Accord UE – Canada : de nouvelles perspectives pour l’agroalimentaire ?
C’est après quatre longues années de négociations que l’Union européenne et le Canada ont enfin trouvé un accord politique présenté officiellement comme « gagnant – gagnant » dans le secteur agroalimentaire. En effet, – mais attendons cependant la présentation exhaustive des termes de l’accord – il est présenté comme une véritable ouverture, au profit des Européens, du marché canadien, pour des produits comme la pâtisserie, les pâtes ou le chocolat. Toutefois, cet accord paraît loin d’être parfait. Bien qu’il garantisse des progrès notables en matière de protection des indications géographiques et pour le secteur du vin, demeurent des questions sensibles en ce qui concerne les produits laitiers, les viandes bovines et de porc, ou bien encore le maïs. Par ailleurs, sont d’ores et déjà exclus de l’accord les viandes de volaille et les œufs.
Droits de douane éliminés
Concernant les produits agricoles, les droits de douanes doivent être allégés dès l’entrée en vigueur de l’accord pour atteindre, à la fin des périodes transitoires, une suppression de 92,6 % des droits pour le Canada et 93,5 % pour l’Union européenne. Les fabricants de produits agricoles préparés – domaine dans lequel l’UE affiche un net excédent d’exportation par rapport au Canada – peuvent s’en réjouir, car les droits sur ces produits seront éliminés. En matière de pêche, l’UE devrait sortir gagnante, dans la mesure où la plupart des droits seront éliminés dès le départ et qu’il est prévu par l’accord un meilleur accès de l’industrie agroalimentaire de l’UE au poisson canadien. Pour les vins et spiritueux, l’accord doit permettre que la redevance à l’importation sur les produits de l’UE se base sur le volume et non plus sur la valeur, réduisant ainsi les coûts des vins européens.
Bœuf et porc : un accord handicapant pour l’Europe
Mais des aspects négatifs sont déjà identifiés. Ainsi, l’accessibilité accrue au marché européen, pour les producteurs canadiens de viande de bœuf et viande porcine prévue par l’accord, est handicapante pour un secteur européen actuellement extrêmement fragile. C’est à ce titre que Nicole Bricq, ministre au Commerce extérieur, a demandé « à la Commission de fournir rapidement tous les éléments sur les conséquences de cet accord sur l’élevage européen ». Précisant que « [l]a France ne se prononcera sur cet accord qu’après un examen approfondi de ces éléments ». Côté canadien il n’y a pas non plus de satisfaction. La grogne monte du côté des exportateurs de produits transformés de porc, qui considèrent que l’accord profitera plus aux Européens. Concernant les indications géographiques, l’accord reconnaît le statut spécial et assure la protection, sur le marché canadien, d’une liste de plusieurs produits agricoles européens d’origine géographique spécifique ; couverts par une indication géographique.
145 appellations reconnues
Environ 145 appellations vont bénéficier de l’accord. Parmi les exemples figurent Grana Padano, Roquefort, Elia Kalamatas olives ou Aceto balsamico di Modena. L’accord prévoit d’ajouter ultérieurement d’autres noms de produits à la liste. Certains produits bénéficiant d’indications géographiques importantes, tels que Prosciutto di Parma et Prosciutto di San Daniele, pourront enfin être commercialisés sous leur dénomination au Canada. Reste que l’accord est empreint d’une certaine hypocrisie. Concernant, les produits « feta », le Canada pourra continuer à utiliser l’appellation, mais avec un étiquetage ne devant pas évoquer la Grèce…
Enfin, l’accord renforce le précédent accord vétérinaire existant entre le Canada et l’UE en donnant plus de visibilité aux exportateurs européens de végétaux et de produits végétaux. Il ne s’agit là que d’une première étape politique. Seul le texte final permettra en théorie de se prononcer sur les détails des concessions négociées.