Quatre points clés pour limiter les pertes en maternité
La gestion de l’alimentation de la truie, le respect des mesures de prévention des maladies et la qualité du suivi des mises bas et des portées sont les facteurs clés de la survie des porcelets.
La gestion de l’alimentation de la truie, le respect des mesures de prévention des maladies et la qualité du suivi des mises bas et des portées sont les facteurs clés de la survie des porcelets.
La chambre d’agriculture de Bretagne, en partenariat avec la chambre d’agriculture des Pays de la Loire et l’Ifip, a mené une enquête dans 66 élevages naisseur engraisseur ayant plus de 15 nés totaux par portée dans le but d’identifier les pratiques favorables à la survie des porcelets en maternité. Deux groupes d’élevages ont été comparés : « Pertes - » ayant moins de 19 % de pertes sur nés totaux et « Pertes + » ayant plus de 24 % de pertes sur nés totaux. Quatre points de mesures sont ressortis.
Les éleveurs du groupe « Pertes - » individualisent davantage la ration en verraterie-gestante pour une meilleure adéquation des apports aux besoins de la truie. 91 % d’entre eux modulent l’apport alimentaire en verraterie en fonction de la réserve des truies, dans l’objectif de remettre en état les truies maigres et 53 % utilisent au moins deux courbes d’alimentation afin d’adapter les apports selon le rang de portée et/ou l’état des réserves. Le nombre de courbes utilisées en gestation (de 1 à 14) est au moins au nombre de trois pour 50 % de ces éleveurs. Ces courbes permettent de raisonner l’alimentation en fonction du rang de portée, de l’état des réserves et de la prolificité. La connaissance plus fine des besoins nutritionnels des truies gestantes conduit certains éleveurs à utiliser différents aliments en début ou fin de gestation. Les élevages « Pertes - » utilisent pour 24 % d’entre eux deux aliments différents durant la gestation en suivant un « Plan en U » (97 %). Aucune différence entre les deux groupes n’a pu être démontrée sur la conduite alimentaire en maternité (type d’aliment, quantité, moment de transition). Les truies rentrent en maternité plus de cinq jours avant la mise bas dans 68 % des élevages. La distribution d’un aliment allaitante directement à l’entrée en maternité est réalisée par 41 % des éleveurs.
La contamination des cochettes en quarantaine est réalisée par 85 % des éleveurs « Pertes - ». L’attention apportée à la livraison des cochettes et le type d’aliment distribué ne diffèrent pas entre les deux groupes. Plus de 50 % des éleveurs réalisent les vaccinations contre la parvovirose, le rouget, la rhinite, le SDRP, la colibacillose et le mycoplasme. Les éleveurs « Pertes + » effectuent moins de vaccinations : 41 % de ces éleveurs font moins de trois vaccins. Les éleveurs « Pertes - » portent une attention plus particulière à certaines mesures de biosécurité. La présence de pédiluves ou pédichaux à l’entrée en maternité ou devant chaque salle est pratiquée par la moitié de ces éleveurs. L’utilisation d’un détergent lors du nettoyage-désinfection des salles est plus courante (84 %). Le prétrempage serait lui aussi plus réalisé (91 %). Enfin, la purge des circuits d’eau avant l’entrée des animaux en maternité est aussi plus fréquente (59 %). Le douchage des truies avant l’entrée en maternité n’est réalisé que par 18 % de la totalité des éleveurs, sans différence entre les groupes.
Aucun effet du temps passé n’a pu être démontré. Les éleveurs, pour l’ensemble des deux groupes, passent en moyenne 1 h 11 min par truie en semaine de mise bas avec une disparité sensiblement égale au sein des groupes (± 30 min). Les éleveurs « Pertes - » font plus de surveillance le midi lors de la semaine de mise bas (41 %). La surveillance des mises bas en prenant en compte l’historique de la truie est une pratique plus courante chez les « Pertes - » (65 %). Cet historique, pour les deux groupes, concerne un ou plusieurs critères des mises bas précédentes : nombre de mort-nés, d’écrasés, de fouilles, de mises bas longues ou difficiles ou encore de nés totaux. La réalisation de fouilles est davantage pratiquée chez les éleveurs « Pertes - » pour assister les truies (27 %). Ces éleveurs massent aussi les tétines des truies pendant la mise bas (65 %).
