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RSE
Fruits et légumes sans pesticides : une troisième voie en essor

Entre le bio et le conventionnel, une troisième voie se dessine pour les fruits et légumes avec le « sans pesticides ». D’un côté, un intérêt croissant de la grande distribution, de l’autre, des critiques d’ONG envers des étiquetages « trompeurs ». Explications. Ce sujet a été proposé par Michel Biero, directeur exécutif achats et marketing de Lidl de France, rédacteur en chef invité des Marchés Hebdo.

Au début du mois de novembre, le distributeur Casino s’est allié avec le collectif de producteurs français de fruits et légumes Nouveaux Champs pour développer une gamme de fruits et légumes frais « zéro résidu de pesticides ». « Ce partenariat nous permet de nous appuyer sur le savoir-faire d’agriculteurs engagés déjà depuis plusieurs années dans cette démarche RSE », indique Tina Schuler, directrice générale des Casino supermarchés, Géant et Proximité. Le distributeur étend ainsi son offre sans pesticides lancée en 2016 avec des fruits et légumes surgelés, pour compter aujourd’hui une quarantaine de références.

Casino n’est toutefois pas la seule enseigne associée au collectif Nouveaux Champs. « Toutes les enseignes distribuent nos fruits et légumes sans pesticides, avec des engagements plus ou moins forts. Auchan, Intermarché, Carrefour, E.Leclerc, etc. L’originalité de l’offre résidera dans la manière de communiquer des enseignes », témoigne Gilles Bertrandias, président du collectif et directeur général de la SAS spécialiste de la tomate Rougeline.

Notre nombre de références est bien au-delà de nos espérances

Fédérant aujourd’hui 44 entreprises et plus de 3 000 producteurs de fruits et légumes (soit plus de 10 % de la production française), Nouveaux Champs possède à son actif 34 espèces de fruits et légumes labellisés, et espère dépasser la barre des 40 d’ici à la fin de l’année. « C’est un bon indicateur, qui met en avant des choses encourageantes. Il est difficile de tirer tous les enseignements et de faire des bilans financiers, car on n’a pas assez de recul, mais notre nombre de références est bien au-delà de nos espérances », complète Gilles Bertrandias. Nouveaux Champs souhaite maintenant s'adresser à la restauration hors domicile.

Demain la terre s’étend aux fruits et légumes transformés

Nouveaux Champs n’est pas la seule association engageant les fruits et légumes vers la RSE. Demain la terre, créé en 2004, a étendu son référentiel, comme annoncé au dernier Salon de l’agriculture, pour les fruits et légumes issus d’une première transformation. Fruits rouges & Co, qui a fait office de pilote pour valider ce référentiel en évaluant les performances environnementales, sociétales et économiques des producteurs, a vu ses premiers fruits et légumes transformés arrivés sur le marché fin octobre 2018.

Aujourd’hui, neuf producteurs sur les onze du collectif Demain la terre sont engagés avec le distributeur Lidl. La marque Fruits rouges & Co propose ainsi dans les rayons de l’enseigne des purées de fruits ambiantes ou surgelées de groseilles rouges, cassis ou fraises. D’autres produits transformés sont en cours de certification, tels la betterave rouge, le jus de pomme et le nectar de poire. À noter que 100 % des pommes et poires françaises vendues chez Lidl sont certifiées Vergers écoresponsables, assure l’enseigne dans son rapport RSE.

Autre initiative : les coopératives Savéol, Prince de Bretagne et Solarenn se sont, elles aussi, inscrites dans une démarche RSE avec la création fin février 2018 de leur marque de tomates « sans pesticides et 100 % nature ». Les trois organisations de producteurs bretonnes totalisent 200 000 tonnes de tomates et souhaitent, à terme, que leur nouvelle marque en porte 30 à 40 %. Une annonce qui a été comparée avec le label Zéro résidu de pesticides de Nouveaux Champs.

Nous sommes dans une logique de résultats

« Nous ne voulons pas créer la confusion chez le consommateur. La prochaine étape pour Nouveaux Champs est de ne pas mettre du tout de produits chimiques ! » a épinglé Pierre-Yves Jestin, président de Savéol. La coopérative n’est pas le seul acteur de l’agroalimentaire à critiquer le label de Nouveaux Champs, pour lequel des ONG se montrent méfiantes. « Le problème est qu’un produit alimentaire ne présentant pas de traces de pesticides ne garantit pas une réelle baisse de l’usage de pesticides par les agriculteurs. Leur étiquetage est trompeur, et ils ne s’engagent pas vers une réelle transition agroécologique », pointe du doigt Ingrid Aymes, chargée de projets à Greenpeace France.

Des propos qui n’ont pas manqué de faire réagir Gilles Bertrandias : « Je trouve ces réactions paradoxales. Avec notre label Zéro résidu de pesticides, nous sommes dans une logique de résultats. Les sceptiques disent qu’il faut maintenant rassurer sur les moyens…, mais il n’y a pas de résultats sans moyens. Si nos produits ne présentent pas de résidus quantifiables, c’est que nous avons trouvé les bons leviers ».

Pour assurer l’absence de résidus de pesticides, le collectif fait appel à un laboratoire indépendant qui s’assure que les produits présentent des taux de résidus inférieurs à la plus petite valeur quantifiable (0,01 mg/kg).

Un manque de soutien financier des GMS ?

De son côté, Greenpeace dénonce un manque de soutien de la grande distribution à cette démarche RSE de réduction des pesticides auprès des producteurs. L’ONG met en avant que ce changement de pratiques agricoles nécessite des efforts financiers et une prise de risque « qui ne doivent pas être assumés uniquement par les agriculteurs, mais aussi par les distributeurs. La grande distribution continue d’exercer une pression constante sur ses fournisseurs, et ne leur propose aucun contrat assez sécurisant. Leur soutien auprès des producteurs reste aujourd’hui un pur exercice de communication », selon Ingrid Aymes.

L'avis de Michel Biero

« En tant que distributeur, nous avons la responsabilité de choisir les meilleurs critères pour proposer des produits responsables, tant sur la provenance des matières premières et les modes de production que sur la conception. Une fois ces critères définis, nous devons nous assurer que la chaîne d’approvisionnement soit adaptée et accompagner nos fournisseurs à l’amélioration continue des pratiques. Chez Lidl, nous avons mis en place des groupes de travail avec nos partenaires commerciaux et producteurs partenaires pour s’assurer de bonnes pratiques respectueuses de la planète (en sélectionnant des pommes et poires certifiées Vergers écoresponsables, des partenaires agriculteurs membres de l’association Demain la terre). En plus des codes de bonnes conduites définis par l’enseigne, Lidl participe à la création de Valorise depuis 2017. Cette plateforme l’autoévaluation de nos partenaires commerciaux permet l’identification et la valorisation des initiatives les plus exemplaires en matière de durabilité et d’accompagnement de nos fournisseurs pour l’amélioration continue des pratiques de production.  »

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