Les meilleures pratiques d’élevage de porcs mâles entiers décryptées
La commission européenne veut accompagner l’arrêt de la castration chirurgicale en finançant un guide des meilleures pratiques de production de mâles entiers, détaillées en six thématiques par l'Ifip.
La commission européenne veut accompagner l’arrêt de la castration chirurgicale en finançant un guide des meilleures pratiques de production de mâles entiers, détaillées en six thématiques par l'Ifip.
Le guide financé par la Commission européenne (1) rassemble les expériences de terrain au stade de l’élevage pour limiter la fréquence des mâles odorants ou pour réussir à 100 % l’immuno-vaccination des mâles. Les meilleures pratiques sont regroupées autour de six thématiques.
1 Gérer le comportement des mâles entiers
Les éleveurs rapportent une augmentation des agressions physiques et sexuelles entre les animaux lors du passage à une production de mâles entiers. Aussi, il faut réduire ces comportements déviants au minimum pour améliorer le bien-être et limiter le niveau de stress. Les changements brutaux de conduite sont à éviter. Une stratégie d’alimentation routinière doit être envisagée. La régulation climatique et des conditions d’élevage particulières peuvent aider à réduire le stress des mâles entiers.
2 Des sols et un bâtiment adapté
Il est impératif de maintenir les porcs propres et secs. Si de la paille est utilisée, elle doit être réapprovisionnée régulièrement. Le sexage est conseillé pour limiter le niveau d’hormones, et les agressions physiques et sexuelles. Cependant, les études réalisées sur ce sujet ne sont pas tranchées, et la pratique n’est pas généralisée. Le sexage présente d’autres avantages, comme une gestion alimentaire plus aisée et la distribution d’un aliment mieux adapté pour les mâles, mais plus cher (il faut aussi doubler le nombre de silos). Cela limite aussi la pénibilité du tri par la suite, en particulier lors du départ si l’abattoir souhaite abattre séparément les animaux de sexe différent. Garder les animaux dans la même case du sevrage à l’abattage est conseillé (Wean to finish). Cette technique, séduisante sur le papier, entraîne cependant des surcoûts et une gestion par petites cases. Il faut également garantir suffisamment de place pour les porcs. Les normes officielles sont suffisantes (0,65 m² minimum entre 85 et 110 kg puis 1 m² au-delà de 110 kg). Réduire le nombre de porcs par case à moins de 30 limite le stress, la compétition alimentaire et améliore le bien-être. Les murs de séparation à claire-voie entre les cases favorisent les contacts avec les porcs des cases adjacentes et peuvent aider à réduire les comportements agressifs. Il faut aussi adapter la lumière en suivant un rythme de jour et nuit. Éviter les lumières trop fortes. La fourniture d’enrichissements permet de garder les porcs calmes et occupés. Les matériaux manipulables doivent être destructibles, comestibles et encourager le fouissage (paille, bois, branchages, râtelier, luzerne, corde de chanvre…).
3 Réduire la compétition à l’auge
Idéalement, les porcs entiers doivent être alimentés sans restriction alimentaire. Une auge longue est préférable (17 cm par porcelet et 22 cm par porc à l’engrais). L’alimentation liquide ou humide (soupe) est recommandée, car tous les porcs s’alimentent en même temps. Il faut cependant qu’ils aient accès à de l’eau fraîche en dehors des repas. Les cases doivent être assez grandes pour ajouter des systèmes d’alimentation additionnels si besoin. L’ajout de ces systèmes ne doit pas modifier le fonctionnement de la ventilation et des circuits d’air.
4 Bien choisir sa génétique
En premier lieu il faut choisir une génétique adaptée peu mature sexuellement et à faible risque d’odeur (l’androsténone, l’un des composés odorants, est produit par les testicules matures). Certains types génétiques comme la race Piétrain sont moins odorants. À l’intérieur d’une même génétique certaines sociétés sélectionnent des verrats à faibles odeurs et commercialisent la semence de ces verrats : verrat Piétrain Ino chez Nucléus, Piétrain Nador de Topigs, verrats "low taint line" de GFS en Allemagne, et de Pic en Belgique.
5 Des aliments adaptés
L’inuline extraite de la racine de chicorée réduit le risque d’odeur de scatol. Cette matière première peut être incorporée entre 7 à 15 % dans l’aliment, durant les deux à trois semaines avant le départ. Une réduction du traitement entre trois et quatre jours avant le départ semble suffisante. L’inuline se retrouve également dans des produits à base d’artichaut de Jérusalem. Le coût de cette molécule est estimé de 2 euros le kilo. Elle pourrait être avantageusement remplacée par la pulpe de betterave. L’ajustement des acides aminés et l’augmentation du taux de lysine permettent d’exprimer le potentiel de croissance des animaux entiers. Cela réduit aussi le risque d’odeur en diminuant l’âge à l’abattage. Réduire le taux de protéine quatre jours avant l’abattage semble aussi avoir un intérêt. Des aliments riches en céréales (blé, orge) permettent de limiter la production de scatol en modifiant la flore bactérienne dans le colon. Certaines formules commerciales disponibles sur le marché ont été validées scientifiquement (Taintstop en Belgique et Vitelia aux Pays-Bas). La solution Taintstop coûte 100 euros supplémentaires de la tonne et doit être distribuée 15 jours avant le départ.
6 Abattre à un plus jeune âge
Afin de limiter le risque d’odeur d’androsténone en lien avec la maturité sexuelle, certaines filières espagnoles ou britanniques choisissent d’abattre les porcs plus jeunes sans cahier des charges strict. Cependant en appliquant les bonnes pratiques, l’augmentation du poids et de l’âge à l’abattage n’aggrave pas le risque. Dans ces conditions strictes, certains opérateurs européens constatent même une diminution du risque, malgré un abattage vers 95 kilos de carcasse, contre 90-92 kilos au préalable. Il est donc prudent de travailler en lien avec son abattoir partenaire pour choisir le meilleur âge d’abattage.
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