« Nous faisons pâturer nos brebis pour un lait abondant et économe »
À Flavin dans la région aveyronnaise du Lévézou, la famille Acquier élève des brebis laitières en race lacaune pour la filière AOP Roquefort, en système dit tardif.
Trois exploitants et un salarié à temps plein sont rémunérés par les 630 brebis laitières du Gaec de La Draille. Cédric Acquier est associé avec sa mère, Joëlle et son épouse Florence sur l’exploitation située à Flavin, au sud de Rodez, dans l’Aveyron. « Nous sommes passés en système tardif sur demande de notre laiterie Société, pour mieux étaler la collecte qui souffrait d’un pic important en début d’année. »
Ainsi, depuis dix ans, la traite commence mi-février et se termine vers le 15 octobre. « La majorité du lait est produite alors que les brebis pâturent. » Les éleveurs pratiquent un pâturage tournant, s’adaptant à la météo et à la pousse de l’herbe. « Nos parcelles font entre sept et neuf hectares. Nous les découpons en deux et conduisons le pâturage en fil avant et arrière. »Pas de rupture du pâturage grâce à des cultures dérobées
Il faut dire que le Gaec de la Draille est particulièrement bien adapté au pâturage avec 85 hectares autour des bergeries, irrigables grâce à un lac. La surface agricole utilisée totale compte 105 hectares, dont 25 hectares de céréales, 40 de luzerne pure, 32 de ray-grass (en mélange avec du trèfle ou de la chicorée) et le reste en prairies naturelles, surtout réservées aux agnelles. « Les brebis sont mises à l’herbe à partir du 15 mars dans les ray-grass où elles passent tout le printemps. Tous les ans je sème un sorgho dans une parcelle de sept à huit hectares de ray-grass de dix-huit mois pour le pâturage d’été. Il est implanté en trois bandes avec dix jours d’intervalle. »
Essentiellement pâturées, les prairies de graminées sont aussi en partie exploitées en enrubannage. La luzerne irriguée est essentiellement destinée au stock avec trois coupes de foin, sauf une parcelle de 7 hectares portant une luzerne de cinq ans qui sert de pâturage en été et à l’automne. « Lorsque les brebis pâturent la luzerne ou des prairies avec une dominance de trèfle, nous leur distribuons de l’huile de paraffine au moment de la traite. »Derrière une parcelle d’orge, proche de la bergerie, les exploitants implantent habituellement un couvert de céréales et colza qui sera pâturé à l’automne. Après la période de tarissement en octobre, où les brebis restent trois semaines dedans, elles ressortent dans les ray-grass nouveaux ou la luzerne.
Du maïs en plus du pâturage
La ration des brebis évolue en fonction du stade physiologique et de la mise à l’herbe. « Plus les brebis pâturent moins on complémente en matière azotée totale. En revanche, on cherche à maintenir l’énergie. C’est pourquoi nous avons récemment testé d’intégrer du maïs grain à la ration à raison de 200 grammes pendant un mois. »
Lors de la mise à la lutte, les brebis consomment de l’enrubannage d’herbe et un concentré adapté. Les agnelles reçoivent de l’enrubannage de méteil réalisé avant l’implantation d’une luzerne en mai.Sur une campagne, le Gaec de la Draille achète environ 170 tonnes d’aliments, soit un peu plus de 200 kilos par brebis, et échange 130 tonnes de céréales. Environ 20 tonnes de céréales sont conservées en autoconsommation pour les agnelles et les brebis en fin de lutte.
Le pâturage a augmenté la production
« Le passage en système tardif nous a permis de produire du lait de pâturage. Néanmoins cela ne nous a pas fait économiser de l’aliment car – les brebis sortant au moment du pic de lactation – nous ne pouvons pas risquer de diminuer la ration. En revanche la quantité de lait par brebis a significativement augmenté. »
Nathalie Rivemale, référente technico-économique au service Élevage de la Confédération générale de roquefort
La maîtrise du coût de production avec le contrôle laitier
« Le Gaec de la Draille fait partie d’un groupe d’éleveurs, souhaitant connaître le coût de production de leur atelier ovin lait et échanger entre eux autour de cette thématique, sur la zone centre Aveyron.
Le Gaec se différencie par ses dates de traite tardives et par son système d’alimentation essentiellement basé sur du foin traditionnel, alors que beaucoup d’éleveurs ensilent ou pratiquent du séchage en grange.
Un système simple et rémunérateur
Il est assez remarquable que, malgré un système assez simple, l’atelier ovin lait permet de rémunérer quasiment quatre unités de main-d’œuvre (3,9) à hauteur de 1,84 Smic en 2022, avec un prix du lait à 960 euros les 1 000 litres.
Cette performance s’explique par une excellente productivité accompagnée d’une maîtrise de nombreux postes de charge, comme l’approvisionnement des surfaces et la mécanisation notamment. En 2022, le coût de production, rémunération du travail comprise, s’élève à 1 568 euros les 1 000 litres.
Le premier poste de charge est la rémunération du travail qui occupe 35 % du coût de production total, le deuxième est l’alimentation avec 16 % du coût de production total, hors prise en compte de l’échange de céréales considéré comme un produit, suivi de très près par la mécanisation. »