Les multiples et essentielles facettes de l’aide ovine
À l’heure de la refonte de la future PAC, les éleveurs ovins se mobilisent pour défendre l’aide couplée sur leurs animaux.
À l’heure de la refonte de la future PAC, les éleveurs ovins se mobilisent pour défendre l’aide couplée sur leurs animaux.
Les travaux pour former la future PAC battent leur plein et toutes les productions agricoles tentent de faire valoir leurs droits et leurs intérêts. Les primes PAC et les aides publiques représentent, pour les éleveurs ovins, en moyenne 65 % de leurs revenus. Le maintien de ces aides est donc primordial pour assurer la pérennité de la production française. Mais pas seulement, car comme le pointe Brigitte Singla, en charge du dossier PAC à la Fédération nationale ovine (FNO), « l’objectif initial était bien de développer la production de lait et de viande et de structurer la filière ». En soutenant les éleveurs, l’aide ovine dépasse son objectif initial purement agricole. En effet, en pérennisant les ateliers ovins sur le territoire, les retombées positives sont nombreuses. La filière ovine est très ancrée dans les régions et est créatrice d’emplois. D’autre part, les systèmes pastoraux et herbagers fournissent gratuitement des services environnementaux par la fertilisation naturelle des sols et la lutte contre l’embroussaillement en forêt (limitant ainsi les risques d’incendie et d’avalanche).
Dix ans d’aide ovine
Mise en place en 2010, l’aide ovine est donc une aide couplée au nombre de brebis détenues (à partir de 50, seuil qui définit un élevage professionnel) et conditionnée à un niveau de productivité minimum, à savoir au moins 0,5 agneau par brebis par an. « Nous travaillons activement au sein de la profession pour mettre sur pied le projet qui s’intégrera dans la future PAC, reprend Brigitte Singla, par ailleurs éleveuse de brebis laitières dans l’Hérault. Une fois le projet validé par le conseil d’administration, nous le présenterons aux instances gouvernementales. » Car si au niveau européen les aides couplées devraient être reconduites dans la prochaine PAC, elles restent des mesures volontaires mises en place ou non par chaque État membre. Le ministère de l’Agriculture français pointe pour certaines filières un manque d’efficacité pour leur structuration mais Brigitte Singla n’est pas de cet avis : « Avec plus de 60 % des producteurs français en OP - organisation de producteurs - ou OPNC - organisation de producteurs non commerciale -, nous pouvons affirmer que l’aide ovine a participé à cette montée en puissance des organisations de producteurs. »
Un socle et des options
Car c’est là toute la force de l’aide ovine. En plus d’un socle basé sur les simples notions de productivité et nombre de brebis présentes sur l’exploitation, elle se compose d’une multitude de « tiroirs » optionnels qui amènent des primes de majoration. Si l’éleveur se lance dans une démarche de contractualisation, s’il se tourne vers la labellisation et les signes de qualité, s’il augmente significativement sa productivité, il sera récompensé via l’aide ovine. À l’heure actuelle, la FNO travaille sur ces fameux « tiroirs », pour les remettre à jour et en proposer de nouveaux leviers qui puissent être intéressants de valoriser, toujours en lien avec une augmentation de productivité et une montée en gamme. Le syndicat ovin national insiste par ailleurs sur le fait avéré que cette aide n’interfère pas sur le prix payé à l’éleveur pour ses agneaux. « Les moyens mis à disposition par la PAC doivent continuer d’être perçu par l’éleveur. En effet, dans le cas de la filière ovine, c’est aux éleveurs que l’aide couplée a bénéficié en premier lieu. Malgré des coûts de production plus élevés que la viande d’importation, la mise en place de l’aide ovine a conduit à une progression des prix payés aux éleveurs et à l’installation de nouveaux producteurs », développe la FNO dans un argumentaire adressé aux parlementaires.
Maintenir ou augmenter l'enveloppe
« Notre demande est bien entendu avant tout que l’enveloppe, qui est aujourd'hui de 113 millions d'euros, puisse être augmentée à 125 millions d’euros et que celle-ci soit sacralisée pour sécuriser le revenu des éleveurs et rassurer les porteurs de projet en production ovine », rappelle Brigitte Singla. Parmi les positions fortes de syndicat ovin, on retrouve le principe de rétropolation. « Notre souhait est de ne laisser aucun éleveur sur le bord du chemin, assure l’éleveuse syndicaliste. Pour ce faire, nous demandons que les nouvelles règles d’éligibilité à l’aide soient appliquées aux élevages qui n’étaient pas éligibles avant. » Ce principe a surtout pour but de gommer les inégalités territoriales et de systèmes au niveau français. Il est assorti d’une nouvelle proposition des responsables professionnels. « Nous tenons à ce que les agnelles de renouvellement et les ventes de reproducteurs soient dorénavant prises en compte dans la productivité d’une brebis », martèle Brigitte Singla.
Reconquérir la souveraineté alimentaire
Les demandes du syndicat sont dans la continuité du plan de filière fixé lors des États généraux de l’alimentation. « Nous visons avant toute chose une montée une gamme de nos productions lait et viande, un gain de productivité et une incitation au progrès technique », rappelle Brigitte Singla. À savoir qu’aujourd’hui 40 % du lait et près de 20 % de la viande ovine sont sous signes de qualité officiels. L’aide ovine constitue un levier majeur pour la reconquête de souveraineté alimentaire française. « La crise de la Covid a montré à quel point la production alimentaire nationale était importante et les éleveurs ovins ont su mettre en avant leurs produits », rappelle la responsable professionnelle. Néanmoins, la production d’agneaux ne couvre que 40 % de la demande des consommateurs, signe que les éleveurs français ont encore de la marge pour augmenter leur productivité.
On en parlait dans Pâtre il y a 10 ans
L’aide ovine a fait la une de nos pages il y a exactement dix ans. La FNO espérait alors que sa mise en place favoriserait la structuration de la filière, s’appuyant largement sur le tout récent (à l’époque) plan de contractualisation d’Interbev Ovin. Les éleveurs qui se tournaient vers la contractualisation touchaient alors une majoration de trois euros par brebis.