Simplification de la vie des agriculteurs : un an après la mobilisation qu’est-ce qui a changé ?
FNSEA et Jeunes agriculteurs ressortent dans la rue contre les lourdeurs administratives. Il s’agissait déjà d’une des raisons de la colère agricole fin 2023. En un an quelles mesures de simplification ont été prises et s’opèrent déjà dans les exploitations agricoles ?
FNSEA et Jeunes agriculteurs ressortent dans la rue contre les lourdeurs administratives. Il s’agissait déjà d’une des raisons de la colère agricole fin 2023. En un an quelles mesures de simplification ont été prises et s’opèrent déjà dans les exploitations agricoles ?
« Il faut simplifier la vie des agriculteurs qui n’en peuvent plus des papiers », tel est le message avancé par Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, ce mardi 26 novembre dans les 4 Vérités sur France 2, pour expliquer le « deuxième round » de manifestations agricoles qui s’engage en France pour trois jours.
Dans le viseur des agriculteurs mobilisés par la FNSEA et les Jeunes agriculteurs : les administrations (préfectures, Centres des finances publiques), et les agences (MSA, Agences de l’eau). Les slogans : « entendez-nous dans nos campagne », « stop aux entraves administratives », ou encore « stop à l’asphyxie ». Un an après le lancement des mobilisations agricoles, les deux syndicats majoritaires agricoles estiment que les mesures promises par le gouvernement Attal ne se concrétisent pas assez vite.
📺 Vu sur #France2 | ✊🚜 Arnaud Rousseau (@rousseautrocy) était l'invité de @telematin pour #Les4V. Pour le président #FNSEA : 🎙️ "Les agriculteurs FNSEA/JA se mobilisent cette semaine, partout en France avec des actions départementales, pour un acte 2 et avec un message clé… pic.twitter.com/JAUjaph2cH
— La FNSEA (@FNSEA) November 26, 2024
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65% des mesures annoncées toujours pas dans les cours des fermes
Selon le décompte de la FNSEA, au 17 novembre 65% des mesures promises par le gouvernement Attal au moment des mobilisations agricoles de l’automne et l’hiver 2023-2024 « ne sont toujours pas arrivées dans les cours de fermes ».
Sur 67 mesures annoncées, seules 24 ont été mises en œuvre sur 7 grandes thématiques, selon la FNSEA. Un décompte différent de l’ex-ministre de l’Agriculture Marc Fesneau qui annonçait 67% d’engagements tenus le 13 septembre 2024.
Sur le dossier simplification : la FNSEA cite 26 mesures promises dont 11 abouties et 5 partiellement mise en œuvre.
Pour rappel, le gouvernement Attal avait lancé un mois de simplification dans tous les départements en février 2024, à l’issue duquel 44 mesures sont ressorties en avril 2024. Une troisième réunion du Conseil supérieur d’orientation et de coordination de l’économie agricole et alimentation (CSO) s’est tenue en juin 2024 et a fait le point sur ces mesures. Une partie d’entre elles devait se retrouver dans le projet de loi d’orientation agricole suspendu par la dissolution de l’Assemblée nationale et dont la discussion doit reprendre le 14 janvier 2025 au Sénat (notamment sur les haies ou encore la révision de l’échelle des peines suite aux contrôles)
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Des simplifications essentiellement réalisées au niveau européen
Ministère de l’Agriculture et FNSEA sont d’accord sur un point : l’avancée du dossier simplification de la vie des agriculteurs sur le plan européen.
Trois principales mesures sont citées comme des avancées :
- L’extension en 2024 d’une dérogation permettant de mettre en culture les terres en jachère
- L’évolution des règles de la PAC sur la conditionnalité relative aux prairies permanentes (simplification de la question du ratio prairies BCAE1, assouplissement de la BCAE7 sur la rotation des cultures pour 2025, suppression de la BCAE8 (infrastructures écologiques et de jachère), assouplissement de la BCAE9 (prairies permanentes sensibles).
- L’évolution du volet PAC sur les haies avec la possibilité de mobiliser la procédure de la force majeure dans les territoires touchés par les intempéries dans des conditions simplifiées pour les agriculteurs (cartographie établie par les DDT).
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Quelles mesures de simplification sur le plan national ?
Sur le plan national, FNSEA et Jeunes agriculteurs étaient en attente de nombreuses simplifications.
