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Trouble anormal de voisinage : moins de procès en perspective contre les agriculteurs

L’Assemblée nationale a adopté le 5 décembre une proposition de loi modifiant le Code civil en vue, entre autres, de mieux protéger les agriculteurs de plus en plus attaqués pour troubles anormaux de voisinage. 

Eric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, le 4 décembre devant l'Assemblée nationale
"L’odeur du bétail, le bruit de tracteurs, le chant de coq ou encore le meuglement des vaches poussent parfois les nouveaux habitants à saisir la justice, à l’instrumentaliser et à s’opposer à des installations qui étaient là bien avant leur arrivée", a déclaré Eric Dupond-Moretti le 4 décembre devant l'Assemblée nationale.
© Assemblée nationale

Les députés ont adopté lundi 4 décembre à 78 voix pour (12 contre) une proposition de loi, afin d'éviter notamment la multiplication de plaintes de néo-ruraux contre des agriculteurs. « C’est une très grande satisfaction pour la FNSEA et les Jeunes agriculteurs, c’est un combat que l’on mène depuis plusieurs années. Je tiens à saluer le travail d’Eric Dupond-Moretti », commente Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA, à l’origine de ce texte avec l’avocat spécialisé dans le secteur agricole Timothée Dufour

Portée par la député Renaissance du Morbihan Nicole Le Peih, la proposition de loi sur l’adaptation du droit de la responsabilité civile avait été promise par le garde des Sceaux le 3 mars dernier lors du Salon de l’Agriculture. L’objectif : limiter les recours devant les tribunaux pour trouble anormal de voisinage contre des activités agricoles, aujourd’hui en forte hausse et laissés à la libre appréciation des juges.

Lire aussi : Trouble anormal de voisinage : les agriculteurs bientôt mieux protégés par le Code civil ?

Plusieurs centaines de procédures en cours engagées contre des agriculteurs

« On dénombre plusieurs centaines de procédures en cours engagées contre des agriculteurs par des voisins quérulents se plaignant de nuisances liées à leur activité. L’odeur du bétail, le bruit de tracteurs, le chant de coq ou encore le meuglement des vaches poussent parfois les nouveaux habitants à saisir la justice, à l’instrumentaliser et à s’opposer à des installations qui étaient là bien avant leur arrivée », a résumé hier Eric Dupond-Moretti en séance publique. « On s’attaque là à des gens qui se lèvent tôt, qui travaillent et qui méritent notre respect et notre aide. Cela pèse sur le moral de nos compatriotes ruraux, encombre les tribunaux de procédures ubuesques et dissuade d’éventuels candidats de rejoindre des professions essentielles à notre souveraineté alimentaire et à la préservation de nos campagnes. Il est grand temps de mettre un terme à ces abus ».

Lire aussi : Trouble anormal de voisinage : « il faut préserver l’activité agricole en lui permettant de se développer » 

La proposition de loi entérine la notion d’antériorité des activités

Concrètement, le texte adopté le 4 décembre par l’Assemblée nationale prévoit de modifier le Code civil en stipulant que « le propriétaire, le locataire, l’occupant sans titre, le bénéficiaire d’un titre ayant pour objet principal de l’autoriser à occuper ou à exploiter un fonds, le maître d’ouvrage ou celui qui en exerce les pouvoirs à l’origine d’un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage est responsable de plein droit du dommage qui en résulte » mais en précisant que « la responsabilité n’est pas engagée lorsque le trouble anormal provient d’activités, quelles que soient leur nature, prééxistant à l’installation de la personne lésée, qui sont conformes aux lois et règlements et qui se sont poursuivies dans les mêmes conditions ou dans des conditions nouvelles qui ne sont pas à l’origine de l’aggravation du trouve anormal ».

Un travail à déployer sur le terrain auprès des nouveaux arrivants

La FNSEA aimerait que le texte aille plus loin en étendant cette non-responsabilité à l’évolution « non substantielle » des activités agricoles. « Dans le cadre de la transmission et du renouvellement des générations agricoles sur lequel va porter le pacte et la loi d’orientation et d’avenir agricoles (PLOA), il faudrait pouvoir prendre en compte l’évolution de l’activité liée à l’arrivée d’un associé », cite par exemple Luc Smessaert, qui annonce le dépôt d’un nouvel amendement en ce sens lors du passage du texte devant le Sénat qui devrait intervenir rapidement. 

Au-delà de ce texte qui vient compléter la loi visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises (dite loi du coq Maurice), le vice-président de la FNSEA estime qu’il convient de travailler sur les chartes de bon voisinage sur le terrain. « Le préfet du Morbihan a lancé avec les notaires une convention qui prévoit d’intégrer dans toutes les ventes un état des lieux de proximité sur l’activité agricole et des entreprises. Il faudrait arriver à le généraliser », avance-t-il. 

Lire aussi : Une loi pour définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes  

Des démarches qui pourraient éviter de nouveaux procès comme celui de Vincent Verschuere, jeune agriculteur dans l’Oise, dont l’épilogue avec la décision de la Cour de Cassation est attendue ce 7 décembre. 

Lire aussi : L'EARL Verschuere condamnée à payer plus de 100 000 euros pour nuisances

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