À la naissance, 85 % des éleveurs « Pertes - » aident manuellement les porcelets à respirer si nécessaire, via des massages thoraciques. Cette intervention est néanmoins assez rare, seulement 18 % des éleveurs estiment devoir souvent la pratiquer. Cette aide respiratoire est en lien avec la surveillance des mises bas selon l’historique de la truie. Les soins apportés aux porcelets (séchage, déplacement sous une source de chaleur, surveillance à la première tétée, confinement à la naissance, alimentation artificielle et aide aux porcelets chétifs) n’ont pas permis de discriminer les deux groupes. Certaines pratiques sont assez répandues avec une majorité d’éleveurs qui déplacent les porcelets ou distribuent un aliment sous la mère la première semaine, les deux tiers qui sèchent les porcelets à la naissance et qui ajustent la hauteur des lampes selon le comportement des porcelets et 61 % qui aident les porcelets chétifs à téter ou qui leur apportent du glucose, une pâte orale, du colostrum ou du lait. Concernant les interventions sur les porcelets, 86 % des éleveurs meulent les dents systématiquement à la naissance, 61 % décalent les interventions pour les petits porcelets, la moitié désinfecte le cordon ombilical et 44 % administrent un antibiotique. Seule la ligature du cordon ombilical en cas de saignement est plus souvent pratiquée par les « Pertes - » (52 %).
Les tétées fractionnées sur plus de deux portées par bande sont réalisées par 44 % des éleveurs « Pertes - ». Seulement deux éleveurs le font systématiquement sur toutes les portées. Elles sont mises en place lorsque les portées sont trop importantes, avec des porcelets de poids hétérogènes ou des surnuméraires.
Bien que l’ensemble des éleveurs ait recours à des adoptions intrabandes, la moitié des éleveurs réalisent aussi des adoptions interbandes. Les « Pertes - » sont plus nombreux à faire ce type d’adoptions (68 %). En revanche, les « Pertes + » réalisent d’avantage d’adoptions au-delà des 24 heures qui suivent la mise bas (44 %). Le sevrage précoce est pratiqué par la moitié des éleveurs, mais seulement 27 % le font à chaque bande. Il est fait majoritairement après 7 jours d’âge, avec les plus gros porcelets. Les « Pertes - » sont plus nombreux à avoir recours au sevrage précoce (65 %), en lien avec une nécessité de gestion de porcelets surnuméraires.
Les caractéristiques du bâtiment d’élevage et les équipements ressortent peu comme facteurs discriminants dans cette enquête, alors que les éleveurs identifient eux-mêmes le bâtiment comme point essentiel d’amélioration. C’est notamment le cas pour les nids à porcelets et les cages balances, deux équipements reconnus pour améliorer la survie des porcelets, mais qui sont sous représentés dans l’enquête.
thomas.lemoine@bretagne.chambagri.frFinancement : conseil régional de Bretagne et des Pays de la Loire, Comité régional porcin breton et Casdar PRDADéroulement : mémoire de fin d’étude de Bénédicte Houdouin, étudiante en master à l’ESA.Moins de 5 % de pertes sur nés vifs à l’EARL Saffray
Éleveurs à Amanlis en Ille-et-Vilaine, Bertrand et Martine Saffray limitent les pertes en maternité à 4,9 % sur les nés vivants en portant une attention particulière à l’état des truies, ainsi qu’à la vitalité et au confort des porcelets. À la tête d’un atelier naisseur engraisseur de 200 truies, ils sèvrent ainsi plus de 34 porcelets par truie et par an. Leur recette ? « On surveille, on est là ! Lors de la mise bas, le porcelet est placé sous le chauffage, côté mamelle. Si on constate que la truie s’est retournée, on met le chauffage et les porcelets de l’autre côté. C’est ça la surveillance », explique Martine.
La conduite alimentaire des truies est un point important. En maternité, les truies ont trois repas par jour. Pour Bertrand, l’apport d’eau est essentiel : « On veut qu’elles aient au moins 20 litres d’eau par jour". Une attention particulière est donnée aux porcelets. Martine n’hésite pas à traire le colostrum des truies pour en donner aux plus chétifs. Dès les premiers jours qui suivent les mises bas, une augette de lait artificiel et une autre contenant un mélange de tourbe et de 1er âge sont mises dans les cases. « La dernière semaine de mise bas, ils consomment pas mal d’aliments 1er âge. Grâce à cela, nous n’avons pas recours au sevrage précoce ou à des adoptions interbandes. » Le poids de portée moyen est de 100-115 kg à 28 jours, avec des poids de porcelets variant de 6 à 10 kg.
Les éleveurs portent également une attention particulière au confort des porcelets. « On veut qu’en partant le soir, ils soient tous sur les tapis », affirme Bertrand. L’hygiène constitue une priorité. Un douchage des truies, à l’eau tiède et au shampoing est réalisé avant l’entrée en maternité. Une purge des circuits d’eau est faite tous les jours ainsi qu’un nettoyage des abreuvoirs des porcelets. Un pédiluve dans le couloir central est présent avant l’accès aux maternités et changé quotidiennement. Les éleveurs portent une tenue spécifique à la partie gestante et à la maternité. Les fosses sur bac sont lavées et désinfectées entre chaque bande.