Pour l’heure seules quatre mesures sont en œuvre sur le foncier, l’élevage et la gestion de l’eau :
- Facilitation des travaux sur les plans d’eau pour faciliter les retenues hydrauliques lorsque l’impact sur une zone humide est inférieur à un hectare (modification de l’arrêté du 9 juin 2021)
- Signature électronique possible des certificats sanitaires pour les mouvements d’animaux (publication d’une instruction technique le 3 avril 2024)
- Limitation du nombre de contrôles administratifs sur une exploitation (circulaire sur le contrôle unique publiée en novembre 2024)
- Suppression des incohérences sur les obligations légales de débroussaillement pour prévenir les incendies (arrêté publié le 29 mars 2024).
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Recours et délais de contentieux : des précisions attendues
Le ministère de l’Agriculture met aussi à son actif une réduction des délais de recours contre les projets agricoles et la réduction des délais de contentieux des projets relatifs à la gestion de l’eau (décret publié le 10 mai 2024) mais la FNSEA estime que ces éléments méritent d’être précisés dans la loi d’orientation agricole.
Curage des cours d’eau : une simplification « partielle »
Le ministère de l’Agriculture estime aussi avoir simplifié la réglementation entourant le curage des cours d’eau avec la publication d’un décret le 1er février 2024.
Une simplification jugée « partielle » par la FNSEA qui souligne que cette simplification est valable uniquement pour « les curages ponctuels au sein d’opérations groupées ».
Pesticides : quels assouplissements ?
Sur le dossier des pesticides, le ministère de l’Agriculture met notamment en avant la réforme du conseil stratégique suspendu par le décret du 9 avril 2024. Une « solution transitoire » ne satisfaisant pas totalement le syndicat majoritaire agricole qui attend une suppression du CSP entérinée dans la loi.
Sur les Zones de non traitement (ZNT), le ministère de l’Agriculture souligne la procédure d’appel engagée le 11 mars par le gouvernement dans le cadre des décisions de justices sur les chartes départementales.
La FNSEA se félicite par ailleurs de la mise en place d’une nouvelle stratégie Ecophyto 2030 (publiée le 6 mai 2024) mais attend sa concrétisation par des mesures législatives.
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Quelles avancées sur le droit social et la sécurité sociale agricole ?
Sur le volet social, un chantier sur la simplification du droit du travail a été lancé par le ministère de l’agriculture. « Il pourra notamment aborder le sujet d’une plus grande automaticité des dérogations à la durée légale du travail pendant les périodes de moissons accordées chaque année », précise le ministère de l’agriculture. Le chantier n’a toutefois pas encore abouti.
Le ministère pointe aussi la reconnaissance de la production agricole comme secteur de métiers en tension par l’arrêté du 2 mars 2024. Une reconnaissance qui « facilite l’accès à la main d’œuvre, qu’elle soit européenne ou de pays tiers », via l’octroi de visas pour les travailleurs saisonniers.
Autre avancée : le rehaussement du plafond et la pérennisation du dispositif TO-DE qui doivent toutefois encore être intégrés au projet de loi de financement de la sécurité sociale 2025 (PLFSS 2025).
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34 mesures de simplification pourraient être directement applicables, selon la FNSEA
En parallèle des mouvements sur le terrain contre la lourdeur administrative, une fois ce bilan des avancées établies, la FNSEA a dressé une liste de 34 mesures de simplification répondant à plusieurs conditions : ne pas être d’ordre législatif, ne pas avoir d’impact financier et être réellement impactantes pour le monde agricole.
Au sein de cette liste demandée par le ministère de l’Agriculture, et à laquelle Reussir.fr a eu accès, la FNSEA propose de :
- Supprimer l’obligation de traitement de l’azote en Bretagne dans le cadre de la directive nitrate
- Supprimer le seuil d’autorisation à plus de 800 veaux et/ou 400 vaches au titre des ICPE
- Permettre aux exploitants d’être avertis par courrier électronique en cas d’irrégularité observée sur Telepac
- Supprimer la date pivot administrative du 31 décembre pour les semis d’orge et se référer uniquement à la variété semée pour distinguer l’orge d’hiver et de printemps.
- Faire en sorte que les dates des travaux agricoles (semis, traitements…) soient décidées au niveau local via arrêté préfectoral.
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