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La démédication, une prise de risque payante en élevage de porcs

Accompagnés de leur vétérinaire et de leur technicien, six éleveurs du groupement Agrial ont réduit leur utilisation d’antibiotiques. Résultats : des performances technico-économiques stables voire en hausse et un sentiment de réussite.

« Tous les matins, j’avais peur d’entrer dans mes engraissements car si les antibiotiques ne faisaient plus d’effet je n’avais pas d’autres solutions… », « l’antibiorésistance se mettait en place, il fallait changer sans cesse d’antibiotiques et en mettre encore plus ! On voulait arrêter ça ! ». Autant de motivations qui ont poussé six éleveurs d’Agrial à essayer de démédiquer totalement leur élevage. Accompagnés par leur vétérinaire et leur technicien de groupement, ils ont réussi à réduire leur fortement leur usage d’antibiotiques (-91 % en post-sevrage) tout en améliorant leurs performances technico-économiques de leur élevage. Ces résultats ont été obtenus en suivant les élevages pendant plusieurs années et en comparant leurs dépenses de santé et leurs performances techniques avant, pendant et après la mise en place des mesures correctives. Ces mesures ont consisté à faire appel à des traitements alternatifs (vaccination, homéopathie), mais aussi à des mesures de biosécurité, de réduction du chargement et d’amélioration des bâtiments.

Plus de dépenses en vaccins mais beaucoup moins d’antibiotiques

Parmi les six élevages, trois sont des naisseurs-engraisseurs. En moyenne, leurs dépenses en vaccins ont augmenté de 16 euros par truie présente pendant la mise en place des mesures. Cette augmentation a été plus que compensée par la diminution des dépenses en antibiotiques de 27 euros par truie présente. Les dépenses en antibiotiques ont constamment diminué au cours des périodes étudiées : dans un premier temps par l’arrêt de supplémentation médicamenteuse dans l’aliment ; puis par la diminution d’achats en antibiotiques injectables et par administration par l’eau de boisson. Des traitements homéopathiques ont été mis en place. Leurs dépenses ont progressivement augmenté. Mais elles restent très inférieures à celles en vaccins. À la fin de la période étudiée, les éleveurs dépensent autant en homéopathie qu’en antibiotiques. Afin d’avoir un regard plus global sur la fiabilité technico-économique de l’élevage, les marges standardisées ont été calculées. Elles ont augmenté dès la mise en place des mesures puis se sont stabilisées. En prenant en compte les dépenses liées à l’achat de produits vétérinaires, les résultats montrent une augmentation progressive de cette marge de 54 euros par truie présente et par an pour les naisseurs-engraisseurs !

Des résultats technico-économiques équivalents

De leur côté, les trois éleveurs post-sevreurs engraisseurs engagés dans cette démarche de démédication ont réduit leurs dépenses en antibiotiques de 88 %, soit un gain de 0,60 euro par porc produit. Celles en vaccins ont d’abord augmenté, puis elles ont diminué pour être inférieures aux dépenses initiales (- 0,26 € par porc produit). Les dépenses en traitements homéopathiques sont passées de 0 euro à 1,08 euro par porc produit. La marge standardisée des élevages a d’abord augmenté puis diminuée. Au final, en incluant les dépenses de santé, les éleveurs ont gagné 0,21 euro par porc produit.

Côté Web

Retrouvez les résultats par élevages sur le site http://biosecurite.ifip.asso.fr ainsi que des vidéos témoignages de ces éleveurs.

 

Repères

Les mesures mises en place pour réduire l’antibiothérapie

Trente et une mesures au total ont été mises en place sur les six élevages pour réduire l’utilisation des antibiotiques. Elles se répartissent selon huit catégories :

L’utilisation de traitements homéopathiques en usage ponctuel ou systématique (9 mesures sur tous les élevages) ;
La mise en place de vaccins, quatre sur les porcelets au sevrage (vaccinations PCV2 et pour des problèmes digestifs) et un sur les truies (vaccination contre la rhinite) (5) ;
L’amélioration de la biosécurité externe et interne (5) ;
Les modifications ou rénovations de bâtiments d’élevage ou des équipements impactant l’ambiance des salles (4) ;
La réduction d’effectif (truies ou ventes de porcelets) afin de réduire la surcharge d’animaux (3) ;
L’amélioration de la qualité de l’eau (2) ;
L’utilisation de traitements métaphylactiques par pompe doseuse à la place de traitements par antibiotiques systématiques (2) ;
Un changement de formulation d’aliment pour un aliment 1er âge.

La moitié des élevages ont mis plus de sept mesures en place réparties dans plusieurs catégories, diversifiant ainsi leurs leviers d’actions sur le pilotage de la santé. Les trois autres élevages ont mis trois mesures ou moins en place, ciblant une ou deux catégories.

Une baisse très marquée d’antibiotiques en post-sevrage

L’utilisation d’antibiotiques a fortement baissé en post-sevrage. Le travail réalisé a permis très rapidement d’y réduire de 91 % le nombre de jours de traitements. Pour les autres catégories d’animaux l’utilisation d’antibiotiques augmente dans un premier temps, puis décroît fortement. En revanche, pour les porcs en engraissement, les porcelets sous la mère et les truies, les usages d’antibiotiques augmentent dans un premier temps de 50 % voire trois fois plus ! Ce n’est qu’une fois les nouvelles mesures installées dans l’élevage que la consommation d’antibiotiques diminue. En comparant la situation avant et après, elle baisse de 57 % en engraissement et de 48 % pour les truies. C’est donc la patience et la persévérance des éleveurs, vétérinaires et techniciens qui a permis cette réussite !

 

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