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Coordination rurale : Véronique Le Floc’h explique pourquoi, selon elle, la mobilisation agricole n’est pas terminée

Véronique Le Floc’h, président de la Coordination rurale, a accepté de nous recevoir près deux heures sur son exploitation laitière à Elliant dans le sud du Finistère, le 16 mai. Après Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, en février dernier, et Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, en avril, et Arnaud Gaillot, président des Jeunes agriculteurs quelques jours plus tôt, elle se prête au jeu des questions-réponses franches et explique pourquoi selon elle la mobilisation agricole n’est pas terminée.

Véronique Le Floc’h, présidente de la Coordination rurale, dans sa ferme à Elliant dans le Sud Finistère
Véronique Le Floc’h, présidente de la Coordination rurale, dans sa ferme à Elliant dans le Sud Finistère
© Nathalie Marchand

Comment concilier son mandat syndical et le métier d’agricultrice dans le Finistère ? Quel est son point de vue sur la mobilisation agricole et les réponses du gouvernement ? Quels liens entre la Coordination rurale et le Rassemblement national ? Comment le syndicat se projette pour les élections aux Chambres d’agriculture ? Véronique Le Floc’h présidente de la Coordination rurale répond sans détours aux questions de reussir.fr. 

Vous êtes élue depuis décembre 2022 à la présidence de la Coordination rurale, comment conciliez-vous votre métier d’agricultrice et votre fonction syndicale ?

Véronique Le Floc’h : Comme tout agriculteur qui gère sa ferme tout y est important, on prend donc sur la vie familiale. Parfois la famille ne supporte plus. 

Je n’ai pas une semaine type. Là je reviens d’une semaine de rencontres à la ferme avec de jeunes agriculteurs

Mon mari s’occupe de la ferme avec une apprentie et moi quand je suis là.

Pour la fête des mères je vais partir le dimanche soir direction Bordeaux, puis ce sera la Dordogne, le Tarn et Garonne puis l’Aveyron. Cela fait de grandes journées souvent je pars dès le dimanche ou alors à 4 heures du matin.

Lire aussi : Coordination rurale : « On n’a pas de programme politique, on n’a qu’un programme agricole », selon Véronique Le Floc’h

Vous avez été championne de France de cyclisme et membre de l’équipe de France pendant quatre ans, vous avez aussi beaucoup pratiqué le semi-marathon, avez-vous encore le temps de faire du sport ? 

On me dit que je cours tout le temps dans ma vie quotidienne, avec ou sans talon ! J’ai gardé l’esprit sportif c’est ce qui m’aide à tenir. 

Je n’ai jamais abandonné une course, même avec un bras cassé

Dans le sport quand on commence quelque chose on ne peut pas arrêter. Je n’ai jamais abandonné une course, même avec un bras cassé.  Mon credo : on ne lâche rien !

Lire aussi : Arnaud Rousseau répond aux critiques avant le Salon de l’agriculture

A Elliant dans le sud Finistère, en Gaec sur 180 hectares (surtout en prairies) avec votre époux vous élevez 100 vaches laitières (des Jersiaises) le lait étant vendu chez Sill, et 20 vaches limousines dont la viande est en vente directe, le tout en bio. Qu’est-ce que vous aimez le plus ? Le moins ? 

Par manque de temps on fait moins de vente directe depuis 2015, date à laquelle je suis passée secrétaire générale, mais cela a représenté jusqu’à la moitié du chiffre d’affaires du lait. On ne fait plus qu’une vente par vacances scolaires et j’y participe.

Je m’occupe de toute la gestion, des dossiers PAC et de la traite quand je suis là. J’ai délégué la comptabilité, mais même sur ce plan il y a pas mal de choses à faire, je contrôle tout. J’aimerais bien pouvoir faire des clôtures dehors, tranquille !

Quel est le bilan social de votre exploitation ?

Mon mari, une apprentie et moi. On passe par des ETA pour certains travaux. Et l’an dernier on a pris des travailleurs saisonniers deux fois trois mois. Mon mari ne veut plus entendre parler de salarié. 

Votre mandat dure combien de temps ?

