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De la bergerie à la fromagerie, l’aventure du Fédou

Un héritage familial séculaire et un terroir marqué par le pastoralisme et l’élevage de brebis ont façonné l’histoire de la fromagerie du Fédou, située au cœur du Causse Méjean, en Lozère.

Dans les premiers frimas de l’année, les steppes des Causses se couvrent d’une fine pellicule de givre à cette heure matinale. Alors que le camion-citerne enchaîne les livraisons des huit éleveurs collectés, les équipes de la fromagerie familiale du Fédou, située à Hyelzas, en Lozère, s’activent dans les locaux. Dès 5 h, le moulage du caillé de la veille commence. « Nous sommes équipés d’un basculeur-mouleur qui permet d’automatiser le moulage des pâtes molles », explique Aurélie Hecker, responsable qualité de la fromagerie. L’impressionnante machine se met en branle et les blocs moules avancent au fur et à mesure, remplis de caillé. Les autres fromages sont toujours moulés à la main. « Nous misons avant tout sur un travail artisanal, avec de l’automatisation juste là pour soulager les fromagers. Notre priorité reste toujours le savoir-faire humain et le contact avec le produit », souligne Vincent Pratlong, le directeur de production.

Le savoir-faire humain et un artisanat local

En effet, l’humain est bien au centre de l’organisation de la fromagerie du Fédou, qui tient son nom de « fede », qui signifie « brebis » en occitan. Avec ses vingt-cinq salariés à temps plein et ses huit producteurs (quatre bio et quatre conventionnels) qui livrent 100 % de leur lait ici, la fromagerie du Fédou se targue d’être une principale source d’emplois sur le Causse Méjean, qui compte moins de 500 âmes à l’année.

Si la production fromagère du Fédou a débuté dans les années 90 grâce à Marine et Armand, éleveurs de brebis laitières et visionnaires (voir page suivante), la fromagerie telle qu’elle existe aujourd’hui a connu plusieurs évolutions et agrandissements.

Des agrandissements successifs jusqu’à 1 000 m²

 

 
Vincent Pratlong, directeur de production, fait partie des  héritiers de cette entreprise familiale. Il souhaite moderniser les locaux pour améliorer le travail et mettre en place des pratiques plus écologiques.
Vincent Pratlong, directeur de production, fait partie des héritiers de cette entreprise familiale. Il souhaite moderniser les locaux pour améliorer le travail et mettre en place des pratiques plus écologiques. © B. Morel
Partie d’un local de 500 m² en 1992, la fromagerie s’étend sur 1 000 m² au gré de trois extensions. « Nous sommes en train de prévoir le prochain agrandissement, reprend Vincent Pratlong. La circulation entre les pôles doit être fluidifiée et la zone de fabrication devra être plus vaste. » Car il en faut de la place, pour transformer les quelque 800 000 litres de lait collectés chaque année en plus de 300 tonnes de fromage. « La collecte a lieu tous les jours, avec environ 3 000 litres par jour, sauf le mercredi et le samedi, notamment pour économiser l’eau nécessaire au lavage du camion », précise Aurélie Hecker. Le lait ne reste jamais plus d’un jour dans les tanks sur les exploitations. « Depuis trois ans, nous sommes passés au lait thermisé, ce qui nous permet de nous affranchir en partie des problèmes de pathogènes et du coût des analyses du lait cru, poursuit Aurélie Hecker. La thermisation permet d’éliminer les listeria et les salmonelles, tout en préservant la flore technique. » C’est toujours le lait bio qui est transformé en premier. « Cela fait tout juste un an que le bio a été intégré dans nos gammes, il représente 30 à 40 % des volumes pour seulement 5 % de la valeur produite. C’est un marché encore en construction », tempère Vincent Pratlong. Pour lui, la fromagerie a atteint son rythme de croisière, avec un volume total satisfaisant.

 

Consommer moins d’eau, moins d’énergie

« On cherche à travailler mieux, avec la prise en compte de l’environnement, la récupération de l’eau de pluie, des machines moins consommatrices en énergie… et côté éleveurs, les nouveaux sont toujours les bienvenus. Il faut préparer le renouvellement des générations. » Durant l’automne, la fromagerie a installé des panneaux photovoltaïques. Il est prévu également un système de récupération de chaleur et depuis 2017 une chaufferie à bois maintient la température dans les locaux.

Une fois moulés, ressuyés, séchés, les fromages vont tous faire trempette dans un bain de saumure, à l’exception du pérail. Les pâtes pressées et les pâtes molles sont ensuite affinées dans des hâloirs séparés, pour éviter la contamination du mucor.

Médaille de bronze au Mondial du fromage

La gamme du Fédou se développe en continu et compte plus d’une vingtaine de références, réparties en cinq familles : les pâtes semi-pressées, les croûtes mixtes cerclées, les pâtes molles, les lactiques et les types brousse. Le fromage éponyme, le premier à avoir été créé, est une sorte de camembert de brebis. Le Claousou, commercialisé à partir de 2012, est le produit phare, reconnaissable à son cerclage en bois d’épicéa et à sa couleur légèrement orangée, due à sa croûte morgée. Ce dernier a d’ailleurs obtenu la médaille de bronze au Mondial du fromage 2022. « Nous suivons de près les évolutions du marché et, de ce fait, nous restons toujours sur le qui-vive côté R&D », explique Sébastien Lodier, le responsable expéditions et commercial de la fromagerie. Les fromages sont expédiés quatre fois par semaine, suivant des cargaisons allant de 3 à 8 tonnes. « Nous livrons les grandes surfaces locales et des crémiers au niveau national, voire international. Certains de nos grossistes exportent même jusqu’en Asie », énumère ce dernier.

L’aventure de la fromagerie de Hyelzas-Le Fédou, au cœur du Causse Méjean, est loin de se terminer. Mais malgré la reconnaissance de la qualité des produits par-delà les frontières, le terroir et l’artisanat sont toujours au centre des préoccupations de la famille Pratlong.

« Des brebis et des hommes », pour expliquer le métier de fromager

« Grâce à la proximité entre la fromagerie et la bergerie historique du Fédou, nous avons mis au point une visite guidée pour le grand public, apprécie Aurélie Hecker, également en charge d’animer ces rencontres avec les visiteurs. En trois heures, nous faisons découvrir l’univers de la fromagerie et ses différents métiers, nous visitons l’élevage de brebis qui se trouve à 300 mètres et nous terminons par un atelier de fabrication. Nous avons remplacé le caillé par des cubes de mousse blanche. Cela marche très bien et ça nous évite de perdre de la matière et du temps pour le nettoyage. »

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