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S’adapter et atténuer le changement climatique en élevage ovin

Pour leur vingtième anniversaire, les Assises ovines des Pyrénées-Atlantiques ont délibérément voulu se tourner vers l’avenir en construisant un programme d’intervention autour des leviers d’adaptation au changement climatique pour les producteurs.

<em class="placeholder">Brebis à l&#039;ombre d&#039;un bosquet d&#039;arbustes</em>
Une brebis émet 984 kg équivalent CO2 : 47 % provenant de sa fermentation entérique, 23 % de la gestion des effluents, 18 % de l’achat d’aliments (fabrication, transport).
© B. Morel

En octobre dernier, à Ahaxe, débats et interventions ont tourné autour des adaptations de l’élevage ovin face au changement climatique. Aux 20es Assises ovines des Pyrénées-Atlantiques, chambres d’agriculture départementales des Pyrénées-Atlantiques et de l’Aveyron, le Centre département d’élevage ovin (CDEO), la Fédération régionale des groupements de défense sanitaire (FRGDS) d’Occitanie et l’Interprofession lait de brebis des Pyrénées-Atlantiques ont développé des pistes de travail pour composer avec l’enjeu du siècle, qui impacte déjà les exploitations ovines de l’Hexagone.

Adapter la bergerie

<em class="placeholder">Fabien Pingitore, de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques</em>
Fabien Pingitore, chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques : « Il vaut mieux que les animaux soient dehors, si possible à l’ombre plutôt qu’à l’intérieur en cas de forte chaleur et taux d’humidité élevé. » © A. Dazet
L’étude Batcool en ovins viande lait et caprins a observé une soixante de bâtiments, en Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d’Azur. En Aveyron comme dans les Pyrénées, les bâtiments ont été conçus pour protéger les animaux du froid en hiver. Dorénavant les animaux sont susceptibles d’être en bergerie dès 26 °C et 90 % d’humidité, le bâtiment est donc à concevoir en tenant compte du réchauffement climatique.

Si les animaux sont agglutinés, debout, et montrent des signes de halètement, il est évident qu’ils souffrent de stress thermique. Le plus souvent, ils se concentrent à l’endroit le plus ventilé et le moins chaud du bâtiment.

« Ce stress qui dépend autant de la température que de l’humidité a des conséquences sur la production laitière, la fertilité, l’ingestion de fourrage ou encore la croissance, énumère Fabien Pingitore, de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques. Il convient donc de baisser le chargement, de ventiler dès 25 °C en ouvrant les portes et/ou les trappes, en descendant les filets brise-vent, de réduire le rayonnement direct et indirect, en blanchissant ou obstruant les plaques éclairantes. »

En dernier recours, il est envisageable d’installer une ventilation mécanique, voire dans les zones les plus méridionales une brumisation qui n’est pas forcément bénéfique si elle n’est pas associée à une bonne ventilation. Et bien sûr, lors de la construction d’un bâtiment d’élevage, il faut à tout prix éviter l’orientation sud-ouest.

Fabien Pingitore conclut : « Il vaut mieux que les animaux soient dehors, si possible à l’ombre plutôt qu’à l’intérieur en cas de forte chaleur et taux d’humidité élevé. »

Préserver la santé et la reproduction

<em class="placeholder">Christophe Lacz (FRGDS Occitanie) et Corinne Vial-Novella (CDEO)</em>
Christophe Lacz (FRGDS Occitanie) et Corinne Vial-Novella (CDEO) : « Les ovins sont rapidement impactés par une augmentation de la température, et ce, d’autant plus que l’hygrométrie augmente, créant par là même un stress thermique. » © A. Dazet
Le confort thermique de la brebis se situe entre -8 °C et 23 °C et dépend des conditions extérieures. Les ovins sont rapidement impactés par une augmentation de la température et ce d’autant plus que l’hygrométrie augmente, créant par là même un stress thermique. L’animal va mettre en place des mesures pour maintenir sa température corporelle (fréquence respiratoire et cardiaque, circulation sanguine, limitation des mouvements et des dépenses énergétiques…) qui vont entraîner des conséquences sur la reproduction, l’alimentation, le comportement, la production et le sanitaire, tout étant en interrelation.