Trois ans, renouvelable. Je voulais que le mandat présidentiel ne puisse être renouvelé qu’une fois, parce que c’est la logique de faire rentrer du sang neuf, et cette durée de six ans coïncide avec les élections chambres d’agriculture. L’occasion de faire un bilan avec une équipe plus ou moins renouvelée. Pour l’instant je n’ai pas réussi à le faire passer dans les statuts mais je ne désespère pas.

Vous vous êtes installée en 2007 après avoir travaillé au Canada dans le développement économique agricole puis pendant dix ans au Crédit Mutuel. Fille d’agriculteurs vous ne souhaitiez pas vous installer tout de suite ? Pourquoi ?

J’ai fait des études, ce n’était pas pour m’installer directement. La ferme familiale a été reprise par ma sœur. Si je n’étais pas allée dans l’agriculture, en m’installant en Gaec avec mon mari, j’aurais peut-être produit de la spiruline, j’aurais entrepris quelque chose. Le monde salarial c’est une expérience après on a l’esprit entrepreneur ou pas. Moi je l’ai à fond ! Heureusement que j’ai voyagé avant. Je pense que ceux qui ont vu autre chose que l’agriculture arrivent mieux à se battre pour revendiquer qu’ils méritent mieux… beaucoup mieux.

C’est trop fataliste de dire que l’agriculture est un métier passion

C’est trop fataliste de dire que l’agriculture est un métier passion. Il faut aussi penser à nos vieux jours, à nos enfants, si on ne prend pas notre part, les autres la prennent.

Lire aussi : Confidences d’Arnaud Gaillot au terme d’un mandat intense à la tête des Jeunes agriculteurs

Vous vous êtes directement installée en bio ?

Non, nous sommes passés en bio en 2016. Mon mari ne supportait plus certains produits de traitement, il est devenu allergique. Et puis on voulait quitter Sodiaal

Ca se passait mal ?

Oui et non, la coopérative n’était, selon nous, pas dans une philosophie qui correspond au modèle pour lequel elle doit intervenir. Une coopérative doit tout redistribuer. Dans Cash Investigation en 2018, j’avais déploré que le groupe n’ait versé à la coopérative que 3,5 millions d’euros sur 51 millions d’euros distribuables en 2015. Tous les bénéfices des activités d’une coopérative doivent revenir aux coopérateurs, c’est trop facile de faire des montages avec des holding. Damien Lacombe avait fait un droit de réponse, via Réussir, auquel j’avais également réagi.

Avec Sill ça se passe bien. Avec eux c’est chacun chez soi et les vaches sont bien gardées. On essaie de faire reconnaître la valeur de notre travail.

Quels sont vos projets sur la ferme ?

Nous sommes en fin de course. Plus question de poursuivre les investissements. Pourquoi on irait encore investir dans les bâtiments et pour qui ? On a trois enfants. On ne sait pas s’ils resteront ici mais on ne va pas tomber dans le piège de s’agrandir puis de ne plus pouvoir transmettre. C’est hors de question !

On ne va pas tomber dans le piège de s’agrandir puis de ne plus pouvoir transmettre

Aujourd’hui la ferme est facilement transmissible à nos enfants. Ce serait compliqué de transmettre à un tiers mais cela pourrait le faire. Nous sommes une ferme familiale (la 5 ou 6e génération) on aimerait que ça reste dans la famille sinon on n’aurait pas transmis le respect. Pour les parents c’est une fierté de transmettre des savoir-faire. 

Lire aussi : Depuis sa ferme en Ariège, Laurence Marandola défend un modèle agricole diversifié et dénonce le traitement de la crise agricole

La ferme est-elle rentable ? 

On vient de finir de payer nos bâtiments (des milliers d’euros par mois). A ce propos, je défends l’idée d’un suramortissement sur bâtiment. Quand on investit 1 million d’euros en élevage dans un bâtiment, en bout de carrière il vaut 10 à 20% de sa valeur. 

Si on mettait cet investissement dans des bureaux, cela vaudrait autant au bout de quinze ans. Je trouve que l’élevage justifierait un suramortissement pour compenser cette dévaluation en charge.

