Mercosur : « Nous sommes aujourd’hui à un tournant décisif » s'alarment quatre interprofessions agricoles
Les interprofessions de la viande bovine, de la volaille, du sucre et des céréales étaient réunies aujourd’hui pour réaffirmer leur ferme opposition à la signature de l’accord UE-Mercosur alors que les doutes autour d’une signature prochaine s’intensifient.
Les interprofessions de la viande bovine, de la volaille, du sucre et des céréales étaient réunies aujourd’hui pour réaffirmer leur ferme opposition à la signature de l’accord UE-Mercosur alors que les doutes autour d’une signature prochaine s’intensifient.
Ce 13 novembre, le monde agricole exprime son opposition à l’accord UE-Mercosur. « Nous sommes aujourd’hui à un tournant décisif. L’accord UE-Mercosur qui pourrait être conclu ces prochains jours représente une réelle menace pour l’ensemble de nos filières », explique Jean-François Guihard, le président d’Interbev lors d’une conférence de presse ce matin à Paris à l'unisson avec Anvol, Intercéréales et AIBS.
« Une réelle menace pour l’ensemble de nos filières »
➡️ Accord Mercosur: risques sanitaires et environnementaux pour les consommateurs ?
💬 "Oui nous en sommes certains", affirme Patrick Bénézit, président de la Fédération nationale bovine, vice-président d'Interbev, 2e vice-président de la FNSEA pic.twitter.com/xb0d2c2ynV— BFM Business (@bfmbusiness) November 13, 2024
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Crainte autour du maïs brésilien
« Longtemps nous avons eu l’impression que seule la filière bovine était concernée », reconnaît Franck Laborde, trésorier d’Intercéréales et président de l’association générale des producteurs de maïs qui ajoute « certains sont peut-être même étonnés de voir des céréaliers à cette conférence ».
« Longtemps nous avons eu l’impression que seule la filière bovine était concernée »
La perte de l’autosuffisance en maïs a été l’un des éléments déclencheur pour l’interprofession. « Nous importons environ 25 % de nos besoins en maïs. Une grande partie vient du Brésil, qui a des normes de productions totalement différentes des nôtres », déplore le trésorier. « Une étude de l’AGPM met en évidence que 77,5 % des produits phytosanitaires utilisés au Brésil pour produire du maïs sont interdits en France », indique Franck Laborde.
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3,4 millions de tonnes équivalent maïs exportées en plus dans l’Union européenne
Intercéréales estime à près d’un million de tonnes supplémentaires de maïs en cas de signature du Mercosur pour un total de « 3,4 millions de tonnes équivalent de maïs supplémentaire en prenant en compte les produits dérivés de l’amidonnerie, du maïs, de la viande produit avec le maïs ».
🚨 Conférence de presse de 4 filières agricoles françaises pour dire NON à l’accord UE-Mercosur ! 🚨
INTERBEV, @Interpro_Anvol, AIBS et @intercereales ont pris la parole pour dénoncer, ensemble, les dangers de cet accord pour l’agriculture française et la… pic.twitter.com/g9XWMqjquA— Interbev (@Interbev_fr) November 13, 2024
En bœuf, c’est l’aloyau qui est menacé
Le vice-président d’Interbev, Patrick Bénézit, évoque de son côté « 99 000 tonnes de viande bovine à droit abaissé (à 7,5 %) et d’autres à droits zéro sur les viandes cuites, qui s'ajoutent à des contingents déjà concédés avant le Mercosur ». Pour l’interprofession c’est clairement l’aloyau qui est menacé « ces 99 000 tonnes peuvent être constitués uniquement d’aloyau, morceau dit noble ». Cette quantité supplémentaire pourrait « déstabiliser la filière bovine ».
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180 000 tonnes de volailles supplémentaires
Colère et inquiétude grondent aussi chez les volaillers. « La volaille est la viande la plus importée dans l’UE, près 1 million de tonnes proviennent de plusieurs pays dont 400 000 tonnes du Brésil », explique Jean-Michel Schaeffer, président de l’Anvol. C’est d’autant plus frustrant pour la filière que les importations concernent le morceau plébiscité par les consommateurs français et européens, le filet de poulet.
