Marc Humeau cale sa conduite sur la pousse de l’herbe
Pour produire des agneaux en fin d’année, Marc Humeau retarde les luttes pour mieux valoriser l’herbe de printemps et gagner en autonomie.
Pour produire des agneaux en fin d’année, Marc Humeau retarde les luttes pour mieux valoriser l’herbe de printemps et gagner en autonomie.

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



Engagé dans la démarche Agneau d’Anvial de Terrena, qui garantit une viande riche en oméga-3, Marc Humeau s’est spécialisé en 2016 dans la production d’agneaux pour le quatrième trimestre. « En Agneau d’Anvial, volumes et prix sont contractualisés, explique-t-il. Mais pour qu’une démarche qualité fonctionne, il faut fournir des agneaux toute l’année. J’utilise du Texel en croisement car c’est une race qui se stocke bien sur pied ; on peut accélérer ou freiner sa croissance en rationnant plus ou moins les agneaux. Comme en plus j’ai de la place en bâtiment pour l’engraissement, j’ai décidé de me concentrer sur la production d’agneaux pour le dernier trimestre de l’année en retardant les agnelages. »
Installé en ovin en 2010 à La Pommeraye dans le Maine-et-Loire, après avoir travaillé en Gaec pendant 12 ans, Marc Humeau dispose de 60 ha de terres argilo-limoneuses sur schistes, peu profondes et séchantes, pour 430 brebis. À part parfois 3 à 4 ha de céréales autoconsommées, toute la surface est en herbe, avec 25 ha de prairies temporaires, 25 ha de prairies naturelles sur coteaux et 10 ha de prés inondables. « Le cahier des charges de l’Agneau d’Anvial implique un engraissement des agneaux pendant au moins 50 jours avec un aliment enrichi en graines de lin, qui permet de garantir la richesse de la viande en oméga-3, précise l’éleveur. Mais pour les brebis, mon objectif est d’être complètement autonome au niveau fourrager et le plus possible au niveau des protéines en valorisant au mieux l’herbe. Tous les agnelages se font dehors et sont regroupés d’avril à mi-mai, ce qui permet de faire la fin de gestation et la lactation à l’herbe et de valoriser l’herbe de printemps. Les prairies temporaires sont irriguées et, les bonnes années, je peux nourrir 500 brebis. Mais les années de sécheresse, je préfère vendre des bêtes plutôt que d’acheter du fourrage. »
Lutte naturelle d’octobre à décembre
Pour faciliter la conduite, l’éleveur a fait le choix d’une race herbagère et rustique, un croisement entre Mules et Texel, qu’il recroise avec des béliers texel Hollandais. « La Mule est herbagère, prolifique et très maternelle et donc très adaptée à ma conduite. Le Texel apporte de la conformation et une viande claire. La croissance des agneaux est assez lente et facile à réguler sans dégrader la qualité de carcasse. » Toutes les agnelles sont achetées à un seul élevage en Écosse. « Cela permet d’avoir des lots d’agnelles homogènes et de qualité. Je les achète entre 125 et 135 euros par agnelle selon la parité euro-livre, tondue, vaccinée et livrée, alors que je vends mes agneaux à 140 euros par tête en moyenne. » La lutte a lieu d’octobre à décembre, sur un ou deux cycles. « En 2016 et 2017, je n’ai fait qu’un lot et tous les agnelages étaient regroupés sur trois semaines. Cela représente beaucoup de travail et je suis seul sur l’exploitation, avec parfois un stagiaire. En 2018, j’ai donc fait deux lots qui ont agnelé chacun sur trois semaines d’avril à juin. »
Tous les agnelages ont lieu dehors. Depuis deux ans, suite à la multiplication des attaques de renard, Marc Humeau rentre toutefois les agneaux avec leur mère les 10 premiers jours. Pour ne pas changer l’alimentation des brebis sur cette période, il s’est équipé d’une récolteuse d’herbe d’occasion qui permet de faire de l’affouragement en vert. Brebis et agneaux restent ensuite dehors, sans complémentation en général, jusqu’au sevrage des agneaux à 80-100 jours, vers mi-juillet mi-août. Si l’herbe manque, les brebis reçoivent de l’enrubannage en fin de lactation. Puis, les agneaux sont rentrés pour l’engraissement. Selon le volume d’herbe, une partie des brebis reçoit alors du foin.
Des prairies temporaires diversifiées et irriguées
Les prairies temporaires sont composées d’un mélange de dactyle, ray-grass anglais, légumineuses (lotier, trèfle blanc, trèfle violet, luzerne), chicorée et colza fourrager. « Le dactyle pousse jusqu’à 25 °C et répond bien sur nos terres, explique Marc Humeau. La première année, il est toutefois peu développé et c’est le ray-grass et le colza qui apportent le volume. Les légumineuses fournissent des protéines. Et la chicorée est intéressante pour ses propriétés vermifuges et parce qu’elle continue à pousser l’été. » En plus de l’irrigation, l’éleveur épand 20 m3 par an de lisier de porc (60 UN) d’un voisin sur ces prairies. Et l’élevage de porcs devant prochainement cesser son activité, il s’est engagé dans un projet de méthanisation pour récupérer une partie du digestat. Les brebis sortent à l’herbe début février, d’abord sur les coteaux, plus précoces et portants, puis sur les prés inondables qui sont ainsi déprimés avant d’être fauchés pour faire du foin. L’éleveur pratique ensuite un pâturage tournant selon le volume d’herbe sur les prairies temporaires, les prés inondables après la fauche puis à nouveau les coteaux à l’automne. En plus des prés inondables, 15 à 20 ha de prairies temporaires sont fauchées pour assurer un stock de foin et d’enrubannage. « Avec cette conduite et grâce à l’irrigation et la fertilisation, l’alimentation des brebis repose quasi à 100 % sur l’herbe, malgré la petite surface de l’exploitation, souligne Marc Humeau. Les légumineuses pâturées ou enrubannées fournissent des protéines au printemps, quand les besoins des brebis sont les plus élevés. Le seul complément parfois utilisé est basé sur les céréales produites sur l’exploitation. La pluviométrie est par contre essentielle… »
Chiffres clés
Des agneaux rationnés et bien valorisés
Les agneaux sont allotés à l’engraissement entre mâles, femelles et par gabarit. Tous reçoivent d’abord de l’enrubannage et 400-500 g d’aliment complet. À partir de mi-septembre, les mâles sont accélérés pour les premières ventes. L’éleveur refait les lots et accélère plus ou moins les femelles. 90 à 95 % des agneaux sont valorisés en Agneau d’Anvial, 75 à 80 % en U et E, le reste en R. Le prix de vente est de 6,5 €/kg jusqu’au 15 septembre puis augmente progressivement jusqu’à 8 €/kg en novembre. Le prix de vente moyen pour Marc Humeau atteint en général 7 €/kg. En plus de la production ovine, l’éleveur exploite des panneaux photovoltaïques d’une puissance de 140 kW.