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Goût d’œuf pourri dans le vin : choisissez bien votre levure

Une équipe de chercheurs de l’Inrae et de l’Institut Agro vient de démontrer le lien entre le nombre de gènes CUP1 de la souche de « Saccharomyces cerevisiae » et le taux de H2S du vin.

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Le sulfitage joue également sur la production d'H2S, le soufre ayant un rôle « amplificateur ».
© P. Cronenberger

Cette année encore, le mildiou fait des siennes, impliquant un nombre de traitements conséquent pour sécuriser la vendange et limiter les goûts de mildiou dans le vin. Or l’usage du cuivre en viticulture a un impact avéré sur les levures. C’est ce qu’une équipe de chercheurs de l’Inrae et de l’Institut Agro vient de prouver via des travaux dont les résultats ont été publiés dans la revue Scientific Reports. Depuis plus de cent cinquante ans que les viticulteurs emploient ce métal lourd pour protéger leurs vignes, les Saccharomyces cerevisiae ont appris à s’en protéger pour survivre dans un milieu qui leur serait sans cela hostile. Pour ce faire, toutes se sont mises à multiplier le gène CUP1 dans leur génome. Ce gène permet de synthétiser une protéine nommée CUP1, qui fixe le cuivre aidant les levures à survivre en contexte « pollué ». Mais pour produire cette protéine, les levures nécessitent également du H2S, qu’elles se sont donc mises à générer en plus grosse quantité.

Au-dessus de 10 copies, le niveau d’H2S synthétisé chute drastiquement

Les chercheurs ont passé au crible 51 souches dont quelques LSA. Une partie possède entre 2 et 10 copies du gène CUP1. « C’est la situation la plus fréquente », précise l’Inrae sur son site. Ce nombre de copies est le plus favorable à une production d’H2S. Au-delà de 10, et surtout au-dessus de 20, le niveau de H2S synthétisé chute drastiquement pour être quasi nul à plus de 20 copies « Ce phénomène s’explique par une demande excessive en acides aminés soufrés nécessaires pour la synthèse des protéines CUP1, limitant ainsi la présence dans le vin d’H2S utilisé par S. cerevisiae pour produire les acides aminés », décrypte l’Inrae. En revanche, on se retrouve avec une forte production de la protéine CUP1 qui est présente dans le cytoplasme des levures. « À ce jour, nous ne savons pas les conséquences de cette production élevée de la protéine (et donc d’acides aminés soufrés) sur le métabolisme global et le profil des autres composés volatils », précise Jean -Luc Legras, de l’Inrae.

Parallèlement à cela, les chercheurs ont confirmé l’impact du sulfitage sur la production d’H2S, le soufre ayant un rôle « amplificateur ».

Si vous êtes régulièrement confrontés à des arômes d’œuf pourri dans vos vins, et qui plus est une année à forte pression comme cette année, la diminution du sulfitage et un autre choix de levure peuvent donc vous aider à gérer la situation, même si les chercheurs précisent que « l’amplification de la CUP1 n’est probablement pas le seul mécanisme expliquant les variations de la production d’H2S, ce qui nécessite des recherches plus poussées ».

Ne pas oublier l’impact de la nutrition azotée

Les firmes œnologiques que nous avons contactées n’ont pour la plupart pas caractérisé leurs LSA sur ce paramètre. Mais Daniel Ganès, directeur scientifique de l’ICV, précise que des travaux conduits il y a une dizaine d’années sur le métabolisme du soufre chez Saccharomyces cerevisiae avaient déjà démontré l’effet de la combinaison de deux gènes (Met2 et Skp2) sur la production de SO2 et d’H2S par la levure. « Nos levures sélectionnées sur la base des résultats de la thèse de 2013 sont extrêmement faibles productrices de composés soufrés négatifs : oKay et Opale 2.0 », indique-t-il. Le catalogue de l’IOC dispose également de trois références sélectionnées en fonction de ces gènes : IOC Be Fruits, IOC Be Thiols et IOC Be Fresh.

Pour sa part, André Fuster, responsable technique France chez AEB, insiste sur l’impact de la nutrition azotée sur la production d’H2S. Tout comme Nicolas Prost, chez Novonesis : « la nutrition azotée est aussi un paramètre clef dans la production d’H2S, ainsi que le stress subi par les souches Saccharomyces cerevisiae inoculées dans un milieu très sucré au pH bas, rappelle-t-il. Dans ce sens, nous travaillons plutôt sur la préfermentation avec la sélection de souches de levures non-Saccharomyces pour ‘préparer le terrain’ ».

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