« Alimenter les marchés en croissance de consommation, les produits élaborés et la RHD »
« On est très inquiets car l’accord pourrait permettre d’importer 180 000 tonnes de plus. Ils viendraient alimenter les marchés en croissance de consommation, les produits élaborés et la RHD ». Une possible signature provoque aussi une incompréhension, pourquoi appliquer une réglementation plus souple aux pays du Mercosur alors que les pays communautaires « sont [par exemple] soumis à une réglementation salmonelle très stricte et très coûteuse », questionne Jean-Michel Schaeffer.
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Après le sucre ukrainien, le sucre brésilien ?
Il s’agit d’un accord « égoïste », pour Alain Carré, le président de l’interprofession du sucre. Ce dernier dénonce « la fin des droits de douanes sur 180 000 tonnes de sucre en provenance des pays du Mercosur ». Durant la conférence, Alain Carré a aussi exprimé son mécontentement face « à des concessions progressives pour l’éthanol qui permettraient l’importation de 5,7 millions d’hectolitres sans droits de douanes à utilisation exclusivement industrielle et en plus 200 000 tonnes d’éthanol à droits réduits ». Cet accord pourrait fragiliser les pays de l’UE qui subissent déjà les mesures prises en faveur de l’Ukraine en guerre. D’autre part, les volumes supplémentaires seraient importés « dans les bassins où la production de sucre est déficitaire, à savoir l’Espagne, l’Italie et le Portugal. Ces pays historiquement sont alimentés par la production française, la France sera directement impactée », soupire Alain Carré, le président de l’interprofession.
« La France sera directement impactée »
L’éthanol brésilien inquiète
L’éthanol aussi préoccupe. « Le marché est déjà saturé par les Etats-Unis et le Pakistan. Les importations du Pakistan ont provoqué une baisse de 25 % de la production européenne en 2022. Ce phénomène sera amplifié avec le Mercosur, les importations d’éthanol vont représenter 15 % de la production communautaire, ceci est totalement inacceptable et totalement infondé », souligne Alain Carré.
Constituer une minorité de blocage contre l'accord Mercosur
Pour Stéphane Travert, ancien ministre de l’Agriculture et député normand du groupe Ensemble pour la République, « il faut chercher des alliés pour obtenir cette minorité de blocage qui permettra de ne pas signer cet accord dans les semaines à venir. Il faut jouer avec le temps, tous les commissaires européens n’ont pas été nommés et validés, et ça ne sera pas le cas avant le G20. Le gouvernement les filières vont devoir jouer avec ce temps pour chercher des alliés ». Le sénateur met en avant « la minorité de blocage plus forte qu’un droit de véto ».
« la minorité de blocage plus forte qu’un droit de véto »
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Accompagner tout accord de libre-échange de clauses miroirs
Pour les représentants des quatre filières, il est impératif que chaque accord de libre-échange soit accompagné de clauses miroirs. « Il s’agit d’arrêter d’affaiblir la production européenne et de protéger le consommateur », indique le trésorier d’Intercéréales.
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De son côté, le député socialiste Dominique Potier a annoncé que la proposition de résolution au sujet des mesures miroirs a été mise à l’ordre du jour ce matin par la Commission des affaires économiques. « Elle sera examinée le 27 novembre ». Pour le député, il s’agit d’une véritable avancée. « Il est question de vraies mesures miroirs. Notre proposition est phare, elle concerne l’inversion de la charge de la preuve, c’est-à-dire l’obligation pour tous ceux qui importe dans l’UE d’avoir une certification d’un organisme indépendant agréé par l’UE, en amont qui respectent les conditions sanitaires, environnementales, de bien-être animal adoptée par l’UE ».
Une signature peut-être pas au G20 mais en décembre
Si la signature de l’accord commercial UE-Mercosur semble de plus en plus improbable pendant le G20 au Brésil, le journal Politico évoque une conclusion possible entre le 2 et le 4 décembre, lors du sommet du bloc sudaméricain, auquel assistera aussi Xi Jingping, car le Mercosur fait les yeux doux à la Chine en parallèle. La France n'acceptera pas l'accord de libre-échange UE-Mercosur «dans les conditions actuelles», a martelé le 13 novembre le Premier ministre français Michel Barnier à l'issue d'une rencontre avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, rapporte Agra Presse. «Je recommande qu'on ne passe pas outre la position d'un pays comme la France», a-t-il mis en garde.