Chronique
Les arômes et le bio : un ménage complexe
À quelques mois de l’entrée en application du nouveau règlement sur la production biologique, un point sur l’usage des arômes dans lesdites denrées alimentaires semble bienvenu, tant les questions restent nombreuses à ce sujet.
À quelques mois de l’entrée en application du nouveau règlement sur la production biologique, un point sur l’usage des arômes dans lesdites denrées alimentaires semble bienvenu, tant les questions restent nombreuses à ce sujet.
On rappellera qu’un arôme est défini par le règlement européen 1334/2008 (1), comme un produit « utilisé pour améliorer ou modifier l’odeur et/ou le goût des aliments pour le bénéfice du consommateur » et qu’il est composé d’une partie non aromatisante et d’une partie aromatisante pouvant être composée elle-même de préparations aromatisantes, de substances aromatisantes naturelles…
Mais c’est l’arôme dit « naturel » – c’est-à-dire celui dont la partie aromatisante est exclusivement composée d’agents aromatisants naturels – qui concentre l’attention dans le cadre de la production biologique. En effet, seuls ces arômes naturels peuvent entrer dans la composition d’un produit biologique (2), selon le règlement encore en vigueur.
Qu’entend-on par arôme «naturel»
Encore faut-il bien comprendre ce que recouvrent respectivement, les concepts de « substances aromatisantes naturelles » et de « préparations aromatisantes ». Ainsi, seuls la source et le procédé d’obtention (et non le nom) permettent de définir le caractère naturel d’une substance aromatisante, en ce sens qu’elle doit être « obtenue par des procédés physiques, enzymatiques ou microbiologiques appropriés, à partir de matières d’origine végétale, animale ou microbiologique […]. Les substances aromatisantes naturelles correspondent aux substances qui sont naturellement présentes et ont été identifiées dans la nature ».
Les préparations aromatisantes, quant à elles, sont toutes naturelles, parce qu’obtenues, à partir de matières premières naturelles, auxquelles auront été appliqués des procédés physiques, enzymatiques ou microbiologiques appropriés.
L’exposé ne serait, toutefois, pas complet, si on ne précisait pas que la réglementation biologique européenne actuelle aborde le sujet des arômes, également par le biais des arômes dit biologiques, mais sans les définir. La Commission européenne s’est contentée, à plusieurs reprises, de confirmer la possibilité de certifier des arômes, dès lors qu’ils seraient élaborés à partir de substances d’origine agricole, si le processus de fabrication est conforme au règlement 834/2008 et si ces arômes sont destinés à la consommation humaine.
Mais alors : quid de demain ?
La réglementation actuelle sera remplacée par les dispositions du règlement (UE) 2018/848 (3), à compter du 1er janvier 2022. Les règles relatives aux arômes seront plus strictes, puisque les « arômes naturels de “denrée(s) ou catégorie de denrées ou matériau(x) source” avec autres arômes naturels » et les « arômes naturels », au sens de l’article 16 (5) et (6) du règlement (CE) n° 1334/2008 ne seront plus autorisés dans la production biologique (4).
En d’autres termes, un arôme naturel goût X (par exemple, vanille) ne pourra être utilisé que si la partie aromatisante a été obtenue exclusivement ou à au moins 95 % p/p à partir du matériau de base X (dans l’exemple précité, la vanille) ; a contrario, un arôme naturel goût vanille obtenu exclusivement ou à plus de 5 % p/p de pulpe de betterave ne sera plus autorisé.
En revanche, il ne sera toujours pas exigé que les arômes soient biologiques pour être utilisés dans la production biologique. Mais un arôme naturel pourra être qualifié de « biologique » si, outre les exigences ci-dessus, tous les composés aromatiques et supports de composés aromatiques sont biologiques (5).
Sans surprise, il faut y voir là une évolution tendant à limiter toujours davantage l’ajout d’éléments non biologiques dans les denrées alimentaires biologiques.
Cabinet Keller & Heckman
Keller & Heckman est un cabinet international de droits des affaires, spécialisé en droits agroalimentaires, matériaux en contact alimentaire, environnement et publicité, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Katia Merten-Lentz est avocate associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle est chargée de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, et ce, pour toutes les filières de la chaîne alimentaire. Elle intervient tant en conseil qu’en contentieux, auprès des industries de l’agroalimentaire pour la mise en œuvre de la réglementation agricole et alimentaire de l’Union européenne.