Séduire les Américains, tentés par les produits gourmets
Des apéritifs à la française organisés à New York, des pavillons au Fancy food show de San Francisco… Les industriels français de l'alimentaire sont nombreux à vouloir poser leurs valises aux États-Unis ou y exporter leur « best seller ». Mais y-a-t-il une place à prendre sur ce marché déjà mature ? Oui, semble-t-il, car les Américains sont en quête de produits qualitatifs.
Ils sont nombreux à tenter, ou avoir tenté, l'aventure sur le marché américain : Bongrain, Lactalis, Bridor, Pasquier, Jacquet… Un marché pourtant déjà mature, « mais qui est tiré vers le haut, explique Pauline Oudin, directrice de l'agence Sopexa New York. Depuis sept à huit ans, on observe des aliments qui s'améliorent, et un grand attrait des Américains pour la culinarité ». Chaînes de télévision dédiées à la cuisine, chefs « star », nombre de marchés fermiers en hausse sur tout le territoire (plus de 8 200 en 2014 selon l'USDA contre 3700 en 2004)… Les Américains se seraient-ils découvert une passion récente pour les bons produits ? « Quand les Américains font quelque chose, ils le font à fond », souligne Pauline Oudin. En témoigne les queues de plusieurs heures à New York pour déguster les cronuts (fusion d'un croissant et d'un donut du pâtissier français ” Dominique Ansel) ou la naissance de guides en ligne, comme eater.com, qui notent les restaurants américains. « Il y a actuellement aux États-Unis une vraie découverte des produits gourmets. Et les produits français, vus par les Américains comme des produits de qualité, bons et sans risque sanitaire, peuvent trouver leur place », explique-t-elle. Si les produits tricolores y ont bonne réputation, ils ont « aussi l'image de produits chers. Même si avec la baisse de l'euro nous allons pouvoir améliorer notre positionnement prix », note Pauline Oudin. Autre réputation qui nous précède, « la qualité du service. Les Américains ont peur qu'avec des entreprises françaises il n'y ait personne pour répondre à leurs mails en plein mois d'août », relate-t-elle. Le marché américain réclame en effet un contact important avec les clients. Tout d'abord, car la grande distribution y est éclatée. « Les chaînes sont régionales et gérées très différemment d'une enseigne à l'autre, précise Pauline Oudin. Il faut être personnel dans l'approche, en rencontrant les gens, notamment sur les salons. » Sopexa gère par exemple des stands Pavillon France dans différents salons américains. Parmi les plus visités, le Fancy food show de New York et San Francisco. La prochaine édition aura lieu à San Francisco du 11 au 13 janvier 2015. Autre salon, la PLMA, salon des marques de distributeurs, qui se déroulera à Chicago en novembre. Pour tester le marché, il y a aussi Internet.
“ Une grande distribution éclatée et régionale
« Avant d'investir dans un lancement aux États-Unis, il est possible de vendre des produits sur des plateformes en ligne. Les Américains n'hésitent pas à acheter des aliments sur Internet », souligne-t-elle. Ainsi, Sopexa lance actuellement une action avec le site igourmet.com. « Dix entreprises vont payer 2 000 dollars pour pouvoir référencer leurs produits. C'est une bonne façon de déceler quels sont ceux qui se vendent le >> mieux », annonce-t-elle. Pour les industriels souhaitant s'installer aux États-Unis, un Club des exportateurs à l'ambassade de France à Washington a également été créé. « C'est un travail d'équipe, avec des professionnels d'Ubifrance en charge de l'aspect commercial, de Sopexa pour le marketing et aussi des équipes de l'ambassade pour accompagner les entreprises dans tous les aspects réglementaires. Des grandes entreprises françaises, comme Pernod Ricard, déjà établies aux États-Unis y apportent aussi leur soutien », souligne Pauline Oudin.
“ Pas de yaourts : c'est impossible du point de vue législatif
Après avoir pendant trois ans fait le tour des distributeurs et des salons pour faire goûter ses produits et mieux connaître ce marché, l'entreprise Michel et Augustin a sauté le pas. Début janvier, Antoine Chauvel a pris la tête de la Banana Farm, les locaux newyorkais de la marque. « Le défi, c'est d'installer cette marque premium et citadine aux États-Unis comme nous l'avons fait il y a dix ans en France », explique-t-il. Si la marque exporte déjà dans 23 pays, c'est aux États-Unis qu'elle a choisi de s'installer physiquement pour la première fois à l'étranger. « C'est le premier ou deuxième plus gros marché alimentaire au monde, selon les chiffres. S'y implanter, cela nous permet d'être notre propre importateur, c'est plus de liberté sur le tarif », poursuit-il. ” La stratégie de Michel et Augustin est de garder la même marque et les mêmes circuits de distribution : grande distribution, mais aussi food service, catering ferroviaire et aérien et épiceries fines. « Nous allons commencer avec notre gamme de gâteaux que nous produisons en Europe, explique Antoine Chauvel. En racontant notre histoire, le côté naturel de nos produits et de nos recettes ». L'entreprise envisage aussi d'exporter sa mousse au chocolat en pot. « On n'en trouve pas du tout aux États-Unis en grande distribution. Il y a peut être un créneau à prendre », note-t-il. Pas de yaourts Michel et Augustin dans un premier temps dans les linéaires américains. « C'est impossible du point de vue législatif, car il s'agit d'un produit de “ grade A ”. Il faudra forcément passer par un partenaire sur place. »