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Les conséquences de l’engorgement du marché

Face à une offre excédentaire et une consommation morose, le principal risque est un engorgement du marché de la viande ovine, provoquant une chute du cours de l’agneau français.

Les professionnels ovins cherchent des chambres froides pour stocker provisoirement les agneaux abattus.  © D. Hardy
Les professionnels ovins cherchent des chambres froides pour stocker provisoirement les agneaux abattus.
© D. Hardy

Avec les circuits de distribution saturés de viande d’agneau français et étranger, le prix payé à l’éleveur a d’ores et déjà affiché un net recul. « On parle d’un euro de moins kilo au niveau français, s’alarme Michèle Boudoin. Certes, notre priorité est que les agneaux soient collectés, mais nous n’avons pas de visibilité sur les prix. » Bruno Damiens, éleveur d’ovins allaitants en Ardèche et administrateur de la coopérative Agneau Soleil, insiste : « pour nous c’est la triple peine : nos agneaux sont prêts à partir et ne sont pas collectés, les rares qui partent quand même mettent longtemps à nous être payés et d’un autre côté, on nous dit que le prix de l’aliment va augmenter, les charges sont toujours bien là et les factures continuent d’affluer. »

35 à 50 % de la consommation annuelle d’agneau à Pâques

La situation est très difficile pour la filière puisque la période de Pâques représente bon an mal an 35 à 50 % de la consommation annuelle de viande d’agneau en France et pour une grande partie des éleveurs les ventes de Pâques peuvent constituer également la moitié du chiffre d’affaires annuel. Malgré les cours de l’agneau à la hausse pendant la première semaine de confinement, la baisse de la demande qui a rapidement suivi a entraîné une brutale chute des cours la semaine suivante, soit une grosse quinzaine de jours avant Pâques.

Trouver du stockage froid pour continuer l’abattage

Pour tenter de limiter les pertes en élevage, puisqu’un agneau qui dépasse un certain poids devient trop gras et donc invendable, la FNO a communiqué quelques astuces pour les éleveurs, mais le syndicat a surtout œuvré nuit et jour pour trouver des solutions avec les pouvoirs publics. « Notre priorité, c’est de trouver des espaces de stockage froids, publics ou privés, afin de pouvoir poursuivre l’activité d’abattage », annonce la présidente du syndicat ovin. Pour les espaces de stockage privés, la machine est lancée. Grandes surfaces et autres opérateurs de la filière disposant de grandes chambres froides pourraient mettre à disposition leurs infrastructures moyennant néanmoins un forfait journalier dépendant du volume dont le montant est encore inconnu à ce jour. À la question de Michèle Boudoin sur les espaces de stockage publics (entrepôts des marchés d’intérêt national par exemple), le ministre de l’Agriculture a précisé que ceux-ci étaient malheureusement réquisitionnés comme chambres mortuaires pour faire face à la pénurie de cercueils et à l’engorgement des services funéraires.

L’avis de Michèle Boudoin, présidente de la FNO

« Les rayons de la distribution encombrés par l’agneau néo-zélandais »

Chaque année, le même schéma se reproduit. La production française d’agneau ne couvrant que 40 % de la demande nationale, la grande distribution importe massivement de l’agneau de Grande-Bretagne, d’Irlande, mais surtout de Nouvelle-Zélande. Cette année, les commandes sont arrivées vraisemblablement avant le début de la crise du confinement en France, remplissant les supermarchés de viande d’agneau chilled ou congelée provenant de l’autre bout du monde.

« Une chaîne de solidarité pour les ovins »

Quand l’heure est venue pour les éleveurs français de vendre leurs productions, la place était donc déjà prise et la consommation en berne n’a pas suffi pour écouler ces stocks d’agneau néo-zélandais. Nous travaillons étroitement avec Interbev ovins et les pouvoirs publics pour trouver des solutions à cette situation plus que critique. Après la première semaine où les agneaux ont été abattus massivement, les frigos des grandes surfaces sont pleins.

Report de l’agneau congelé pour libérer les rayons

Nous avons proposé au ministre que les enseignes de la grande distribution fassent don de leurs agneaux néo-zélandais aux cantines institutionnelles (hôpitaux, armées, commissariats, ministères, etc.). Cela aurait permis de libérer de la place, tout en faisant un beau coup de communication pour les grandes surfaces et une opération blanche car le don aurait été défiscalisé. À ce jour, nous n’avons pas de retour de la grande distribution à ce sujet. Néanmoins, la plupart d’entre elles mettent en place des stratégies pour favoriser l’agneau français dans leurs linéaires, notamment par l’arrêt des imports d’agneau de l’Union européenne. La distribution a également demandé aux opérateurs de fournir des pièces plus petites. L’agneau néo-zélandais congelé pourra être stocké plusieurs mois, vraisemblablement jusqu’à Noël et le chilled pourrait servir pour la préparation de plats cuisinés. Chacun remonte ses manches et toutes ces actions mises bout à bout forment une belle chaîne de solidarité avec la filière ovine française. »

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