Un élevage adapté au territoire Wallon
Jean Devillers est vétérinaire et éleveur ovin et bovin en Wallonie. Grâce à des investissements raisonnés et à une bonne organisation du travail, il a su s’adapter à son territoire.
Jean Devillers est éleveur à Marchin en Wallonie. Avant de s’installer, il a suivi une formation vétérinaire et s’est rapidement spécialisé face au déficit de praticiens à même de traiter les problèmes des ovins. Il est installé sur une exploitation de 310 hectares mais les terres sont morcelées car la Belgique est un pays fortement urbanisé. Jean Devillers a eu son premier mouton quand il était au lycée et l’élevage ovin est rapidement devenu une passion. Il s’est installé définitivement à Marchin en 1977 avec des Texel culards type hollandais et construit sa première bergerie en 1982. Il achète par la même occasion 50 brebis Île de France sélectionnées par l’Upra française.
En ayant les deux races, l’objectif était de produire des agneaux toute l’année. Il a augmenté ses effectifs petit à petit tout en menant de front son activité de vétérinaire. Il a rapidement eu une grosse clientèle en élevage ovin. À la fin des années quatre-vingt, il a décidé d’abandonner l’élevage de Texel car les mises bas demandaient trop de travail et il était difficile de laisser cette race en herbage ; agneaux et brebis devaient être élevés uniquement en bergerie. Il a donc gardé seulement la race Île de France.
Ovin et bovin pour une meilleure complémentarité
Il a aussi acquis de la surface petit à petit en achetant les terrains des exploitations qui disparaissaient. Parallèlement, il débute son élevage de bovins de race Blanc bleu belge en 1987. "Il y a une grande complémentarité entre les deux types d’élevages, estime-t-il, tant au niveau de la gestion des surfaces herbagères que des finances". Les bovins demandent en effet un fort investissement mais sont moins gourmands en temps de travail alors que les ovins demandent plus de travail mais moins de capitaux.
Avec 180 hectares de grandes cultures (blé, escourgeon, épeautre, colza, mais ensilage, betterave…) et 180 hectares en pâture, l’exploitation est presque totalement autonome pour alimenter les ovins et les bovins. Les exploitants achètent tout de même de l’herbe afin de compléter l’alimentation. Il y a cinq unités de main-d’œuvre sur l’exploitation, ce qui permet de lisser la demande en travail. Paulette, la femme de Jean, se charge principalement de la surveillance du troupeau et des mises bas pour les ovins. Benoît, le fils aîné, se charge de la gestion des cultures et a repris une ancienne Cuma. Damien s’occupe des fourrages et la fabrication des aliments qui sont transformés et formulés à la ferme. Vincent, le dernier fils, n’est pas encore officiellement installé mais il travaille un peu sur tous les ateliers.
Des bergeries sommaires, pas de constructions luxueuses
Jean s’occupe principalement des vêlages des bovins qui demandent un certain travail puisque la Blanc bleu belge ne met pas bas toute seule. Il faut en effet obligatoirement faire une césarienne. Lors de la période des naissances, des sondes mesurent automatiquement la température interne de l’animal et avertissent Jean à l’arrivée d’une mise bas. Il peut alors intervenir et pratiquer la césarienne avant que le vêlage ne commence de manière naturelle. Sur l’exploitation, travaille aussi Marie-Thérèse qui avait auparavant une petite ferme qui a été rachetée par Jean Devillers. Elle nourrit les veaux matin et soir.
Les brebis sont logées dans une bergerie « sommaire ». En s’installant, Jean Devillers a veillé à ne pas s’endetter ni a faire des investissements « plus gros que nos capacités » avec des constructions « luxueuses ». Il y a donc deux bergeries de 40 mètres sur 12 : une dédiée à l’engraissement et l’autre aux mises bas. Chez Marie-Thérèse, 120 brebis sont aussi logées dans une autre bergerie qui est dédiée aux agnelles de renouvellement ou en gestation. Les bovins sont en partie logés sur place dans des bâtiments attenants à l’exploitation et dans une ancienne étable louée à une ancienne exploitation laitière. Les taureaux sont engraissés dans un bâtiment acheté en partenariat avec un autre agriculteur voisin, à 10 kilomètres du village.
Des mises bas tous les deux mois
Le troupeau ovin est conduit en six périodes d’agnelage avec des montes naturelles. Il y a 120 brebis pour trois ou quatre béliers. Il y a donc des agnelages tous les deux mois, avec à chaque fois 120 brebis. Chaque brebis agnelle donc tous les 10 mois environ et allaite pendant environ 80 jours. Les agneaux sont ensuite sevrés et mis en pâtures. Si l’élevage est principalement mené en race pure île de France, Jean Devillers a décidé cette année d’acheter des béliers charollais pour saillir les agnelles afin de faciliter les agnelages et avoir des agneaux plus intéressant pour les boucheries. La prolificité des brebis est de plus de deux mais l’éleveur ne fait pas "la chasse à la prolifcité" parce qu’il estime que "les agneaux élevés au biberon coûtent trop chers et sont trop demandeurs en travail".
Jean Devillers gère depuis trois ans un groupement avec trois autres éleveurs ovins. Avec ces producteurs, ils ramassent les agneaux de quatre à cinq autres élevages et ils les livrent à l’abattoir d’Aubel 15 à 20 agneaux par semaine. En Belgique, il y a très eu d’organisation de filière et ce groupement permet aux éleveurs de coopérer et de livrer à l’abattoir une production régulière. Le prix de base pour ces agneaux est de six euros net par kilos. Avec les frais d’abattage et de commercialisation, cela revient à 5 euros le kilo pour les éleveurs.
La Blanc bleu belge, une race iconique de la Belgique
La race Blanc bleu est la première race bovine belge. En France, elle est présente aujourd’hui dans plus de 25 départements. La Blanc bleu est une race à viande ayant la particularité d’avoir un développement musculaire exceptionnel dû à la présence du gène culard. Son grand format et le développement de sa musculature la destinent au croisement industriel, par l’utilisation de taureaux blanc bleu sur des vaches laitières ou sur d’autres races allaitantes. La Blanc bleu est apparue dans le Hainaut, des deux côtés de la frontière franco-belge. La race est issue de croisements de populations locales avec la Durham anglaise.