Production agricole et distorsion de concurrence
La mission de l’agriculture est d’assurer l’alimentation de la population, impliquant une production excédentaire pour éviter l’insuffisance. La rémunération du producteur nécessite souvent des mécanismes correcteurs du marché. L’exception agricole postulée par le traité de Rome a cependant été supprimée dès 1962 : les règles de concurrence sont applicables aux marchés agricoles. L’élargissement accéléré du marché unique a renforcé les distorsions en plaçant tous les producteurs face à un même marché alors que les coûts de production diffèrent notablement. Plusieurs démarches ont été engagées face à ces inquiétudes.
Rédaction Réussir
1. Le rapport parlementaire sur l’emploi dans le secteur de l’agriculture
Le député du Finistère Jacques Le Guen a déposé un rapport en mai 2005 sur « L’impact de la distorsion de concurrence sur l’emploi dans le secteur agricole » dans différents pays européens. S’agissant du coût salarial, la France se situe dans le peloton de tête sans être le pays au coût le plus élevé : le Danemark, le Royaume-Uni ou les Pays-Bas la devancent. Mais il ressort en outre du rapport que les disparités se sont accentuées, plus particulièrement avec les nouveaux entrants, en ce qui concerne notamment le travail saisonnier.
2. L’application nationale des règles communautaires, facteur de distorsions de concurrence
En 2005, le conseil général du Génie rural, des Eaux et des Forêts et le Comité général vétérinaire ont évalué l’impact de l’application de la réglementation communautaire en France concernant l’alimentation animale ou humaine, et recherché les cas où elle irait au-delà des exigences communautaires, élément de distorsion souvent dénoncé. Leur rapport montre que les disparités les plus graves proviennent des réglementations nationales en matière de produits phytosanitaires, de valorisation des sous-produits d’origine animale et de réglementation des transports. Les rapporteurs ont, comme l’avait fait Jacques Le Guen, recommandé la mise en place d’un Observatoire des distorsions. De surcroît, ils conseillaient une simplification et une harmonisation des réglementations ainsi qu’une convergence des standards de qualité.
3. L’Observatoire des distorsions
L’article 56 de la loi du 5 janvier 2006 a créé, conformément aux préconisations des rapports, un Observatoire des distorsions, chargé « de repérer et expertiser les différentes distorsions, tant en France qu’au sein de l’Union européenne, quelles que soient leurs origines, qui pourraient conduire à la déstabilisation des marchés des produits agricoles ». Il a étudié deux rapports : l’un sur les distorsions de la réglementation en matière de produits phytosanitaires et l’autre, établi par l’Inra, sur le thème « emploi et compétitivité des filières de fruits et légumes : situation française et comparaison européenne ».
Malheureusement, l’observatoire, dont les ambitions étaient grandes, est tombé en sommeil depuis 2008, faute de budget, bien que le nombre de questions parlementaires posées depuis lors démontre que les interrogations en la matière demeurent, et que les producteurs aient manifesté leur mécontentement avec de plus en plus d’insistance.
Résorber les distorsions de concurrence par l’harmonisation des réglementations et des coûts est un impératif pour l’Europe, les seules distorsions admissibles provenant du climat et des sols.