Hygiène de chai | Avec le NEP, un lavage maîtrisé, en toute sécurité
Le nettoyage en place, ou NEP, revêt de nombreux atouts et commence à s’implanter dans les chais. Voici en quoi il consiste et ce que ses premiers utilisateurs en pensent.
Le nettoyage en place, ou NEP, revêt de nombreux atouts et commence à s’implanter dans les chais. Voici en quoi il consiste et ce que ses premiers utilisateurs en pensent.
Ce n’est pas un hasard s’il est plébiscité par un grand nombre de secteurs agricoles et agroalimentaires. « Le nettoyage en place, ou NEP (ou CIP-Cleaning in Place), est une technique de nettoyage efficace, qui procure des économies d’eau ainsi que de produits chimiques, annonce Jean-Michel Desseigne, de l’IFV. Il a une action mécanique qui renforce celle des produits, et permet de fiabiliser les points clés du nettoyage que sont les turbulences, le temps de contact, l’action chimique (nature du produit et concentration) et la température. Je pense qu’à l’avenir, cette technique devrait se démocratiser dans les chais. » Et ce d’autant plus que peu de chais de vinification sont équipés d’arrivée d’eau chaude permettant un nettoyage efficace. L’emploi de NEP, pouvant chauffer l’eau, pallie donc ce problème.
Les turbulences renforcent l’efficacité chimique
D’un point de vue concret, un NEP est constitué d’une unité de nettoyage, installée de manière fixe ou mobile, qui envoie eau et produits dans les circuits, via une pompe qui crée des turbulences et donc une action mécanique. L’appareil gère automatiquement toute l’opération, et ce faisant, elle l’optimise et permet sa parfaite répétabilité. Elle libère également le personnel au chai, qui peut se dédier à d’autres taches et procure une meilleure sécurité pour les opérateurs puisqu’ils ne manipulent plus les produits de lavage. Enfin, elle permet une traçabilité des opérations et limite les rejets.
Plusieurs constructeurs conçoivent des appareils adaptés au secteur vinicole. Ainsi, depuis environ deux ans, Gai s’est allié avec l’italien Win & tech, pour proposer à ses clients des embouteilleuses avec un NEP fixe nommé CIP 2000. « Nous avions de plus en plus de demandes de la part des vignerons, témoigne Jérémy Archorlian, responsable qualité chez Gai. C’est même devenu un prérequis sur les grosses installations. » Le CIP 2000 a donc été étudié pour permettre le nettoyage et la désinfection (sanitation) du monobloc. Et le logiciel a été développé par Gai, afin d’avoir une seule et même interface pour les deux machines. Fabrice Dubosc, directeur technique des Vignobles Brumont, à Maumusson-Laguian dans le Gers, en est équipé depuis deux ans, et ne regrette pas son achat. " Cet appareil nous procure des gains d’efficacité, témoigne-t-il. Le nettoyage est beaucoup plus complet, puisqu’il allie thermique et chimique. Auparavant, nous n’utilisions que le thermique. De plus, il permet des économies d’eau et de rejets. " Il apprécie également le fait que la machine puisse travailler seule " en temps perdu " et permette ainsi des gains de main-d’œuvre. " Désormais, lorsque nous arrivons le matin, la chaîne est propre et prête à servir, se réjouit-il. Avant, il fallait qu’un opérateur arrive à 5h. " Par ailleurs, il souligne que toutes les opérations de lavage sont tracées par la machine, ce qui " est précieux dans le cadre de la mise en place de normes. Et cela donne confiance à nos partenaires ". S’il est satisfait par le retour sur investissement malgré le coût de départ (environ 65 000 à 70 000 euros), Fabrice Dubosc pointe néanmoins que la prise en main est longue et nécessite un opérateur qualifié. " Il faut bien huit mois avant de pouvoir utiliser toutes les fonctionnalités de la machine ", insiste-t-il. Et ce, même pour un usage quotidien. De même, il souligne que qui dit technologie, dit pannes.
Pour les plus petites bourses, il est possible d’opter pour une unité mobile, qui nécessitera en outre moins de tuyauterie, argue Jean-Michel Desseigne. Le fabricant girondin Fauchier est positionné sur ce créneau. En partenariat avec le spécialiste des détergents Quaron, il commercialise des unités NEP mobiles, disponibles entre 25 000 et 30 000 euros environ. « Elles nettoient à peu près tout, du moment que l’on peut raccorder le circuit en boucle », indique Jean-Denis Fauchier, le patron de l’entreprise éponyme. Cuves, tuyaux, centrifugeuses, embouteilleuses et consorts peuvent donc passer sous le jet de ces appareils. « Nous disposons même d’un programme de régénération des membranes de filtration (cartouches) », précise-t-il. En option, l’unité peut être équipée de résistances électriques chauffant l’eau.
