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Bien-être animal : Vers un durcissement des règles de transport des porcs?

L’autorité européenne de sécurité des aliments préconise un durcissement des conditions de transports des porcs. Les négociations sur la refonte européenne des règles sur le transport communiquée cet été s’annoncent torrides.

Attention : mention "archives" obligatoire. Transport des porcs / Porcins en bétaillère / Déchargement des porcs pour l'abattoir / animaux dans un camion
© Réussir (archives)

Cinq points majeurs pouvant affecter le bien-être des porcs sont mis en avant dans un rapport de l’autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa)(1) sorti en septembre 2022. Ce rapport scientifique commandité par la Commission européenne sera repris pour la remise à plat en 2023 de la législation transport actuelle datant de 2005. Les conséquences pourraient être assez lourdes en termes organisationnels et économiques pour la filière porcine : restrictions de sortie des porcs des élevages en période de températures élevées, livraison régulière des abattoirs perturbée, filières aval pouvant être affectée par des ruptures de livraison selon les périodes climatiques extrêmes.

1-Baisse de la température de transport des porcs

L’Efsa réévalue à la baisse les températures limites pour transporter les porcs. Si la législation devait suivre ces recommandations, cela ne sera pas sans conséquences par rapport à la situation actuelle de réchauffement climatique. L’Ifip réévalue actuellement les conséquences de l’application de ces recommandations. L’arrêt du transport en période caniculaire ou sur les plages horaires les plus chaudes de la journée pourrait engendrer des préjudices importants pour la filière : retard d’enlèvement en élevage, ramassage des porcs de nuit aux heures les plus fraîches, moins de rotations de camions, augmentation des places de stockage en abattoir, voire abattage de nuit comme en Asie… Cette proposition sous-estime les capacités d’adaptation des porcs et ne tient pas compte des efforts accomplis par les transporteurs en matière d’équipement (chargement rapide, aération, ventilation, brumisation, isolation des toits, arrêts limités des camions en périodes caniculaires…).

2-La surface par porc augmentée de 33 %

Pour un meilleur bien-être des animaux durant leur transport, les scientifiques de l’Efsa préconisent une surface dans les camions de 0,62 m² par porc de 110 kg contre 0,46 m² aujourd’hui. L’augmentation est conséquente (+ 33 %). Les transporteurs ne peuvent en l’état pas s’adapter à une telle évolution. Les coûts de transport augmenteraient considérablement et le bilan carbone du secteur se détériorerait. L’Efsa préconise aussi que le porc puisse se coucher. Une hauteur adéquate des étages doit être fixée (aujourd’hui elle n’est pas légiférée, mais elle doit permettre une circulation d’air suffisante).

3-Une durée maximum du transport limitée

La durée du voyage va être un sujet très sensible, d’autant plus que les durées de transport tendent à augmenter à mesure que les abattoirs se concentrent en France et en Europe. Le transport vers l’abattoir pourrait être limité à une durée qui va certainement faire débat en Europe : 8 heures ? 24 heures ? arrêts de 24 heures dans des postes de contrôles au-delà de 24 heures de transport ? La législation actuelle n’impose pas de limite. Elle est identique pour les porcelets, les futurs reproducteurs et pour les animaux destinés à l’abattoir. La France pourrait être fortement affectée par une restriction de durée, en particulier pour les abattoirs en zones de faible densité porcine, tout comme pour les ventes à l’export à plus de 8 heures de temps de transport. Le secteur de la génétique serait également touché sur son marché principal interne de livraison de reproducteurs et sur les marchés exports à hautes valeurs sanitaires et économiques.

4-Une durée de mise à jeun en baisse

Pour garantir l’absence de faim et de soif des porcs, le rapport de l’Efsa préconise d’abaisser la durée de mise à jeun à 12 heures. La mise en place d’une telle mesure risque d’aller à l’encontre du bien-être animal dans beaucoup de situations. Elle risque aussi d’entraîner des surmortalités en transport ou à l’arrivée à l’abattoir. Le risque de contamination des carcasses en abattoir par perforation des intestins risque d’augmenter (risque salmonelle). La qualité de la viande (pH) et les rendements de fabrication des salaisonniers (fréquence des viandes destructurées) sont très liés à des mises à jeun de trop courte durée. Une telle mesure risque de balayer tous les efforts des éleveurs pour fournir des porcs correctement ajeunés. Elle irait à l’encontre de l’ensemble des cahiers des charges et des signes qualitatifs français.

5-Transportabilité des truies de réforme

Le rapport de l’Efsa préconise des règles de transportabilité des coches de réforme mieux définis. Le France dispose actuellement d’un guide de transportabilité des porcs qui a été repris en Europe. 30 à 40 % des truies en France sont transportées sur des distances longues ou à l’export. L’impact d’un durcissement des règles sur l’état des animaux de réforme risque d’impacter le maillon élevage ainsi que le transport avec une réorganisation de l’abattage à proximité. De nouvelles solutions et investissements seraient alors à prévoir rapidement au stade abattage.

(1) L’autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) fournit des avis scientifiques indépendants sur les risques liés à l’alimentation.

Patrick Chevillon, Ifip-Institut du porc

Patrick Chevillon, Ifip-Institut du porc
Patrick Chevillon, Ifip-Institut du porc © D. Poilvet

« Un enjeu important pour la filière »

La mise à plat du règlement bien être transport sera un dossier pour la filière important à suivre à partir de cet été 2023, tant les conséquences peuvent entraîner des réorganisations lourdes et des coûts supplémentaires pour chaque maillon de la filière. Beaucoup d’efforts ont été réalisés par la filière française pour assurer le bien-être animal en cours de transport aux stades de l’élevage, du transport et de l’abattage depuis 2005. De telles propositions risquent de dégrader certains critères de bien être (densité trop faible, mortalité, mise à jeun trop courte), économiques par des surcoûts injustifiés, qualitatifs sur les produits finis et environnementaux s’il est nécessaire de disposer de plus de camions pour un même nombre de porcs transportés.

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