Nos bâtiments sont soumis à l’effet de l’azote, c’est de l’élevage ! Il faudrait que notre particularité soit prise en compte. C’est valable pour les poulaillers, les porcheries. 

Votre crédo c’est l’autonomie fourragère, vous avez été contrainte de vendre une partie du troupeau… 

Nous avons subi la sécheresse en 2022 et avons dû vendre 44 vaches. Nous en avons profité pour passer de Prim’Holstein et Brunes aux Jersiaises. On a racheté des petits veaux au fur et à mesure. Le manque de fourrage nous aurait fait perdre de l’argent pour produire au final moins de lait. On a fait le choix, plus rentable, de se séparer d’une partie du troupeau. 

On a fait le choix, plus rentable, de se séparer d’une partie du troupeau

Les petits veaux sont arrivés, on a choisi des Jersiaises qui sont plus économes et plus rustiques. Avec un lait plus riche, plus gras, meilleur prix du lait. On fait entre 500 et 550 000 litres de lait.

Quid de l’autonomie énergétique ?

On y avait pensé en 2009 avec le nouveau bâtiment. Le projet photovoltaïque avec une perte de rendement de 1% par an aurait commencé à dégager une certaine rentabilité à partir de 16 ans. Mais on va arriver à l’âge de la retraite on s’est dit que ce n’était pas le moment. Le projet pourrait être fait après. Et puis je suis très sensible aux problèmes électromagnétiques. On est déjà sur caillebotis au-dessus de l’eau…

En quoi pensez-vous que votre ferme est représentative de l’agriculture française ? Plus que celle de Laurence Marandola ou Arnaud Rousseau ?

Nous sommes une ferme familiale sans capitaux extérieurs avec une main d’œuvre familiale et indépendante. Nous sommes plus représentatifs dans la taille d’exploitation qu’Arnaud Rousseau et par rapport à Laurence Marandola nos fermes n’ont rien à voir, il faut aussi ce type de ferme.

Chacun a son modèle du moment que l’exploitation est viable et transmissible sans avoir recours à la finance

Je ne critique pas les exploitations, chacun a son modèle du moment que l’exploitation est viable et transmissible sans avoir recours à la finance sinon mieux vaut être salarié quelque part.

Comment avez-vous vécu les derniers mois de la mobilisation agricole ?

Lors de notre conférence du 17 janvier, on avait dit aux politiques : « réveillez-vous » et aux agriculteurs, « soulevez-vous ». Nous avons été entendus. C’était intense mais aussi rassembleur, cela a permis aux agriculteurs de se dire qu’ils n’étaient pas seuls, tout le monde ayant des problèmes. Bravo à tout le monde !

Voir tous nos articles sur la mobilisation agricole 

Quelles relations avec la coordination rurale 47 (Karine Duc), très en vue sur le plan médiatique ? Quelle répartition des tâches ? 

Pour moi c’était important de mettre en avant ceux qui ont mis la CR en lumière, comme Karine, José Perez ou Serge Bousquet-Cassagne, lors des annonces à Matignon ou avec le président de la République. C’est important aussi de préparer la relève comme avec Amélie Rebière, éleveuse de bovins, ou Edouard Legras, céréalier, pour qu’ils apprennent. C’est aussi valable pour Christian Convers et Sophie Lenaerts. 

On n’a pas fait de media training, on a parlé avec notre cœur. On l’a dit avec nos mots. Nous sommes soudés au sein du syndicat.

Cautionnez-vous les méthodes musclées qui ont été utilisées par certains des adhérents de la Coordination rurale ?

Cela m’était presque reproché par le ministre. Mais quand la rivière déborde on ne peut pas l’empêcher de déborder. C’est inconcevable ! J’ai eu des consignes d’en haut mais j’ai dit que je n’appellerai pas à cesser la mobilisation. Parce qu’on n’avait rien obtenu. J’ai travaillé à la banque, je connais la réalité dans le milieu agricole. Pour autant j’avais bien passé la consigne pour qu’il n’y ait pas d’atteinte aux biens et aux personnes. Le fumier ça ne dégrade pas, il n’y a pas eu de blessés. 

