Aller au contenu principal

Chien de conduite
Les Pyrénéens relancent le labrit

Des éleveurs ovins se mobilisent pour sauvegarder le berger des Pyrénées, appelé communément Labrit, supplanté par d'autres races de chiens dans les estives.

Le Berger des Pyrénées, dit aussi Labrit, est un chien endurant, capable d'initiatives.
Le Berger des Pyrénées, dit aussi Labrit, est un chien endurant, capable d'initiatives.
© A.Dazet

En 2010, Jean-Louis Laborde-Boy, berger en vallée d’Ossau, tire la sonnette d’alarme : le Berger des Pyrénées est en train de quitter les pâturages montagnards pour les jardins des particuliers, tandis que d’autres races le remplacent, alors qu’il est parfaitement adapté à la conduite des troupeaux en montagne. Il s’adresse au Centre départemental de l'élevage ovin d’Ordiarp, au nom de l’association des éleveurs transhumants des trois vallées béarnaises. Le centre, qui travaille déjà sur les races ovines locales, comme la brebis Manech à tête noire, s’est mis en quête de financements pour un projet de relance de deux races canines locales : le Labrit (Berger des Pyrénées) et le Patou (Montagne des Pyrénées). Finalement, le plan de soutien à l’économie de montagne a accepté de les accompagner pendant trois ans. Argitxu Ourthiague, animatrice pastorale embauchée pour cette mission, a déjà commencé à recenser les Labrit en « activité pastorale » dans les sommets et vallées pyrénéennes.

Des éleveurs motivés

En octobre dernier, une quarantaine d’éleveurs du Pays Basque et du Béarn très motivés, se sont réunis pour lui demander de se concentrer autour de quatre pistes de travail : la mise en place d’un catalogue de Labrits travaillant sur troupeau, la définition d’axes d’amélioration de la race (grille de notation et suivi généalogique des chiens), des formations au dressage et l’organisation de temps d’échange, de communication et de promotion autour du Labrit (démonstrations en montagne). Pour mener à bien cette action, des partenariats sont à l’étude avec Races de France et la Société Centrale Canine.

Parmi les éleveurs impliqués, Daniel Casau est berger à Izeste. Depuis 1988, date à laquelle il a repris la ferme familiale, Daniel conduit, sur l’exploitation, comme en montagne, ses brebis béarnaises et ses vaches, grâce aux Labrits et utilise des Patous comme chiens de protection. « Le Montagne des Pyrénées grandit et reste en permanence avec le troupeau, il a un rôle défensif et de tri (ndlr : séparer les brebis étrangères au cheptel de celles qui font partie de son troupeau), alors que le Labrit reste avec son maître. Il travaille au rassemblement des animaux, lors des déplacements et en vue de la traite quotidienne. La cohabitation est sereine, les chiens ne sont pas en rivalité. Malgré sa taille, le Labrit domine le Patou » explique Daniel. Il possède actuellement trois Labrits, un à la « retraite », un en pleine fleur de l’âge et un en cours d’éduction, ainsi qu’un Patou.

Le problème des concours

Daniel, satisfait de ses chiens successifs, n’a jamais été tenté par d’autres races canines. Malgré ses victoires à différents concours de chiens de bergers, il dénonce la responsabilité de ces derniers dans la régression de la race à usage pastoral. « Dans les concours, seuls les meilleurs spécimens sont montrés, alors forcément, on trouve toujours que son chien n’est pas aussi bon. Le problème, ce n’est pas la race c’est l’éducation » rectifie Daniel. Or le Labrit a besoin d’un vrai maître sinon il ne travaille pas bien. Réputé méfiant, il aboie facilement, et hargneux, il est surtout endurant, têtu et rustique, parfaitement adapté aux conditions météorologiques et aux distances à parcourir en estives.

Son apprentissage peut commencer dès l’âge de 3 mois. Naturellement, il veut avoir le dessus, il n’a pas peur de rentrer dans le troupeau. « Il est capable d’aller chercher une brebis très loin, dans le brouillard » témoigne Daniel, regrettant que l’instinct et les initiatives de cette race soient souvent sous-exploités. Pour l’instant, les éleveurs jouent la solidarité en se prêtant des mâles et en se donnant des chiots, mais en dehors de la région, difficile de trouver un Labrit. Grâce à ce projet de relance de la race et à la sélection, ils espèrent pouvoir améliorer ses aptitudes et le faire connaître au delà du pourtour pyrénéen.

Les plus lus

Laura Chalendard, éleveuse ovin dans la Loire
« On n’a plus d’autre choix que d’abandonner, de renoncer à son rêve » - Des inégalités de genre encore omniprésentes dans le monde agricole
« Vous vous en sentez capable ? » : une question que les femmes en cours d’installation connaissent par cœur…
Vincent Bienfait
« Je gagne 2,6 Smic avec le système ovin pâturant que j’ai développé »
Éleveur multiplicateur de brebis Romane dans le Morbihan, Vincent Bienfait a mis en place un système très pâturant, encore peu…
Maxime Taupin
« On a beaucoup diversifié, j’ai besoin de revenir au métier d’éleveur ovin »
Maxime Taupin est en Gaec avec ses parents sur une exploitation multi-ateliers, entre troupe ovine, grandes cultures, vente…
Lauriane, étudiante en école d’ingénieurs à AgroParisTech
« Les violences sexuelles salissent le monde agricole »
À la campagne, l’anonymat n’existe pas. En raison de la promiscuité dans les zones rurales peu denses où « tout le monde se…
Le pâturage hivernal des brebis sur les prairies bovines fait partie des études en cours au sein du Ciirpo.
Le Ciirpo se projette dans l’avenir de la production ovine
En 2024, une trentaine d’études est en cours au Ciirpo. Et les projets ne manquent pas, entre l’adaptation au changement…
Pierre Stoffel avec son chien
« J’ai à cœur de maintenir la commercialisation en circuit court de mon élevage ovin ! »
Confiant, Pierre Stoffel, à peine 20 ans, vient tout juste de reprendre l’exploitation familiale en individuel, que son père a…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 93€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Pâtre
Consultez les revues Réussir Pâtre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Pâtre