Œufs
Armor Œufs serein dans l’incertitude
Les 125 adhérents d’Armor Œufs ne semblent plus inquiets par le devenir de leurs œufs depuis l’annonce par Avril de son projet de cession de Mâtines et Ovoteam, leur principal débouché. La performance technique dans un contexte de marché dégradé les préoccupe plus.
On pouvait imaginer que l’assemblée générale de l’organisation des 125 producteurs Armor Œufs (Pontivy, Morbihan), vendredi 18 juin à Locminé, ferait l’objet de débats passionnés quant à l’avenir du débouché de leur 1,7 milliard d’œufs produits dans l’année (5,5 millions de poules pondeuses). Il y a un peu plus de deux mois, leur partenaire d’aval Avril a fait part, en effet, de son souhait de se désengager de ses activités de transformation animale en porc (Abéra) et dans les œufs (Mâtines et Ovoteam), activité approvisionnée par Armor Œufs.
Finalement, il n’en a rien été. « Il y a bien eu des inquiétudes et des questionnements au départ », a reconnu le président de la première organisation de producteurs (OP) d’œufs de France, Franck Picard. Mais, les producteurs ont parfaitement compris que, dans l’immédiat, rien ne va changer. Comme l’ont rappelé les représentants d’Avril présents à l’assemblée générale, « les engagements contractualisés par Sanders (filiale nutrition animale d’Avril, NDLR) sont maintenus », a souligné Christophe Le Bars, directeur général d’Avril Filières d’élevages.
Les engagements contractualisés par Sanders sont maintenus
Sanders va continuer d’acheter la production des éleveurs d’Armor Œufs. Et, jusqu’à la reprise de la branche œufs d’Avril par un ou plusieurs acteurs, Sanders continuera d’écouler 60 % de la production de l’OP dans Mâtines (trois centres de conditionnement, 1,1 milliard d’œufs coquille) et Ovoteam (quatre casseries pour 700 millions d’œufs). Après, le contrat sera tripartite entre Armor Œufs, Sanders et les nouveaux propriétaires. Un contrat où l’OP souhaite avoir son mot à dire à propos du développement ou de la transformation d’élevages, sur les décisions en lien avec la qualité, etc.
Consolider le marché
« Il y a plusieurs dossiers de reprise sur la table », a concédé Christophe Le Bars, sans plus de précisions, comme pour marquer tout l’intérêt du secteur pour les deux entreprises. Avril ne veut pas sortir précipitamment du secteur sans s’assurer de la pertinence du projet de reprise. Le contexte, il est vrai, n’est guère favorable. Le prix de l’aliment a flambé ces derniers mois pour revenir à son niveau record de 2013, et les GMS rechignent à répercuter l’augmentation du prix de revient sur les prix de vente des œufs dans leurs rayons. De ce point de vue, l’OP déplore que la grande distribution refuse « l’indexation sur l’indice Itavi au motif […] que cet indice n’est pas un indicateur au regard de la loi Egalim ».
Avril considère qu’il « faudrait augmenter de 11 à 12 % le prix de vente en magasin pour couvrir les coûts », précise Christophe Le Bars. En attendant, c’est le groupe qui absorbe les pertes, le prix d’achat de l’œuf étant indexé sur le prix de l’aliment. Le projet de cession doit permettre « la consolidation du marché avec un acteur qui aura un poids suffisant pour peser », souligne Le Bars. Entendez : peser face à la grande distribution pour passer les hausses, à l’image d’un LDC en volaille de chair sur le marché français. « Les fondamentaux du marché de l’œuf ne sont pas remis en cause. C’est une protéine d’avenir, bon marché et décorrélée des religions », conclut-il.
Transformation d’élevages et performances techniques
Sanders l’a dit depuis de longs mois : il n’achètera plus d’œufs issus d’élevages en cage (standard) après 2025 pour privilégier les modes de production alternatifs (sol, plein air, bio, label Rouge). À Armor Œufs, la transformation avance. Le standard abrite 55 % des poules pondeuses de l’OP, suivi par le plein air (24 %), le sol (12,8 %), etc. Mais elle doit se faire à la bonne vitesse pour être sûr que les élevages en place produiront ce qu’attend le marché. Parallèlement, Avril s’est soucié ces derniers mois de la performance économique de ses filiales Mâtines et Ovoteam. Des centres de conditionnement ont été fermés (Trémorel, Côtes-d’Armor ; Mondidier, Somme). Et celui de Naizin (Morbihan) a bénéficié d’un investissement en automatisation de 3 millions d’euros.