Possibilité de réaliser des solutions tamponnées
Une fois branché au réseau d’eau, à l’électricité (prise en 16 A et triphasé) et à l’air comprimé (6 bars), le NEP mobile, doté d’un conductimètre, analyse la qualité de l’eau du client « et l’enregistre en tant que référence eau propre », poursuit Jean-Denis Fauchier. Il enclenche ensuite un pré-rinçage, et analyse l’eau de retour. Si elle est propre, il la conserve pour le nettoyage. L’unité comprend ensuite deux bacs produits différents. « On peut ainsi mettre une base dans le premier (soude) et un acide (acide péracétique) dans le second, ou un détergent et un désinfectant, explique Jean-Denis Fauchier. Mais on peut aussi faire des solutions tamponnées, c’est-à-dire faire en sorte que le pH final des rejets soit non impactant pour les micro-organismes des stations d’épuration. » Ces bacs produits sont reliés à des pompes péristaltiques permettant de contrôler la dose injectée, la vitesse de passage, la pression et le temps de contact selon le volume de la cuve ou du matériel et de la concentration désirée. Autant de facteurs clés pour optimiser le nettoyage, qu’il est bien sûr possible d’enregistrer et programmer. La circulation du ou des produits est alors automatique. Dans le cas de l’application d’un premier produit, puis d’un second, la machine intègre une phase intermédiaire de rinçage. À l’issue du nettoyage, l’automate déclenche un rinçage final, avec contrôle de l’eau de retour par rapport au niveau de départ. « Tant que la conductivité n’est pas conforme, l’appareil continue à rincer », informe Jean-Denis Fauchier. En cas de problème (temps de rinçage trop important, souci de vidange, arrivée d’eau fermée, etc.), des alarmes préviennent l’utilisateur. Enfin, l’appareil mémorise toutes les opérations qu’il réalise, ce qui permet une traçabilité optimale. Avec de tels atouts, difficile de ne pas présager un bel avenir à ces machines au sein des chais…
Ne pas faire l’impasse sur les boules
Le nettoyage en place d’une cuve implique qu’elle soit équipée d’une boule de nettoyage. Cette dernière peut être statique ou dynamique, mais doit être adaptée au débit de la pompe du NEP, à la capacité de la cuve à laver et au diamètre des tuyaux. Les boules peuvent aussi fonctionner sans NEP, mais nécessitent l’envoi d’eau sous pression.
Leur intérêt est d’appliquer mécaniquement l’eau et les produits de nettoyage sur toute la surface des parois. A priori, Jean-Michel Desseigne recommande d’opter pour des boules rotatives, "qui permettent de mieux varier l’action mécanique".
Plusieurs entreprises proposent ce type d’outil. C’est notamment le cas de Limatec, qui est pour le moment spécialisée dans les boules fixes, "les rotatives n’étant, jusqu’à il y a peu, pas très fiables", explique Isabelle Lucas, de la société. Ces boules fixes peuvent être percées sur toute la périphérie, juste en bas, juste en haut ou sur un côté. Selon le modèle choisi, le prix s’échelonne de 30 à 109 euros.
Michel Marceron, responsable embouteillage de la Cave du Marmandais, à Cocumont, dans le Lot-et-Garonne
« Il n’y a plus d’erreurs de dilution »
« Nous sommes équipés d’une unité NEP mobile depuis septembre 2017. L’objectif était de disposer d’un suivi du nettoyage et de verrouiller la procédure. Nous l’utilisons quotidiennement pour nettoyer la cuverie inox qui sert à la mise en bouteille, la palette de filtration sur cartouches, les canalisations, la tireuse et la rinceuse de bouteilles vides. Dans ce dernier cas, nous avions le choix entre stériliser à 90 °C ou aux produits chimiques. Nous avons donc opté pour la seconde option via le NEP.
Cet outil est maniable, peu encombrant, et très facile d’emploi une fois que les programmes sont créés pour chaque matériel. L’entreprise nous aide d’ailleurs à les définir. Il y a ensuite une petite période de prise en main nécessaire pour trouver le meilleur compromis entre la qualité de nettoyage souhaitée et le temps de l’opération. Le NEP permet de réelles économies d’eau et de produits et empêche toute erreur de dilution. Par ailleurs, cela évite que les opérateurs soient en contact direct avec les produits. Un autre avantage est que tous les nettoyages sont tracés, et que l’automatisation de cette opération permet un gain de temps de personnel. »