Coté reproduction, les

chaleurs

sont moins marquées et la

qualité des gamètes

(spermatozoïdes et dans une moindre mesure ovocytes également) est altérée ce qui impacte les chances de fécondation. « 

La gestation ayant démarré, le stress thermique peut induire un échec d’implantation embryonnaire, un retard de croissance des fœtus et un avortement

, expliquent Christophe Lacz (FRGDS Occitanie) et Corinne Vial-Novella (CDEO).

Sous stress thermique, les animaux vont avoir tendance à diminuer leur ingestion, leurs temps de rumination et limiter les temps de couchage. Les risques d’acidose et l’impact sur le système immunitaire sont alors plus prégnants.

 »

Il existe des solutions pour limiter l’impact de ce stress : tonte des animaux, aménagement de leur environnement (ombre, air, multiplication des points d’abreuvement, distribution des rations aux heures les plus fraîches, apport de vitamines et minéraux…), privilégier les races résistantes et résilientes (sélection génétique en cours), privilégier l’insémination artificielle lors de doute sur la fertilité des mâles en élevage.

« Si l’augmentation des températures est néfaste pour les ovins, elle est en revanche propice au développement des parasites, tels que les strongles gastro-intestinaux et des vecteurs de la FCO, MHE, SBV, fièvre de la vallée du Rift, Crimée Congo, Encéphalite à tiques etc. », alerte Christophe Lacz.

Ajuster le système fourrager

<em class="placeholder">Marie-Claude Mareaux, Carole Versavaud (CA 64) et Felix Aguer (coopérative Mendikoa) </em>
Marie-Claude Mareaux, Carole Versavaud (CA 64) et Felix Aguer (coopérative Mendikoa) : « Aucune année ne se ressemble, l’exceptionnel devient la norme. » © A. Dazet
L’augmentation du CO2 et des températures favorisent et avancent la pousse de l’herbe. Les épisodes hydriques de plus en plus extrêmes et les périodes de gel raccourcies induisent des variations saisonnières importantes et des pressions des ravageurs accrues. Si la matière sèche globale annuelle augmente, il faut pouvoir la valoriser et qu’elle corresponde aux besoins des animaux.

Le plus évident est d’étendre le pâturage en début et en arrière de saison, tout en préservant la résilience et la portance des prairies. Pour cela, il est conseillé de favoriser les prairies multi-espèces, le pâturage tournant qui facilite la capacité de reprise de la prairie, voire l’affouragement en vert. Puis en jonglant avec les fenêtres météo pour procéder à des fauches précoces et récolter du fourrage sec ou humide selon ce que permettent les conditions.

Enfin, l’implantation de haies et la pratique de l’agroforesterie intra-parcellaire, qui constituent à la fois une technique de préservation de l’herbe en cas de forte sécheresse et une ressource fourragère potentielle, ne seront pas à négliger dans certaines régions. Il conviendra probablement aussi d’adapter les périodes de lactation à la disponibilité fourragère. « Aucune année ne se ressemble, l’exceptionnel devient la norme », constate Carole Versavaud, de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques.

Réduire l’empreinte carbone

<em class="placeholder">Morgane Le Floch (CDEO) et Jean Bedou (CA 64)</em>
Morgane Le Floch (CDEO) et Jean Bedou (CA 64) : « Certains leviers d'atténuation de l'empreinte carbone sont même économiquement rentables à l'échelle de l'exploitation. » © A. Dazet
Différents leviers sont activables pour réduire l’empreinte carbone des élevages ovins. Des stratégies à moyen ou long terme peuvent être instaurées : augmenter l’autonomie fourragère par le développement des prairies et des estives, s’approvisionner localement, optimiser les concentrés. Plus rapidement, on peut couvrir la fosse de stockage des effluents, réformer les brebis improductives, améliorer la productivité par animal…

Au niveau des surfaces, il est conseillé d’optimiser la fertilisation, d’introduire des légumineuses, d’implanter des haies, de pratiquer l’agroforesterie. Certains de ces leviers sont même économiquement rentables : rationaliser les concentrés et conserver la même production laitière, implanter des couverts hivernaux permet de réduire la fertilisation minérale.

« L’élevage doit participer, à sa mesure, conjointement aux autres acteurs, à l’effort d’atténuation et à la réduction des émissions », avertit Jean Bedou, de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques.

Source : Citepa 2023.

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