Interdiction du bisphénol A : quelles conséquences ?
Depuis le 1er janvier, toute fabrication, importation, exportation et mise sur le marché d'emballage alimentaire contenant du bisphénol A (BPA) est interdite en France. Cette disposition est prévue par l'article 1 de la loi no 2012-1442 du 24 décembre 2012. Les industriels ont donc eu deux ans pour trouver des substituts au BPA. « Un travail considérable a été fait par les industriels et leurs fournisseurs, explique Bérénice Mazoyer, responsable qualité à l'Ania. Le BPA était utilisé comme vernis dans les canettes, boîtes, bouchons… C'était une solution universelle et nous n'avons pas trouvé d'équivalents ». Car là où le BPA pouvait être utilisé pour tous les produits, les substituts s'appliquent à des familles de produits selon leurs caractéristiques (ph, taux de lipides…).
Hausse du prix de l'emballageUn rapport du gouvernement publié en décembre liste tous les substituts trouvés pour le moment, ainsi que leurs avantages et inconvénients. Et la liste est longue. Pour certains produits (notamment les plus acides), il a été très compliqué de trouver des subs-tituts. « Mais la loi est maintenant entrée en application, et tous les produits mis sur le marché doivent la respecter », souligne Bérénice Mazoyer.
Autre difficulté : tester ces produits. Même si les professionnels avaient anticipé l'interdiction du BPA, ils n'ont au final disposé que de quelques années pour tester les alternatifs. Résultat : pour certains produits les dates limites d'utilisation optimale ont été réduites. « Cela ne concerne que les produits qui avaient des durées de vie très longues de l'ordre de cinq ans, souligne Bérénice Mazoyer. Ils sont passés à trois ans, par mesure de précaution, car seulement des tests de vieillissements accélérés ont pu être réalisés. »
“La DLUO a été réduite à 3 ans pour les produits à durée de vie très longue
” Côté coût, l'Ania n'a pas évalué globalement la portée de la mesure. « Les chiffres remontés par certains de nos adhérents nous disent que le prix des emballages aurait augmenté de 3 à 4 % », explique-t-elle. Rapporté au coût du produit, la mesure devrait être nulle pour le consommateur. La loi s'applique aussi pour les produits fabriqués en France destinés à l'export. Même si le marché de destination autorise le BPA, interdiction est faite aux opérateurs français d'en mettre sur le marché. Ce désavantage pourrait-il se transformer en argument de vente ? « À l'Ania, nous sommes défavorables aux allégations sur des sujets sanitaires. Cela peut jeter le trouble dans les esprits. Cela ne nous semble pas pertinent de faire du marketing sur des avis scientifiques », note Bérénice Mazoyer.
Au niveau européen, l'interdiction du BPA en France suscite des controverses, car les fabricants étrangers doivent se plier à la loi française s'ils veulent continuer à exporter dans l'Hexagone. Certains États membres ont donc demandé à la Commission européenne de se prononcer sur une éventuelle distorsion de concurrence. Cette dernière attend l'avis de l'Efsa (autorité européenne de sécurité des aliments), dont la publication est prévue à la fin du mois, pour se prononcer. En effet, la France a interdit le BPA sur la base d'avis scientifiques rendus par l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire). L'Efsa, qui a déjà conclu à l'innocuité du BPA, a récemment procédé à une réévaluation du BPA. Le groupe scientifique de l'Efsa sur les matériaux en contact avec les aliments (groupe CEF) a adopté cet avis lors de sa réunion plénière mi-décembre. L'Efsa publiera l'avis fin janvier 2015.