lobbying avec beaucoup de surprise.
Nous ne sommes pas dupes
Interrogée sur le sujet, l’interprofession bovine s’étonne d’un combat mené par deux mondes « que tout oppose » au nom de l’information du consommateur. « Arrêt de l’élevage pour les uns, intérêts financiers pour les autres, nous ne sommes pas dupes de la volonté de ces gens-là qui utilisent un alibi pour servir leurs propres intérêts sous couvert d’un collectif. Si leur combat était centré sur le consommateur, l’utilisation de dénominations distinctes permettrait justement de clarifier l’information », dénonce Bruno Dufayet, président de la commission enjeux sociétaux d’Interbev.
L’interprofession relève aussi une « forte pression » sur les parlementaires, les signataires de la lettre allant jusqu’à rédiger un amendement alternatif à celui existant en proposant l’utilisation des dénominations animales pour les substituts à condition que l’origine végétale du produit soit clairement précisée.
Arguments solides et légitimes des filières
En réponse, le Copa-Cogeca a rappelé dans une lettre ouverte l’importance de cette nouvelle réglementation pour le consommateur comme pour les filières européennes, et les filières se sont mobilisées pour alerter de nouveau les parlementaires sur ces enjeux. « S’il y a toujours un risque, nos arguments sont solides et légitimes », assure Caroline Le Poultier, directrice générale du Cniel, qui rappelle qu’en 2017 près d’un Français sur trois pense qu’il y a du lait dans les boissons ou dessert végétaux et qu’un Français sur deux pense que les boissons végétales apportent les mêmes nutriments que le lait *.
Les Eurodéputés se prononceront lors du vote final des amendements qui se déroulera en séance plénière au Parlement européen du 19 au 22 octobre.
Les substituts végétaux en plein boom
Encore marginaux il y a quelques années, les substituts aux protéines animales gagnent en popularité comme en témoigne l’entrée en Bourse de Beyond Meat ou l’arrivée d’un burger vegan chez McDonald’s. Le marché des substituts aux protéines animales a progressé de 11 % en 2019 pour atteindre 400 millions d’euros en GMS, dont la moitié provient des ventes de boissons et crèmes végétales, indique Xerfi dans une étude. Le cabinet estime aussi que les similis carnés, des produits qui se veulent analogues à la viande, pourraient croître de 8 % par an en France en recrutant de nouveaux consommateurs, générant ainsi 40 millions de chiffre d’affaires supplémentaires.