Quelle a été votre relation aux médias ? Laurence Marandola parle d’un rendez-vous manqué sous l’angle du traitement médiatique estimant que certains médias avaient surfé sur l’écume des choses, partagez-vous cette opinion ?

C’est un métier très technique, c’est compliqué de rentrer plus dans les détails. Dans les médias, on me disait que si j’étais trop technique on allait m’avertir. Car c’est quasi impossible de rentrer dans les détails par rapport à l’opinion publique. Il aurait fallu un retour en arrière pour expliquer la PAC de 92 par exemple. 

Les industriels sont toujours protégés c’est ce qui m’a le plus choqué

Les médias ont toutefois raté un message : celui qu’il fallait aller chercher les industriels pour leur demander d’augmenter les prix aux producteurs. On avait raison de se constituer un syndicat en 1992. Les industriels sont toujours protégés. C’est ce qui m’a le plus choqué. Certains distributeurs refusaient de venir débattre, peut-être aussi qu’ils avaient quelque chose à se reprocher. Mais ce ne sont pas les distributeurs qui achètent nos produits. Quand un salarié manifeste, il le fait devant son patron.

Pensez-vous que votre visibilité, à ce propos l’idée du bonnet jaune était très bonne sur le plan marketing, lors du mouvement de colère des agriculteurs va vous faire gagner des points au prochaines élections chambres ? 

C’était prévu pour le 13 décembre, on voulait faire une manifestation devant l’ASP à Limoges. On n’arrivait pas à se mettre d’accord sur le symbole, alors on a fait une réunion et on a décidé du 19 janvier. On savait déjà que les aides PAC ne seraient pas versées à temps. On en est réduit à être des mendiants comme si un salarié devait aller chercher un complément de salaire à Pôle Emploi. Moi je dis : « donnez des aides aux industriels pour qu’ils se débrouillent et se retrouvent avec les contrôles ». Ils n’ont pas le droit de franciser les produits or en février sur 1000 établissements contrôlés sur l’origine française des produits vendus en grande distribution, 372 étaient en non-conformité mais du côté des transformateurs où sont les contrôles ?

Et pour les élections Chambres ?

Si c’est l’inverse qui se produit, cela voudra dire que les gens se sont mobilisés sans vouloir que ça change. Ce serait le paradoxe. En tous cas, on veut que ça change. 

Vous sentez du changement sur le terrain ?

Oui. Je suis sur le terrain depuis mi-avril et on le sent. Et en attendant le message c’est l’esprit d’équipe comme dans le vélo. 

En une semaine, au salon de l’agriculture, on a récupéré 1600 adhérents

Tout le monde a envie de gagner et ça attire de nouveaux adhérents. Comme au vélo quand des coureurs gagnent d’autres rejoignent l’équipe l’année suivante. En une semaine, au salon de l’agriculture, on a récupéré 1600 adhérents. 

On dit votre syndicat proche du RN, les slogans « on est chez nous » lors du dernier salon de l’agriculture le laissaient croire, on a aussi vu déjeuner avec Jordan Bardella pendant le salon de l’agriculture. Cela vous agace, il me semble, que répondez-vous à cela ?

Je suis vaccinée sur le sujet. Les statuts de la Coordination rurale sont clairs si quelqu’un s’engage dans un parti il ne peut pas garder un poste de président. 

Les statuts de la Coordination rurale sont clairs si quelqu’un s’engage dans un parti il ne peut pas garder un poste de président

Trouvez-moi un seul président membre d’un parti ! A la fédération centrale certains me disent que parmi nos adhérents nous avons des proches de LR, de Renaissance, et même de LFI. Si c’était ça le sujet, on s’éloignerait de notre vrai combat.

Donnez-vous des consignes de vote pour les Européennes ?

On ne donne pas de consignes, chacun est libre. Au sein de l’EMB on appelle à manifester le 27 mai à Bruxelles puis le 4 juin pour montrer que cette politique qui tue l’agriculture n’est plus tenable.  Aucun journaliste ne pourra nous reprocher de nous être lié à quiconque. On demande une politique agricole équitable qui intervienne davantage sur la question des risques. Aujourd’hui l’enveloppe de 430 millions d’euros ne peut plus couvrir tous les risques (climatiques, sanitaires, géopolitiques…). On pense qu’il faut tout faire pour ne pas perdre d’agriculteurs et que l’environnement n’a pas sa place dans la PAC. 

