Envolée des prix des broutards : « les conditions sont réunies pour que les prix restent élevés »
Les prix des broutards français atteignent des niveaux inédits, car l’offre manque pour répondre à une demande bien présente, que ce soit sur le marché intérieur ou européen. Les perspectives sont à un maintien de ces niveaux de prix, vu le contexte.
Les prix des broutards français atteignent des niveaux inédits, car l’offre manque pour répondre à une demande bien présente, que ce soit sur le marché intérieur ou européen. Les perspectives sont à un maintien de ces niveaux de prix, vu le contexte.
4,18 €/ kg pour un broutard Charolais mâle U de 450 kg ou encore 4,20 €/kg pour un Limousin E de 350 kg, en semaine 2, soit respectivement des hausses de 28 % et 11 % sur un an, les prix des broutards flambent. « Tous les prix ont monté, dans toutes les races à viande » précise Maximin Bonnet, agroéconomiste, responsable conjoncture broutards et veaux à l’Idele.
Une offre de broutards en recul
« On manque d’offre, il y a vraiment un effet de la FCO » précise le spécialiste, chiffres à l’appui. Les naissances de veaux allaitants ont reculé, sur un an, de 8 % en septembre, de 12 % en novembre puis de 8 % en novembre.
« On manque d’offre, il y a vraiment un effet de la FCO »
« En cumul sur les onze premiers mois de 2024, on est à -5,8 % c’est un niveau de baisse élevé », explique-t-il. La baisse marquée à l’automne est inattendue, il rappelle que « ces dernières années, on avait un effet de décalage des veaux vers l’automne, qui permettait de sortir des animaux au début de l’été, avant les risques de sécheresse et à une période de prix assez élevés, on pense que cet automne les chiffres ont été plombés par la FCO ». Si la mortalité des adultes est limitée, les éleveurs sont néanmoins nombreux à avoir observé des avortements.
Une demande bien présente
« Dans le même temps, la demande est bonne, et dans toute l’Europe », explique Maximin Bonnet. De quoi, donc, voir les prix progresser.
Les exportations françaises de broutards reculent
« On est passé sous le million de têtes exportées en 2023, à 995 000 animaux, on devrait atteindre les 940 000 sur 2024 », quantifie l’expert qui pointe un petit rebond des envois vers l’Espagne, mais une baisse vers l’Italie. Or les Italiens demeurent très dépendants des broutards français, qui constituaient 93 % des animaux maigres importés, avec 470 000 têtes, sur les neuf premiers mois de l’année, selon les Douanes italiennes.
« Si les envois baissent ce n’est pas à cause du prix, c’est vraiment faute d’offre »
L’Irlande est loin derrière, avec 11 000 têtes, et on comptait 30 000 autres animaux européens. Les exportations de Charolais (-13 %) ont davantage baissé que celles de Limousins (-6 %) sur les neuf premiers mois de 2024, car les Italiens apprécient de plus en plus les Limousins pour leurs élevages sur caillebotis tandis que les éleveurs français aiment à travailler les Charolais, sur paille. « Les Italiens peinent vraiment à trouver d’autres animaux, avec la même qualité que les Français, si les envois baissent ce n’est pas à cause du prix, c’est vraiment faute d’offre », précise Maximin Bonnet qui pointe la hausse des importations de viande de notre voisin pour compenser la baisse de la production nationale, « mais les Italiens apprécient la viande d’animaux élevés et abattus en Italie », nuance-t-il.
Cumul 11 mois 2024 | Variation / 2023 | |
Monde | 780 084 | -4,1 % |
UE à 27 | 757 264 | -5 % |
Italie | 679 855 | -4,9 % |
Espagne | 52 616 | +9,6 % |
Grèce | 11 059 | +26 % |
L’engraissement de jeunes bovins a augmenté en France
Si nos exportations ont reculé, c’est aussi que davantage d’animaux restent sur le territoire. Les abattoirs cherchent à pallier la décapitalisation qui plombe leur fonctionnement en abattant davantage de JB. « La production de jeunes bovins de type viande progresse depuis 2022. En 2023, on a abattu 657 000 animaux, on devrait être autour de 665 000 en 2024 », estime le spécialiste. Néanmoins l’Idele table sur une hausse plus faible des abattages de jeunes bovins en 2025 « car il faut les emplacements pour développer la production ».
Les broutards, rémunérateurs pour les éleveurs
C’est chose rare, les prix des broutards ont dépassé les coûts de production, ainsi le charolais U de 350 kg s’affiche en semaine 2 à 4,15 €/kg, pour un coût de production à 4,1 €/kg selon l’indicateur interprofessionnel du premier semestre 2024. « Il faut voir que les prix des broutards ont beaucoup augmenté en deux ans tandis que, cette année, les charges opérationnelles, qui ne pèsent qu’une partie du coût de production, ont baissé », justifie Maximin Bonnet.
« les abattoirs ont besoin d’animaux pour faire tourner les outils, tous les pays d’Europe ont besoin de viande bovine»
Cette embellie du marché du broutard ne va pas forcément pénaliser l’engraissement, car « les prix des jeunes bovins progressent aussi et l’écart se maintient. Tout dépendra des coûts de l’aliment qui sont sur une tendance baissière pour le moment », précise-t-il, avant de se projeter, « les abattoirs ont besoin d’animaux pour faire tourner les outils, tous les pays d’Europe ont besoin de viande bovine, les conditions sont réunies pour que les prix restent élevés». Reste, en suspens, la question de l’accord commercial avec les pays du Mercosur.