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À la conquête de la génération Y

Les jeunes ayant entre 18 et 30 ans représentent les consommateurs de demain. Voici quelques clés pour les séduire.

Pour attirer les jeunes au vin, il ne faut pas hésiter à décomplexer le monde du vin et à user du story telling.
© P. Cronenberger

Conquérir la génération Y est un enjeu crucial pour la filière viticole. Mais comment s’y prendre pour amener ces jeunes de 18 à 30 ans à apprécier le vin ? C’est la question à laquelle s’est attelé le dernier Vinocamp, organisé à Paris le 14 octobre. Une question d’autant plus ardue que cette catégorie regroupe deux tranches assez différentes : les 18-25 ans et les 25-30 ans. Éric Briones, expert en innovation sur les secteurs luxe et premium, et co-auteur de La Génération Y et le Luxe chez Dunod, estime néanmoins qu’il y a sept axes à travailler pour attirer l’ensemble de cette cible. « Les Millenials (NDLR : autre nom de la génération Y) aiment le luxe, mais un luxe quotidien et redéfini à leur manière, pose-t-il. Ils détournent les objets de leur rôle initial. De plus, le luxe devient de plus en plus immatériel, expérientiel. » L’œnotourisme devrait donc être un bon biais pour les attirer et les intéresser à la filière. Par ailleurs, l’expert juge que les jeunes ne s’approprient pas le discours sur le vin, et que leur intérêt pour ce produit est faible. Il en veut pour preuve le faible nombre de photos de bouteilles publiées sur Instagram. « Le risque est que le vin, peu à peu, entre au musée des Millenials, prévient-il. Il faut à tout prix éviter cela. »

Lire aussi " Un cocktail pour promouvoir un vin "

Décrypter le prix avec humour et créer un univers

Dans un premier temps, l’expert recommande donc d’expliquer le prix de chaque bouteille de manière claire, et si possible avec humour. « Les Millenials veulent connaître le pourquoi du prix, prône-t-il. Et l’humour fonctionne bien avec eux. Il faut faire de la dégustation un moment de fantaisie et de tradition. » Des propos étayés par Florentine Mälher-Besse, sémiologue du vin, qui préconise de jouer sur l’équilibre entre tradition et renouveau, à l’instar du film élaboré par le château Paveil de Luze. Pour elle, le renouveau passe par l’humour, les animaux, la transgression, ou encore les voyages.

Par ailleurs, Éric Briones conseille de faire en sorte que le vin s’intègre à l’art de vivre des jeunes, en développant un univers auquel ils auront accès en consommant une bouteille. C’est notamment ce qu’a mis en œuvre le champenois Krug. En scannant un QR-code présent sur l’étiquette, le consommateur a accès à une playlist directement sur son smartphone. « Cela développe l’imaginaire et l’identité », insiste Éric Briones ; le sentiment d’appartenance. C’est d’ailleurs le filon utilisé par les géants tels que Coca Cola, Apple, Starbucks mais aussi par Vente privée. « Nous créons un écrin pour vendre chaque produit, changeons les codes et recréons un univers, analyse Paloma Ezcurra, de l’enseigne dont 20 % des clients appartiennent à la génération Y. Nous organisons des ventes de vin autour du moment de consommation, de la création d’une cave ou encore des cépages. Depuis quatre ans, nous avons aussi développé le concept des 'vins d’été'. Cela marche fort auprès des jeunes et des femmes. » Car l’objectif sous-jacent est que les consommateurs achètent les produits par passion et non pas par besoin.

