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Souveraineté alimentaire et fruits et légumes transformés : « on est encore loin de l’autonomie »

Une étude de l’Anifelt pour FranceAgriMer, avec entre autres Unilet, l’Afidem, Unijus et la Sonito, a fait le point sur les capacités de la France a approvisionné son marché en compotes et jus de pomme, en produits à base de tomate et en légumes surgelés et en conserve.

des bocaux de sauce tomate
Le marché français des dérivés de tomates approvisionne seulement 10 % du marché français, alors qu’il atteignait plus de 30 % à la fin des années 1990.
© Didier de Pixabay

Malgré une baisse des volumes importés en 2023, le déficit de la balance commerciale de la filière française des fruits et légumes transformés continue de se creuser.

Selon les chiffres du Panorama statistique 2023 des fruits et légumes transformés(1), la balance commerciale de ce secteur s’établit à -1,66 milliards d’euros (+13 % vs 2022). Cette hausse du déficit s’explique notamment par celle des prix liée à l’inflation, pesant donc sur la valeur des importations. 

Infographie des importations et exportations de la France des principaux fruits et légumes trasnformés.

Lire aussi : Fruits et légumes transformés : quels sont les chiffres clés 2023 de la filière française ?

 

L'autonomie, un enjeu dans le Plan de Souveraineté Fruits et Légumes

Se pose donc la question de la souveraineté alimentaire : quelle est l’autonomie de la France dans ces différentes filières de transformation ? Après le lancement du Plan de Souveraineté Fruits et Légumes l’année dernière, il est d’autant plus précieux de disposer de données statistiques précieuses sur le sujet.

A relire : Plan de souveraineté fruits et légumes : 100 M€ supplémentaires en 2024

Le Panorama statistique 2023 des fruits et légumes transformés(1), outre donner les chiffres clés de la balance commerciale française, a fait un focus sur trois filières : la tomate d’industrie, les légumes en conserve et surgelés et la pomme transformée (jus et compote).

« Le travail qui a été fait [avec ce panorama 2023] est important pour notre filière, notamment pour avoir une vision plus large du taux d’auto-approvisionnement, à comparer avec les dynamiques de consommation », juge Aurélien Soubeyrand, président du conseil spécialisé Fruits et Légumes de FranceAgriMer, lors du webinaire le 18 décembre 2024 pour présenter le Panorama statistique 2023 des fruits et légumes transformés.

Lire aussi : Consommation de fruits et légumes transformés : pourquoi la compote est la seule catégorie en hausse ?

 

Zoom sur la filière tomate d’industrie : « La France est encore très loin de l’autonomie »

« La filière tomate est une filière très loin de l’autonomie », annonce tout de go Robert Giovinazzo, directeur de la Sonito. Le marché français des dérivés de tomates approvisionne seulement 10 % du marché français, alors qu’il atteignait plus de 30 % à la fin des années 1990.

En France, on exporte pour 71 millions d’euros de dérivés de tomates exportés là où on importe pour 595 millions d’euros (sauces, conserves et concentrés). Malgré une relative stabilisation des importations en volume, l’inflation continue de creuser l’écart.

La France importe sauces (36 %), concentrés (33%) et conserves (31 %) pour un total d’environ 1,3 millions de tonnes. L’Italie et l’Espagne représentent plus de 85 % des volumes importés de concentrés, sauces ou conserves. Nos autres fournisseurs restent nos voisins européens (qui font souvent du ré-export) : Allemagne (5 % des sauces, 8 % des conserves et 3 % des concentrés), Belgique (6 % des sauces), Pays-Bas (2 % des sauces) et Portugal (7 % des concentrés).

Alors comment accroitre l’origine France ?

Côté amont, le projet Tommates, qui vise à augmenter la production sur le sol français de tomates d'industrie destinées à fabriquer les sauces, jus et concentrés, avec un premier objectif de production de 400 000 tonnes, est « en phase de maturation » jusqu'à l'automne 2025 pour un nouveau jury  et aller vers la phase de réalisation sur cinq ans ensuite.

Les usines françaises ne peuvent pas suivre

Le frein se trouve surtout au niveau de nos capacités de transformation. « Nos usines pour le moment ne peuvent transformer qu'un peu moins de 200 000 tonnes de tomates fraîches, explique Robert Giovinazzo. Nous ne pouvons donc pas subvenir pour le moment et notre taux d’auto-approvsionnement ne pourra pas dépasser les 20 % par manque d’équipements adaptés et modernisés. »

En bio, les surfaces de tomates destinées à l’industrie diminuent fortement. « Nous sommes arrivés à 385 ha en 2023 contre 568 en 2021... La demande aux industriels ne semblait plus être là avec inflation. Cela semble se retourner pour 2025, mais pas en 2024... », précise encore le directeur de la Sonito.

 

Zoom sur les légumes en conserve et surgelés : « A défaut d’avoir une souveraineté française, on a une souveraineté européenne »

Pauline Bourcier, responsable des études économiques à Unilet, évoque pour les légumes en conserve une situation qui tend à se dégrader. Si en légumes bruts, la France exporte plus qu’elle n’importe, en particulier haricots et pois, la situation est inverse : la France importe beaucoup plus de surgelés et de conserves qu’elle n’en exporte. Cette situation d’ailleurs « se creuse depuis plus de 10 ans », avec un doublement du déficit de la balance commerciale française sur cette période.

En 2013, la France a exporté 127 900 tonnes de légumes frais destinés pour la transformation et importé 68 000 tonnes de légumes frais pour la transformation. Mais elle a importé pour 908 millions d’euros de légumes en conserve et surgelés pour seulement 517 millions d’euros exportés.

L’Unilet estime le taux d’auto-approvisionnement en légumes surgelés et en conserve à 40 %. Une autonomie nationale contrastée, puisque elle est de 57 % pour la conserve. Et ce taux monterait même à 92 % si 100 % de la production-transformation était tournée vers la demande domestique (c’est ce qu’on appelle l’autonomie potentielle).

En surgelé, c’est plus compliqué. Le taux d’auto-approvisionnement est de 26 %. Mais l’autonomie potentielle (c’est-à-dire l’autonnomie de la France si la totalité de la production et de la transformation était tournée vers la demande domestique) ne serait que de 66 %.

Les besoins de la France en légumes surgelés et en conserve sont couverts par nos voisins européens : les trois quarts de nos importations proviennent de l’UE, majoritairement Belgique (22 %), Espagne (22 %) et Pays-Bas (10 %). « A défaut d’avoir une souveraineté française, on a une souveraineté européenne », note Pauline Bourcier.

A relire : Légumes d'industrie : de combien la filière doit-elle développer ses capacités pour répondre au Plan de Souveraineté Fruits et Légumes ?

Zoom sur la pomme pour la compote et le jus

L’étude a également fait un focus sur la pomme à destination de la compote et du jus. L’article est à retrouver en cliquant sur ce lien.

 

(1) Panorama statistique 2023 des fruits et légumes transformés par FranceAgriMer par un consortium de 10 organisations professionnelles ou interprofessionnelles représentatives de leurs filières, coordonné par l’association nationale interprofessionnelle des fruits et légumes transformés (Anifelt). Ces 10 organisations sont : l’AFC (choucroutiers), l’Afidem (fruits à destinations multiples transformés), ANIBI (bigarreau d'industrie), ANICC (champignon de couche), BIP (pruneau), Sonito (tomate d’industrie), SVFPE (légumes 4e gamme), Unijus (jus et nectars), Unilet (légumes conserves et surgelés), et l’Anifelt. Cette étude annuelle est réalisée depuis 5 ans.

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