Comment déposer du gras sur les porcs mâles entiers ?
Des courbes alimentaires libérales testées en engraissement à la ferme expérimentale porcine des Trinottières ont favorisé le dépôt de gras sur des carcasses de porcs mâles entiers Piétrain et Duroc.
Des courbes alimentaires libérales testées en engraissement à la ferme expérimentale porcine des Trinottières ont favorisé le dépôt de gras sur des carcasses de porcs mâles entiers Piétrain et Duroc.
La viande de porc mâle entier contient une quantité de gras plus faible que celle de mâles castrés ou de femelles, ce qui la rend moins adaptée à la charcuterie sèche comme le jambon sec par exemple.
Les hormones sexuelles sécrétées par ces animaux réduisent leur appétit, notamment en fin d’engraissement. Les nourrir avec des régimes alimentaires adaptés pour maximiser l’ingestion permet cependant d’orienter leur métabolisme vers davantage de dépôt de gras.
Lire aussi Porcs mâles entiers, castrés ou vaccinés, quel choix pour les filières ?
C’est ce que la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire a démontré à la ferme expérimentale porcine des Trinottières avec des plans d’alimentation généreux sur la phase d’engraissement, des rations à base de maïs et une alimentation en quatre phases distribuée sous forme humide.
Un protocole d’essai a été réalisé pour comparer les résultats de deux types génétiques Duroc (Danbred et Talent Topigs Norsvin) à un Piétrain.
Les issus mâles entiers Duroc Danbred à 13,5 mm de G2
Grâce au plan d’alimentation poussé, les mâles entiers issus du Duroc Danbred obtiennent un GMQ moyen de 967 grammes par jour, supérieur de 46 grammes par jour à celui des mâles entiers issus de Piétrain. À noter que les indices de consommation des issus de Duroc Danbred sont aussi meilleurs (2,55 contre 2,68, mâles et femelles confondus). Grâce à ces performances, les poids de départ à l’abattoir des mâles entiers issus de Duroc Danbred sont plus élevés (123,7 kg contre 120,5 kg pour les mâles entiers issus de Piétrain). Cependant, les poids chauds des carcasses ne sont pas significativement différents (respectivement 96,4 kg et 95,1 kg). Les classements de carcasses des deux types génétiques sont identiques (TMP de 60,3 pour les issus mâles entiers Danbred et 60,7 pour les issus mâles entier Piétrain). Pour les issus Danbred, ces résultats sont obtenus avec une épaisseur de gras (G2) légèrement inférieure à celle des issus Piétrain (13,5 mm contre 14,0 mm). Les carcasses présentant des odeurs de mâle entier (notes 4 et 5 de la grille Sanmalo élaborée par Uniporc) ne dépassent pas les 5 % quel que soit le type génétique (1,7 % pour les issus Piétrain, 4,1 % pour les issus Duroc Danbred). À noter que les carcasses ayant une note 3 (petite odeur de mâle entier non déplaisante) n’ont pas été comptabilisées dans les malodorants.
Un TMP de 61 pour les issus mâles entiers Duroc Talent
Les mâles entiers Duroc Talent ont tendance à mieux croître que les mâles Piétrain en engraissement : 981 grammes par jour contre 949 grammes par jour (+32 g/j), rejoignant ainsi la tendance constatée pour les issus mâles entiers Duroc Danbred. Cependant, les poids de départ sont identiques (126,6 et 126,3 kg vif). Égalité parfaite également pour les (poids de carcasse à 98,3-98,4 kg chaud), et le TMP (61,0 pour les issus mâles entiers Duroc Talent et 60,7 pour les issus mâles entiers Piétrain). Dans cet essai comparatif, les carcasses dégageant des odeurs de mâle entier représentent également moins de 5 % de chaque échantillon. 3,4 % des carcasses de mâles issus de Duroc Talent sont classées malodorantes (notes 4 et 5) et 2,2 % pour celles des mâles Piétrain.
Aude Dubois, aude.dubois@pl.chambagri.fr
890 porcs testés aux Trinottières
Quatre bandes de 210 à 240 porcs charcutiers ont été suivies de septembre 2022 à juillet 2023 à la ferme expérimentale des Trinottières dans les Pays de la Loire. Ces porcs sont issus du troupeau conventionnel de 120 truies Large-White x Landrace français de l’élevage. Chacune des quatre bandes de truies a été divisée en deux lots homogènes en rang de portée moyen : deux bandes ont été inséminées en Piétrain ou en Duroc Danbred et deux autres bandes ont été inséminées en Piétrain ou Duroc Talent de Topigs Norsvin. Les porcs d’une même génétique de verrat terminal ont été allotés en fonction du poids et élevés en cases mixtes dès le sevrage à quatre semaines d’âge. Ils ont été nourris à la soupe dès leur entrée en engraissement en appliquant une courbe d’alimentation « en cloche » : le plafond d’alimentation atteint son maximum à 28 mégajoules d’énergie nette (MJ EN) par jour entre 80 et 87 kg de poids vif. Il diminue ensuite pour revenir à 26,5 MJ de 102 kg de poids vif jusqu’à la sortie des porcs. Du sevrage à la vente, les porcs ont été pesés régulièrement et leurs consommations d’aliment ont été collectées. Les porcs ont été abattus à l’abattoir Holvia de Laval, en Mayenne. Les notations d’odeurs des carcasses de mâles entiers ont été réalisées selon la méthode Sanmalo mise au point par Uniporc.
Avis d’expert - Aude Dubois, Chambre d’agriculture des Pays de la Loire
« Une stratégie adaptée aux productions de qualité »
« Sur un précédent essai mené en 2015 avec un plan d’alimentation plus rationné, les épaisseurs de gras (G2) des mâles entiers Piétrain s’établissaient autour de 12,2 mm. Avec le plan d’alimentation libéral testé aux Trinottières, les porcs mâles entiers déposent plus de gras, quel que soit le type génétique : on atteint des épaisseurs G2 autour de 14 mm, notamment pour les issus de Piétrain, sans dégrader les notes d’odeurs des carcasses. Les épaisseurs de gras rejoignent celles obtenues avec les mâles castrés issus des mêmes types génétiques lors de l’étude Duroc - Piétrain (2020-2021) également réalisée aux Trinottières. La conduite alimentaire des porcs mâles entiers apparaît donc comme une stratégie à explorer pour orienter la composition des carcasses dans le cadre de production de qualité où la couverture de gras sous cutanée est recherchée. »