Travailler sur la transparence et l’image

Autre axe à travailler : l’incarnation. « Les châteaux sont des endroits mystérieux et poussiéreux, qui ne donnent pas envie aux jeunes, relate l’expert. En revanche, ils sont beaucoup plus intéressés par la vie des vignerons. » Il ne faut donc pas hésiter à décomplexer le monde du vin et surtout, à user du story telling, tant sur l’étiquette que sur le site du domaine(1). De même, les jeunes sont plus engagés politiquement que leurs aînés, et ont une conscience environnementale importante. Car « les Y font davantage confiance à leur consommation pour faire changer le monde, plutôt qu’aux politiques », note Éric Briones. Ils veulent pouvoir justifier leur mode de vie, leurs choix, leurs achats. Il ne faut donc pas hésiter à rassurer ces consommateurs par tous les moyens, en étant clair et transparent. Un vin bio, des vendanges manuelles, des vinifications nature, sont autant de facteurs d’attrait. Et ce d’autant plus que les jeunes « sont dans le why, renchérit James de Roany, consultant de Global Vini Services. Il faut donc être le plus explicatif possible. »

Autre créneau à travailler : le magique, le merveilleux. Éric Briones préconise d’adopter « une posture d’enchanteur ». Enfin, la génération Y aime « le beau et le design ; le mot s’efface au profit de l’image », conclut l’expert. Il ne faut donc pas hésiter à privilégier le visuel et la vidéo sur les sites internet. Mettre un film de son domaine tourné depuis un drone, avec une voix off racontant l’histoire du domaine, ou une vidéo de dégustation décomplexée, est une bonne façon d’intéresser les jeunes. Et ce d’autant plus qu’elle sera postée sur Facebook direct, un réseau social plébiscité par les jeunes…

(1) Voir Réussir Vigne de juin 2016, page 46.

PICTO WEB

Pour voir le film du château Paveil de Luze 

http://bit.ly/2dERVR8 

Les jeunes et le vin

Avant de savoir comment toucher ces jeunes, encore faut-il savoir qui ils sont, et quels sont leurs goûts. Une étude Ifop pour Vin & Société révèle que sept sur dix consomment du vin, et ce « de manière raisonnable », présente Jérôme Fourquet, de l’Institut de sondage. La fréquence de consommation est d’une à deux fois par semaine, essentiellement le week-end (40 %) et/ou lors des repas « élaborés et conviviaux » (58 %). Pour la majorité de ces jeunes (67 %), le vin fait partie de l’art de vivre à la Française ; ils y sont attachés. Et 63 % des sondés estiment que le rapport au vin se construit… en famille ! Et non sur les réseaux sociaux ou sur internet, comme on aurait pu s’y attendre. « Plus une famille a l’habitude de boire et d’apprécier le vin, plus le jeune en consommera, souligne Jérôme Fourquet. Il s’agit en quelque sorte d’un héritage. » De même, pour découvrir l’univers du vin, la génération Y aurait tendance à se tourner vers sa famille à 40 %, puis vers ses amis à 27 %. Des propos confirmés par le baromètre Gallo 2016/SSI, qui place l’entourage comme le premier vecteur d’information avant achat, contre 27 % pour internet.

En revanche, l’univers du vin leur paraît en règle générale trop complexe. Les jeunes n’ont pas l’impression de s’y connaître : seuls trois sondés sur dix estiment être capables de parler de vin. C’est un domaine qui leur semble « assez obscur et hermétique » ; peu se sentent à même de décrire les goûts et les arômes de la dive bouteille. Mais là aussi, « le sentiment d’être informé croît dès que le vin était présent à la table des parents », note l’Ifop. Le rôle de la transmission familiale est donc crucial. Un axe qui sera sûrement travaillé par Vin & Société à l’avenir, comme le confirme Audrey Bourolleau, sa déléguée générale.

Du côté des produits, les jeunes de 18 à 25 ans semblent plus ouverts que le reste de la population. Le baromètre Gallo 2016/SSI met en exergue que 60 % d’entre eux souhaitent déguster du vin en cocktail, 52 % consomment chaque mois du vin aromatisé, et 38 % plébiscitent le vin en piscine. Mais Paloma Ezcurra pointe que parmi leurs jeunes clients, la plupart restent classiques : 35 % de leurs commandes concernent des Bordeaux.

Des marges de manœuvre existent également au niveau des non-consommateurs. La plupart justifient leur abstinence par le fait qu’ils n’apprécient pas le goût du vin. Un phénomène dont Gallo a su tirer parti en lançant des vins rouges, avec du sucre résiduel, peu de tannins et de végétal…

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