Le Gaec de la Baie des champs mise sur l’économie circulaire
FAF, vente directe, méthanisation… Dans la Vienne, Yves Debien et Éric Sabourin ont investi dans de nouvelles activités qui valorisent leur élevage de 200 truies.
FAF, vente directe, méthanisation… Dans la Vienne, Yves Debien et Éric Sabourin ont investi dans de nouvelles activités qui valorisent leur élevage de 200 truies.
« Avec le campus universitaire de Poitiers à 6 km de l’élevage et, l’hôpital à 7 km, il était impossible d’envisager le développement de notre exploitation par l’augmentation de la taille de notre atelier porcin », souligne avec lucidité Yves Debien, associé à Éric Sabournin, au Gaec de la Baie des champs à Sèvres-Anxaumont, dans la Vienne. Qu’à cela ne tienne, les idées n’ont pas manqué pour faire du développement autrement. Aujourd’hui, ce ne sont pas moins de cinq activités différentes qui ont été créées en parallèle à l’élevage de porc, toutes en lien plus ou moins direct. Aux côtés des 200 truies naisseur engraisseur, les exploitants ont progressivement augmenté les surfaces cultivables. Aujourd’hui, ils ont 340 hectares de cultures, qui servent bien sûr à approvisionner la FAF de l’élevage en matière première (maïs, blé, orge, avoine). « Le modèle céréales + porcs n’a jamais été aussi efficace qu’aujourd’hui. Grâce à lui, nous n’avons pas connu les crises des cultures de ces dernières années. Et nous maîtrisons notre coût alimentaire en limitant les achats extérieurs. » Les besoins protéiques sont en partie couverts par du tourteau de colza produit sur place. « Nous avons investi en Cuma dans une huilerie qui valorise notre production de graines de colza en huile, et qui nous procure un tourteau gras riche en protéines », détaille Yves Debien. De ce fait, le tourteau de soja non OGM n’entre qu’à hauteur de 5 % en moyenne dans les rations. Il n’est plus utilisé dans l’aliment de finition.
Un magasin de vente directe
Toujours dans l’optique d’augmenter la plus-value des productions, les deux éleveurs ont créé un magasin de vente directe de produits issus de l’élevage. Il est géré par Juliette Debien, la fille d’Yves. Quarante tonnes de porcs y sont vendues chaque année. Les animaux de l’élevage sont abattus chaque semaine à l’abattoir proche de Cooperl Saint-Maixent. Le magasin est ouvert au grand public les vendredis et samedis. Une partie des pièces nobles (jambons, longes, filets mignons) sont transformées en produits de charcuterie sèche. « Nous sommes dans la zone de production du jambon de Bayonne et de l’IGP porc du Sud-Ouest. Ces deux signes de qualité nous permettent d’ajouter de la plus-value à notre production, en complément du cahier des charges porc bien-être de la Cooperl », se félicite l’éleveur. Le magasin est aussi un puissant vecteur de communication. Des week-ends portes ouvertes sont l’occasion de faire découvrir l’élevage aux clients, qui comprennent ainsi qu’une production conventionnelle bien maîtrisée peut fournir des produits de qualité.
La méthanisation valorise le lisier
Il n’y a pas que la viande de porc à être valorisée au Gaec de la Baie des champs. Dernière activité en date, la méthanisation a vu le jour en 2016, avec la création d’une unité de 330 kW en cours de doublement. Outre le lisier, elle utilise de l’ensilage de cive (cultures intermédiaires à vocation énergétique), des résidus de cultures, des biodéchets alimentaires et des déchets d’industrie agroalimentaire, issus notamment de l’abattoir de Saint-Maixent. La chaleur produite par la cogénération sert à chauffer les bâtiments d’élevage, les maisons (notamment un château situé à proximité) et les serres maraîchères d’un agriculteur bio installé à proximité. 40 % du digestat liquide est épandu via le réseau d’irrigation. La fraction solide issue d’une séparation de phase est dirigée vers une plate-forme de compostage créée par les deux éleveurs en 2006. Elle valorise aussi les déchets verts des communes et des collectivités avoisinantes.
Une économie circulaire durable
L’ensemble des activités développées au Gaec de la Baie des champs autour de la production porcine correspond parfaitement à la notion d’économie circulaire, un concept économique qui s’inscrit dans le cadre du développement durable. Ce qui est considéré comme un déchet d’une activité est recyclé en matière première d’une autre activité, assurant ainsi leur pérennité. « Nos activités nous permettent aussi de vivre en bonne harmonie avec notre voisinage. Elles permettent aussi d’employer 11 salariés », détaille Yves Debien. L’éleveur ne se fait aucun souci dès qu’il aborde le sujet de la transmission de l’exploitation. « À partir du moment où elle dégage une bonne rentabilité et qu’elle a une bonne cohérence sociétale et environnementale, les jeunes ne peuvent qu’être intéressés », conclut-il.
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Le Gaec de la Baie des champs
L’outil Cooperl Saint-Maixent mise sur la qualité
L’abattoir de la Cooperl situé près de Poitiers est le plus gros outil d’abattage et de découpe de la région Nouvelle-Aquitaine. 16 500 porcs, 300 coches de réforme et 360 gros bovins y sont abattus chaque semaine. « Notre situation géographique excentrée par rapport à la principale zone de production du Grand Ouest, nous impose de miser sur une différenciation basée sur la qualité pour pérenniser notre activité », explique Didier Moulin, le directeur du site. Le ramassage des animaux s’effectue dans un rayon moyen de 160 km autour de l’abattoir. Il est délimité au nord par la Loire, à l’est par la région tourangelle, au sud par la ville d’Angoulême et à l’ouest par l’océan. « Le surcoût logistique induit par ce grand périmètre n’est pas rédhibitoire si la production est bien valorisée », explique-t-il. En complément des productions constituant le socle de base de la coopérative (Le porc français, porc sans antibiotique, nourri sans OGM et filière qualité carrefour), l’abattoir bénéficie de l’IGP jambon de Bayonne et de sa déclinaison IGP porc du Sud-Ouest qui valorise l’ensemble de la carcasse. Il se démarque également de ses deux homologues bretons par une production importante de porcs BBC (bleu blanc cœur) et bio. Au total, pas moins de 6 000 porcs par semaine bénéficient de ces signes de qualité. « Cette différenciation nous permet d’aborder de nouveaux marchés », se félicite Didier Moulin, qui a piloté successivement la mise en place des normes Iso 9001 (norme internationale de management de la qualité), l’Iso 50001 (amélioration de la performance énergétique), IFS Food qui permet de travailler en marques distributrices et BRC food, un référentiel britannique permettant de valoriser des pièces de découpe en Grande-Bretagne. Le référentiel USDA est le dernier certificat obtenu par l’abattoir en 2017. Il autorise désormais l’accès des produits de Saint-Maixent-l’École au marché lucratif nord-américain, « un marché premium sensibilisé aux notions d’antibiorésistance et non OGM notamment », conclut Didier Moulin.