Œuf bio, des raisons d'espèrer en 2024 ?
Après deux ans de surproduction, et des efforts drastiques de certains opérateurs, l’offre en œufs bio semble s’équilibrer avec la demande. Les opérateurs se montrent néanmoins très prudents.
Après deux ans de surproduction, et des efforts drastiques de certains opérateurs, l’offre en œufs bio semble s’équilibrer avec la demande. Les opérateurs se montrent néanmoins très prudents.
Deux ans de crise. Le marché de l’œuf bio est passé de la croissance insolente à la panne totale fin 2021. Face à une offre bien plus large que la demande, phénomène inédit pour la filière, les opérateurs ont dû agir. Tout d’abord, par des déclassements, ce qui a d’ailleurs encombré le marché du plein-air à l’époque. Les vides sanitaires ont été allongés pour limiter la production. Rapidement, les poules ont été nourries à l’aliment conventionnel pour faire des économies, puis certains élevages sont passés en conventionnel (code 1).
Ceux qui arrivaient au bout de leur contrat de 10 ou 15 ans, les pionniers du bio, ne les reconduisaient pas. « La France comptait 8,8 millions de poules pondeuses bio en 2021, selon la base de données avicole du CNPO. Il n’y en avait plus que 7 millions en 2023 », résume Mohamed Bouzidi, chargé d’études économie à l’Itavi, qui estime à 1 million le nombre de poules passées du bio au plein-air.
Une baisse des effectifs de 20 %, mais le repli de la production a été encore plus fort, notamment avec le nouveau règlement bio, entré en vigueur en janvier 2022, qui obligeait à passer de 95 % à 100 % d’aliment bio. « Les poules entraient en ponte plus tardivement, le calibre des œufs reculait, avec moins d’œufs conditionnables, de calibres M et L, mais la situation était très variable selon les opérateurs et les choix des fabricants d’aliments », se rappelle Mohamed Bouzidi. Il juge que la situation s’est depuis un peu améliorée, « mais il faut compter une trentaine d’œufs de moins par poule ».
Selon les premiers éléments communiqués par l’Itavi, les effectifs de poules pondeuses bio seraient stables cette année.
Vers un regain de la demande d’œufs bio
Mais depuis quelques semaines, la direction du vent change. Les ruptures se multiplient dans les rayons, en conventionnel à cause de cas de salmonelles qui perturbent le commerce, mais aussi en bio. « Ce sont des achats par dépit, devant un rayon vide de codes 2 et 3, le consommateur choisit parfois du bio ou du plein-air », juge un opérateur de la filière. Pour autant, Mohamed Bouzidi pointe plusieurs raisons d’être optimiste à moyen terme : « Contrairement à d’autres filières, les œufs bio ne souffrent pas de déréférencements en rayon, ils sont toujours là. Ce sont les promotions qui manquent. » Or la baisse des prix de l’aliment des poules pondeuses bio, sur lequel est indexé le prix des œufs bio, va redonner un peu d’attrait au produit pour un consommateur qui scrute les tarifs. L’écart est potentiellement moins fort avec le reste de la gamme. « On devrait aussi retrouver davantage de promotions, qui ont un effet important sur l’œuf bio », estime l’économiste de la filière.
Des premiers signes encourageants mais l’euphorie est encore loin. Un opérateur majeur de la filière confie qu’il n’imagine pas renouer avec la croissance de son cheptel de pondeuses bio pour 2024, dans une ambiance très peu lisible.
Nombre de poules pondeuses bio : 8,8 millions en 2021 et 7 millions en 2023. Source : CNPO
Les Parisiens restent attachés aux œufs bio
Dans une note d’analyse sur la consommation d’œufs à domicile entre 2019 et 2022, publiée par l’Itavi, on apprend que les œufs bio sont surconsommés en région parisienne et dans le Sud-Est. Si la consommation d’œufs bio a baissé « dans l’absolu », on peut lire qu’« en revanche, la région parisienne a gardé un niveau d’achat dynamique de même pour la région sud-est », car ces zones présentent des populations au pouvoir d’achat plus élevé, ainsi que davantage de « bioconvaincus ». À noter aussi qu’entre 2019 et 2022, seuls les foyers composés d’une seule personne ont acheté davantage d’œufs bio.