États-Unis : contraintes pour les exportateurs français
Conçue dans l'objectif d'améliorer la sécurité sanitaire des aliments aux États-Unis, la loi américaine de modernisation de la sécurité sanitaire des aliments (FSMA) s'inspire fortement des règles européennes, en se concentrant sur la prévention. On retrouve le concept de protection du consommateur érigé en dogme et pour ce faire, la FDA se voit attribuer de nouvelles compétences et moyens d'action. Mais les textes d'application de cette loi se faisaient attendre. Le retard a maintenant été rattrapé par la publication de règles détaillées pour l'importation sur le sol américain de la plupart des produits alimentaires. Son champ d'application est particulièrement large, puisqu'il inclut l'alimentation animale.
Il s'agit de textes complexes qui reposent, tout d'abord, sur le concept de contrôle préventif des fournisseurs (américains et étrangers). Ce premier texte d'application a été publié le 17 septembre dernier.
Plan de maîtrise sanitaire
Cette nouvelle réglementation impose, la mise en place d'un plan de maîtrise sanitaire écrit, comprenant un plan de contrôle de la chaîne d'approvisionnement en matières premières. Ce système s'inspire de notre fameuse démarche HACCP, mais en diffère également sur de nombreux points. Les dérogations sont nombreuses, mais encore faut-il maîtriser le texte pour les identifier.
Il convient de rappeler qu'en Europe, aucune denrée alimentaire ne doit être mise sur le marché si elle est dangereuse. Le « paquet hygiène » met cette obligation à la charge des exploitants du secteur alimentaire, en préconisant la démarche HACCP.
Le programme de vérification des fournisseurs étrangers (FSVP – Foreign supplier verification program) (1) vient compléter ce dispositif. Il s'agit de l'acte législatif le plus important pour l'importation d'aliments aux États-Unis, depuis l'adoption en… 1906 du Pure foods act. Publié le 27 novembre 2015, il impose aux importateurs un strict contrôle de leurs fournisseurs étrangers, selon des référentiels détaillés par catégories de produits. Là encore, un parallèle avec les règles européennes peut être fait, dans la mesure où désormais les importateurs américains vont endosser la responsabilité d'un fabricant. Le règlement européen 178/2002 instaure le principe de responsabilité solidaire des exploitants « de la fourche à la fourchette »(2), duquel découle le principe de traçabilité.
Ce contrôle comprendra non seulement la vérification de la conformité des produits eux-mêmes, mais également celle des process de fabrication.
Contrôles nombreux, sanctions lourdes
Des auditeurs agréés FDA, ou au minimum, qualifiés pour ce type de contrôles seront requis pour les mener à bien. Un programme d'accréditation a également été adopté à cet effet.
Construire un nouveau système de sécurité alimentaire va prendre du temps, mais les États-Unis se sont manifestement donné les moyens de mener à bien cette tâche, et les contrôles risquent d'être nombreux et les sanctions lourdes. La date d'entrée en vigueur de ces textes d'application varie selon les domaines concernés, l'échéance la plus proche étant celle du 26 janvier 2016. Mais fort heureusement, les entreprises disposeront de dix-huit mois à compter de cette date pour se conformer aux nouvelles dispositions. La FDA a, de surcroît, annoncé la publication de guides pour le premier semestre 2016. Mais la complexité de ce système – et donc son coût – risque, très certainement, de constituer un frein à l'exportation des petites entreprises et/ou des primo exportateurs français. Et la rigidité de ce nouveau système peut surprendre quand on sait que, statistiquement, les plus gros risques sanitaires pèsent sur les produits américains eux-mêmes et non sur les produits importés…
(1) Voir final rule for Foreign supplier verification program for importers of food for hu-mans and animals, 80 Fed. Reg. 74226 (Nov. 27, 2015, disponible sur le site Internet http://www.gpo.gov/fdsys/pkg/FR-2015-1127/pdf/2015-28158.pdf.
Règlement 178/2002, article 17.
Keller & Heckman est un cabinet international de droits des affaires, spécialisé en droits agroalimentaires, matériaux en contact alimentaires, environnement et publicité, présent à Bruxelles, Paris, San Francisco, Shanghai et Washington. Katia Merten-Lentz est avo-cate-associée au sein du cabinet Keller & Heckman. Elle est en charge de toutes les questions agroalimentaires, européennes et nationales, et ce, pour toutes les filières de la chaîne alimentaire. Elle intervient tant en conseil qu'en contentieux, auprès des industries de l'agroalimentaire pour la mise en œuvre de la réglementation agricole et alimentaire de l'Union européenne.