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Gérer les haies : pourquoi est-ce un tel casse-tête pour les agriculteurs ?

Pour montrer à quel point leur travail est compliqué par la réglementation française et européenne, les agriculteurs qui se mobilisent en ce moment dans toute la France citent souvent le millefeuille réglementaire qui entoure la gestion des haies. Explications.

Paysage agricole au printemps avec des haies
© Hélène Challier

« Aujourd’hui cette haie est soumise à 14 règlementations différentes, européennes et françaises. Le code de l’urbanisme, le code du patrimoine, le code de l’environnement… c’est-à-dire que les agriculteurs n’ont même plus envie de planter », témoigne Luc Smessaert, polyculteur-éleveur de l’Oise, et vice-président de la FNSEA au journal de TF1. 

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Parmi les causes de la contestation agricole, la complexité des normes s’affiche en bonne place dans les déclarations des agriculteurs mécontents. Et la réglementation entourant la gestion des haies par les agriculteurs fait office de symbole.

Rapide point sur la réglementation qui encadre les haies placées sur les parcelles agricoles.

Lire aussi : Quelles règles pour entretenir, supprimer ou déplacer une haie ?

A chaque haie son règlement 

Comme le rappelle un document de la préfecture de la Manche, la réglementation encadrant la gestion d’une haie dépend d’où se situe cette haie.

Ainsi une haie constituant la berge d’un cours d’eau est régie par le code de l’environnement (articles L214-1 et R214-1), tandis que si elle se situe dans un périmètre de protection de captage d’eau potable, elle est encadrée par le code de santé publique (article L1321-2).

Le code de l’environnement intervient si la haie se trouve dans une réserve naturelle (articles L332-1 et R332-1), sur un site Natura 2000 (article L414-4) ou un site inscrit ou classé (article L.341-2 à 22)) (dans ce cas-là le code de l’urbanisme s’ajoute).

Lire aussi : Les règles de curage des fossés en France vont évoluer, promet Christophe Béchu

C’est en revanche le code du patrimoine qui intervient si la haie est localisée aux abords ou dans le périmètre délimité d’un monument historique (article L632-2 et R621-96-1) ou sur un site patrimonial remarquable (article L632-1).

La réglementation autour de la gestion d’une haie se réfère au code de l’urbanisme si elle se situe dans un secteur couvert par un document d’urbanisme (L 151-19) ou dans un secteur où une délibération spécifique du conseil municipal protège les haies (article L421-23).

Sans oublier le code rural et de la pêche maritime qui intervient si la haie se trouve dans le secteur d’un aménagement foncier (article L123-8 et article L126-3) ou si elle est exploitée à bail à clause environnementale (article L411-28)

Cet ensemble de règlementations conduit la plupart du temps à soumettre à déclaration ou autorisation préfectorale tout intervention de type dessouchage ou arrachage, déplacement d’une haie, voire pour une simple coupe ou la plantation de haies pour les sites inscrits ou classés en matière d’environnement.

Source : Préfecture de l'Ain

Lire aussi : Un agriculteur obligé de replanter des haies en Haute-Saône

La préfecture de la Manche souligne par ailleurs que « l’entretien des haies, peut également être réglementé, notamment aux abords des routes ». Selon la nature de la voirie par exemple (chemin rural, voie communale ou route départementale), la législation prévoit des dispositions particulières (hauteur maximum, distance à la voie, obligation d’élagage) au profit de la sécurité de la circulation sur la voie riveraine. 

Lire aussi : Haies : deux agriculteurs condamnés à 23 000 euros pour des arrachages

L’entretien des haies interdite entre le 16 mars et le 15 août

Afin de préserver les oiseaux pendant la période de nidification, la nouvelle Politique agricole commune interdit par ailleurs aux agriculteurs de tailler leurs haies du 16 mars au 15 août.

Comme le rappelle Luc Smessaert auprès de TF1, les agriculteurs contrevenant à cette règle sont passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende pour atteinte à la conservation d’espèces animales non domestique et pour destruction de leur habitat.

La police de l’environnement (les agents de la DDT et de l’office français de la biodiversité) est en charge de la constatation des infractions de ce type.

Lire aussi : PAC 2023 : la taille des haies interdite entre le 16 mars et le 15 août

Des règles de conditionnalité des aides pour les bénéficiaires de la Pac

Tous les exploitants bénéficiaires d’aides de la PAC sont par ailleurs soumis au respect des bonnes conditions agricoles et environnementales et spécifiquement aux BCAE 8 pour les haies. 

Toutes les haies d’une exploitation agricole répertoriées au sein de la couche BCAE 8 sont visibles sous Telepac et doivent être maintenues en état.

Pénalités en cas de non maintien d'une haie sur les aides PAC

En cas de non maintien d’une haie dans le cadre de la BCAE 8, les pénalités varient de 1%, jusqu’à 100% de réduction des aides PAC en fonction du pourcentage de linéaire de haie détruite sur l’exploitation.

Des dérogations au maintien des haies bien précises

A noter que l’exploitation du bois, la coupe à blanc et le recépage sont autorisés mais dans certaines conditions. La PAC prévoit des dérogations au maintien des haies pour :

• Création d’un nouveau chemin d’accès rendu nécessaire pour l’accès et l’exploitation de la parcelle, dans la limite de 10 mètres de large.
• Création ou agrandissement d’un bâtiment d’exploitation justifié par un permis de construire.
Gestion sanitaire de la haie décidée par l’autorité administrative (éradication d’une maladie).
• Défense de la forêt contre les incendies (décision administrative) ;
Réhabilitation d’un fossé dans un objectif de rétablissement d’une circulation hydraulique.
• Travaux déclarés d’utilité publique (DUP).
• Opération d’aménagement foncier avec consultation du public, en lien avec des travaux déclarés d’utilité publique.

La PAC autorise aussi un « déplacement » de haie pour :

  • un meilleur emplacement environnemental de la haie ;
  • des haies présentes sur des parcelles ayant fait l’objet d’un transfert de parcelles entre deux exploitations (délai max. de 12 mois pour réalisation) ;
  • 2 % du linéaire de l'exploitation ou de 5 mètres par campagne.

Un remplacement de haie est aussi prévu par la PAC pour remplacer des éléments morts ou changer d’espèces.

Mais la haie peut être protégée par d’autres textes réglementaires français selon son lieu d’implantation et son arrache interdit ou soumis à conditions. 

Lire aussi : PAC 2023 : un bonus haies de 7 euros l’hectare

Des agriculteurs découragés de planter des haies

Cet empilement voire enchevêtrement de règles entourant la gestion des haies explique aujourd’hui pourquoi nombre d’agriculteurs hésitent à planter des haies aux bénéfices pourtant reconnus et soutenues par un pacte national agrémenté d’un budget de 110 millions d’euros.

 

Lire aussi : Haie : quel pacte promet le gouvernement pour gagner 50 000 km d’ici à 2030 ?

Pour aller plus loin

Plantation de haies : « J’ai installé des haies dès les années 90 pour ramener de la biodiversité sur mes parcelles »

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