Il faut tout faire pour ne pas perdre d’agriculteurs et l’environnement n’a pas sa place dans la PAC

Tous les agriculteurs s’occupent de l’environnement au quotidien. Si les industriels veulent inclure dans les cahiers des charges des critères environnementaux qu’ils les incluent et les rémunèrent car ce sont eux qui en profitent. Quand on travaille pour la qualité d’un produit c’est celui qui en tire les bénéfices qui doit le payer. 

Du lait de foin ça se paye, les industriels peuvent le valoriser !

Vous avez dit après la rencontre avec Macron que le mouvement allait continuer, comment ? 

Hier, en Dordogne le syndicat bâchait des radars. Dans les Ardennes, il y a une opération de bâchage des radars tous les mardis soir. Les départements du Gers, des Pyrénées-Atlantiques, des hautes Pyrénées et des Landes prévoient des actions dans le Sud-Ouest sur la hausse de la taxation de l’eau pour l’irrigation. J’ai relancé ce matin le cabinet de Bruno Le Maire sur notre demande de GNR à 1 euro : qu’il se débrouille avec ou sans Total qui a les moyens avec les certificats d’énergie renouvelable ! Combien de milliards passent là-dedans alors que l’agriculture stocke du carbone ! 

Sans bouclier énergétique on n’a pas d’avenir

Sans bouclier énergétique on n’a pas d’avenir. Une éleveuse me disait l’autre jour qu’elle n’utilisait plus qu’une cave sur trois pour ses fromages, avec une facture d’électricité doublée depuis la guerre en Ukraine. 

Vous prévoyez de perturber les Jeux olympiques ?

Cela fait partie des idées qui sont dans la boucle, autour du passage de la flamme notamment. En parallèle il y a d’autres idées. 

Est-ce que vous ne risquez pas de perdre l’opinion publique ?

On veut bien des menaces d’autres corps de métier comme la SNCF, on leur donne donc raison. A eux on lâche des primes ! 

Qu’est-ce que vous demandez au gouvernement en plus de 67 mesures déjà annoncées ?

On parle de 67 mesures mais en fait c’est moins si on synthétise et regroupe. On demande à toutes les réunions intersyndicales de sauver 100% des exploitations agricoles. Pour celles qui ont des problèmes de trésorerie on demande l’équivalent d’un PGE accessible à tous, de rayer une partie des dettes. On demande de déplafonner les minimis, ou encore d’exonérer la taxe foncière non bâtie. Aujourd’hui le foncier est taxé à l’équivalent de 62% (jusqu’à 45% pour la TFNB + 17% de CSG). 

On demande le GNR à 1 euro depuis mars 2023

On demande le GNR à 1 euro depuis mars 2023. On milite aussi pour des contrôles dans l’industrie, pour nous le problème de francisation et de délocalisation des résultats pour certains groupes multinationaux est évident, on le disait avant le résultat des contrôles. 

Votre opinion sur l’évolution du plan Ecophyto, décrié par les associations écologistes ?

Le changement d’indicateur va dans le bon sens : pourquoi faire plus que les autres pays ? Mais nous n’avons pas obtenu toutes les réponses sur la question des exploitations dans les zones Natura 2000 et les captages d’eau. On est très inquiets de voir la préemption du foncier dans ces zones, ce n’est plus possible !

Vous avez signé une lettre commune avec la Confédération paysanne sur le revenu, une union sacrée contre la FNSEA, vos positions sont pourtant assez éloignées ?

Oui mais sur un sujet comme ça on peut parler d’une seule voix. Si les prix planchers ce sont les coûts de production avec une rémunération correcte alors on dit chiche ! A la base c’était une demande portée par le Modef. J’ai été approchée par Raymond Girardi, j’en ai parlé au bureau et j’ai dit oui. Cela me sera reproché par certains au nom de nos désaccords sur l’eau. Mais l’intelligence de n’importe quel syndicat repose sur le fait de ne pas repousser des idées quand elles sont bonnes au nom d’une identité. Sur ce sujet-là il faut aller de l’avant.

