Autorisation des OGM : les mutations en cours à Bruxelles
Selon une dépêche AFP du 3 février dernier, les procédures européennes pour l’autorisation des OGM pourraient être modifiées très rapidement pour faire une plus large place aux États membres.
Rédaction Réussir
Les pays de l’Union pourraient être autorisés à interdire la culture de plantes transgéniques sur leur territoire s’ils se trouvent dans un des sept cas figurant sur une liste qui devait être soumise par la Commission le 11 février 2011.
Parmi ces cas figure notamment la préservation de l’ordre public afin d’éviter des manifestations anti-OGM. On relève aussi la préservation des cultures traditionnelles, l’assurance pour les consommateurs de trouver des produits sans OGM, ainsi que des préoccupations morales philosophiques ou religieuses…
Jusqu’à présent, la décision d’autoriser ou non la culture d’organismes génétiquement modifiés implique au départ un avis favorable de l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (European Food Security Authority), créée par le règlement n° 178/2002.
Mais même en cas d’avis favorable, des États membres peuvent dégager entre eux une majorité pour s’opposer à une telle culture.
Dans le cas contraire, la Commission est contrainte de tirer toutes les conséquences d’une absence de majorité pour s’opposer en autorisant la mise en culture.
Bien entendu, les tractations entre États membres vont bon train, et nous avions déjà commenté dans Les Marchés les circonstances dans lesquelles l’Allemagne avait rejoint le camp des opposants à la culture du maïs transgénique Mon 810, amenant le 15 avril 2009 la Commission européenne à « réfléchir », selon sa propre formulation.
De ce point de vue aussi, la procédure est en passe d’être modifiée puisque la dépêche indique qu’à compter du 1er mars prochain, la Commission ne sera plus tenue en définitive d’autoriser la culture transgénique lorsque les États membres n’auront pas réussi à se mettre d’accord.
Par conséquent, les autorités européennes semblent en passe d’adopter un comportement beaucoup plus pragmatique en laissant aux États membres la possibilité de prendre une décision sur leur territoire.
Un système à la carte
Pour qu’une telle décision d’un État membre ne puisse pas être qualifiée de discriminatoire par un autre État membre, elle adopte une liste positive de situations dans lesquelles un refus de mise en culture pourra être justifié, bien consciente qu’elle est du caractère éminemment politique de la culture des OGM en Europe, qui dépasse la simple question de savoir si le produit qui en est issu est dangereux pour la santé ou l’environnement.
Pour l’instant, si des études scientifiques sont en mesure de mettre en évidence l’innocuité d’un produit pour la santé humaine, les études d’impact environnemental pour ces mêmes produits ne vont pas à la même vitesse et n’apportent pas les mêmes certitudes. C’est ce qui s’était passé en France avec le maïs Mon 810 qu’un avis de l’Afssa avait jugé sans danger pour la santé, ce qui ne résolvait en rien le problème environnemental posé aux pouvoirs publics.
C’est un système à la carte qui semble donc se dégager, et le fait que figure sur la liste la nécessité de préserver l’ordre public afin d’éviter des manifestations anti-OGM, montre combien la dimension scientifique dans l’implantation des OGM est en perte de vitesse.
Reste à savoir ce que fera la puissante firme Monsanto – et le gouvernement américain derrière elle, lorsqu’elle se verra opposer des refus de mise en culture fondés sur des considérations qu’elle percevra comme subjectives.
On peut d’ores et déjà parier sur un passage au crible de cette nouvelle réglementation par l’Autorité de règlement des différends de l’OMC, que des pays tiers ne manqueront pas de saisir.