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Débat des matinales de l’Ifip au Space
Vers des viandes plus persillées dans les filières de qualité

L’incitation à produire des viandes plus goûteuses se fera plutôt par la mise en place de cahiers des charges spécifiques que par un paiement individuel à la carcasse.

Introduire des critères organoleptiques dans la grille de paiement des carcasses pour mieux répondre aux attentes du consommateur n’est pas un objectif réaliste dans l’immédiat. C’est ce qui est ressorti du débat organisé par l’Ifip lors des matinales au Space. La principale raison est qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’outils de mesures objectifs de la qualité sensorielle de la viande qui puissent être appliqués en routine dans les abattoirs, c’est-à-dire à la cadence industrielle et dans l’ensemble du périmètre d’action d’Uniporc. « C’est surtout la teneur en gras intramusculaire qui influence le goût », a précisé Gilles Nassy, directeur du pôle viandes et charcuterie de l’Ifip. "Les longes de porc françaises ont en général un taux de lipide intramusculaire (LIM) compris entre 1 et 2 %. Il faudrait atteindre au moins 2,5 % pour avoir un effet ressenti sur le goût et la tendreté de la viande. Même à ce taux, la viande de porc fraîche reste pauvre en lipides et d’excellente qualité nutritionnelle. On est encore loin du taux de matière grasse de 5 à 15 % de la viande de bœuf. Ce critère LIM n’est pas mesurable aujourd’hui autrement que visuellement. » Les Canadiens utilisent la grille de notation américaine NPPC pour évaluer l’importance de l’aspect marbré de la viande (gras visible). Mais cette mesure subjective, coûteuse en main-d’œuvre, se fait après découpe de la longe. « Nous avons testé d’autres outils de mesures non destructives (sonde infrarouge) mais sans résultats concluants, car nous sommes dans des valeurs très faibles de gras. Pour améliorer la qualité sensorielle, il est plus facile aujourd’hui de s’orienter vers des critères de moyens que sur des mesures de résultats », résume-t-il. En d’autres termes, mettre en place des cahiers des charges de production associés à des primes de qualité plutôt que d’aller vers des mesures individuelles (et un paiement) à la carcasse.

Des attentes différentes selon les débouchés

On peut jouer sur plusieurs leviers pour améliorer la qualité sensorielle de la viande : en augmentant l’âge à l’abattage, avec une alimentation plus énergétique et par la sélection de types génétiques, notamment avec le Duroc français, qui comparé au Piétrain apporte une couleur plus sombre et une meilleure jutosité de la viande. « Le gras intramusculaire est un critère héritable », confirme Michel Sourdioux, président d’Alliance Porc R & D, représentant les schémas de sélection français. « Il existe toute une palette de solutions pour améliorer ce critère, que ce soit par une sélection intrarace ou par les croisements de lignées mâles mais aussi femelles. Mais il nous faut avant tout bien connaître les attentes des filières aval. Quelle équation veut-on entre les deux critères gras de couverture et gras intramusculaire, qui sont liés l’un à l’autre ? » Dans l’absolu, il est possible de sélectionner des animaux plus persillés sans modifier la qualité de carcasse mais c’est un travail de longue haleine. Aller vers des viandes plus goûteuses, c’est-à-dire plus grasses et plus âgées, aura deux niveaux de conséquences : pour l’éleveur, un surcoût de production qu’il faudra rémunérer et pour l’abatteur, de nouveaux débouchés à développer pour valoriser la poitrine et le jambon, plus gras.

Redéfinir le socle de base du porc français

L’une des raisons qui explique la baisse de consommation de la viande fraîche de porc est probablement son manque de goût. Le consommateur la juge trop blanche et trop sèche, manquant de persillé et donc paradoxalement de gras. Faut-il le rappeler, environ un tiers de la carcasse d’un porc est consommé en viande fraîche. 70 % sont destinés à l’industrie de la charcuterie, celle-ci demandant pour le marché du cuit de la viande maigre pour la fabrication du jambon et du rôti. « D’énormes progrès ont été réalisés au cours des dernières décennies sur la qualité de carcasse, en termes d’homogénéité et de rendement de muscle. Mais on touche aujourd’hui les limites de notre système de classement essentiellement basé sur le poids et le TMP », reconnaît Paul Auffray, président d’Uniporc Ouest.

Relancer la consommation de viande de porc passera nécessairement par une segmentation de la production. À travers le plan de filière, signé l’an dernier, la profession s’est engagée à aller vers une montée en gamme de la production pour mieux répondre aux attentes sociétales, en termes de goût mais aussi de santé et de bien-être animal. « Il nous faut dans un premier temps redéfinir le socle de base de la production de porc français puis les différents segments de marchés et cahiers des charges à mettre en place pour répondre aux attentes très diversifiées des transformateurs sur le frais, le sec ou le cuit », explique-t-il. Un objectif fixé pour les prochains mois.

 

Une qualité sensorielle complexe à mesurer
Gilles Nassy, de l’Ifip

« Diversifier l’offre comme en pomme de terre »

« À l’inverse des produits de charcuterie, la viande fraîche est peu mise en avant par le marketing. C’est souvent un produit de promotion avec un prix d’appel. Il faudrait davantage diversifier l’offre à l’exemple de ce qui a pu être fait avec la pomme de terre, un produit indifférencié au départ et dont l’offre s’est remarquablement segmentée : pomme de terre pour purée, à frites, spéciale gratin, pomme de terre de Noirmoutier…).

On constate que le segment de la viande de porc de haut de gamme n’est pas occupé par les viandes françaises. Il y a sans doute des opportunités à développer l’équivalent de races Charolaise ou Limousine en porc.

Il y a aussi un travail de communication et de marketing à déployer. Par exemple, comment rassurer le consommateur qui pense que les viandes persillées (aspect marbré, gras visible) sont trop grasses pour sa santé alors qu’à moins de 5 % de matière grasse et un taux d’insaturés à 40 %, elles sont parfaites pour la santé. »

 

Olymel vise une amélioration de la qualité de base

Pour Sylvain Fournaise, du groupe Olymel, premier producteur de porcs au Canada, « on est encore loin d’un système de paiement universel de la qualité. » Les Américains ont tenté l’an dernier de proposer une nouvelle grille de paiement intégrant des critères organoleptiques (couleur et persillage). « Le projet a avorté car il n’a pas remporté l’adhésion des transformateurs, en raison de l’absence de méthodes de mesures objectives applicables à l’échelle industrielle et d’entente sur la répartition de la valeur ajoutée. » Le représentant d’Olymel prône une grille de paiement qui permette une augmentation de la qualité de base de la production puis des cahiers des charges spécifiques selon la demande des clients. Le groupe dispose de sa propre lignée de verrat Duroc. Les pedigrees sont scannés afin de mesurer le taux de gras intramusculaire. « Cela permet de sélectionner ceux qui ont du persillage dans la longe et pas dans les jambons. »

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