N'importe qui peut se relever

L’objectif de notre syndicat n’est pas de faire un plan social. Quand le président des JA est intervenu pour dire qu’il fallait aider quelques-uns à arrêter ce n’est pas entendable. N’importe qui peut se relever !

Lire aussi : Prix agricoles rémunérateurs : la Coordination rurale, la Confédération paysanne et le Modef écrivent ensemble à Emmanuel Macron

Les mesures de trésorerie que vous demandez sont des mesures d’urgence, à plus long terme quelles mesures souhaitez-vous pour « un juste revenu » et « un prix de vente économiquement viable » ?

On demande le retour de la rémunération par les industriels aux agriculteurs ; avec plus de contrôles par rapport à Egalim mais pas seulement. On demande l’indexation des coûts de production sur l’inflation. Pourquoi on est le seul secteur à ne pas suivre l’inflation ? J’étais en train de regarder les cours de céréales depuis 1800. Avec une tonne de céréales en 1960 on payait 158 heures au Smic. Aujourd’hui on n’en paye plus que 10, il y’a un souci ! 

Pourquoi selon vous la LOA entérine « un plan de liquidation de l’agriculture » et non le soutien au renouvellement des générations comme le pensent Jeunes agriculteurs et la FNSEA ?

Dans l’introduction de la loi il est question d’un tiers des agriculteurs devant partir à la retraite et non pas de 50%. Le mot revenu n’est pas employé une seule fois, le diagnostic modulaire on n’en veut pas. Selon le recensement 2020, 20% des agriculteurs pensent que leur exploitation va être reprise par leurs enfants après eux, 6% par des non issus du milieu agricole (Nima) et 6% qu’elle ira à l’agrandissement, il reste deux tiers des agriculteurs qui ne savent pas ce que leur exploitation va devenir. 

Sur 10 agriculteurs qui vont partir en retraite seuls 2 enfants vont s’installer et on veut en plus leur mettre le boulet d’un diagnostic au pied

Sur 10 agriculteurs qui vont partir en retraite seuls 2 enfants vont s’installer et on veut en plus leur mettre le boulet d’un diagnostic au pied ! C’est même plus la peine d’essayer de remplacer ces départs. Déjà en société ce n’est pas facile d’installer des jeunes, les associés qui resteront devront supporter des charges supplémentaires, c’est se tirer une balle dans le pied. Rien ne va dans cette loi à part la simplification pour les bâtiments d’élevage ou le stockage de l’eau ; on revient à des délais légaux. 

Qu’attendez-vous de la prise de parole d’Emmanuel Macron après l’été ?

Lors de la réunion de travail il n’a parlé que de produire plus et de faire plus d’export affirmant que 40% de la rémunération des agriculteurs serait réalisée grâce à l’export. Ce n’est pas parce qu’une entreprise réalise 40% de chiffre d’affaires à l’export qu’elle en retire 40% de son bénéfice. C’est encore moins vrai pour les fournisseurs de ces entreprises. Pour beaucoup d’exploitations en viande les primes PAC représentent plus de 100% du résultat ! Lors de la réunion j’ai parlé de mon côté de la balance commerciale. Les importations augmentent plus vite que l’exportation mais ce n’est pas en pédalant plus vite à l’export que l’on va s’en sortir !

Lire aussi : Que faut-il retenir de la rencontre entre Emmanuel Macron et la profession agricole ?

Quelles mesures demandez-vous pour le bio en crise ?

Pour respecter Egalim on devrait avoir 20% du marché de la restauration en produits bio, cela ne représentait en 2019 que 389 millions d’euros contre 20 milliards estimés, on est loin du compte. Cela peut progresser si on donne les moyens à ceux qui passent les commandes. Et il ne faut pas regarder la différence de prix au kilo car on a aussi un effet qualité, la viande bio réduit moins à la cuisson par exemple. On demande de la transparence sur les achats bio français en collectivités. Avant l’Agence Bio le donnait pour chaque filière. Je ne les ai pas vus dans les récentes publications.

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