Aller au contenu principal

Les ovins dans la tempête Covid-19

Période cruciale pour la production ovine française, Pâques représente pour un grand nombre d’éleveurs près de la moitié du chiffre d’affaires annuel. La brutale chute de consommation impacte profondément tous les maillons de la chaîne de production.

 © D. Hardy
© D. Hardy

Le samedi 14 mars, le Premier Ministre annonçait la fermeture des bars, restaurants et autres lieux accueillant du public, laissant présager pour les jours à venir un confinement généralisé. Alors que celui-ci a été officialisé le 17 mars à midi, les consommateurs se sont rués dans les supermarchés et magasins de proximité pour faire des provisions, déréglant le marché par une très forte demande de produits alimentaires sur une période très courte. De fait, partout en France, les abattages d’agneaux ont fortement progressé pendant la première semaine de confinement pour répondre à cette demande explosive. En effet, les consommateurs ont dévalisé les rayons d’agneau par peur de manquer de viande. À cette hausse des achats s’est combiné un effet d’anticipation des éleveurs, inquiets de perdre leur débouché à des festivités religieuses, toutes concentrées sur quelques jours. La Pâques catholique, Pessa’h (Pâques juives), la Pâque orthodoxe et le Ramadan sont en effet autant de célébrations où la consommation de l’agneau est traditionnelle voire ritualisée.

Des abattages en baisse de 70 %

La semaine suivante, la réalité de la chute de consommation a rattrapé les abattages qui se sont à leur tour effondrés, enregistrant une baisse record de plus de 70 %. En cause, l’instabilité de la demande qui a plongé dans le doute les opérateurs, qui ont donc davantage misé sur une stratégie de prudence. Conséquence désastreuse pour les éleveurs, pour lesquels la période de collecte des agneaux de Pâques commençait tout juste et qui ont vu leurs animaux bloqués sur leurs exploitations. Rapidement, ceux-ci ont mis en place des conduites alimentaires de rationnement pour tenter de limiter la prise de graisse des agneaux et donc les risques d’animaux déclassés voire invendables. « Sur la deuxième semaine de confinement, on estime à 100 000 agneaux qui sont stockés sur pied sur les fermes et au moins autant les semaines qui suivent », s’inquiète Michèle Boudoin, présidente de la Fédération nationale ovine (FNO). Au vu des années précédentes, la profession dénombre plus de 450 000 agneaux qui seront excédentaires cette année sur le mois d’avril.

Des circuits de distribution bouleversés

Avec le confinement déclaré par le gouvernement, les repas de famille sont restreints puisque tout regroupement est interdit. La consommation d’agneau va donc baisser, puisque cette viande est souvent présentée en gros formats tels que les gigots et les épaules. Par ailleurs, la baisse de consommation est bien entendu due à la fermeture des restaurants et cantines, débouché important de la production ovine française. Les stocks de ces débouchés ont été transférés dans le circuit de la grande distribution, prenant la place des agneaux prêts à être abattus dans les exploitations. Reste tout de même la restauration institutionnelle (santé, armées, Ehpap, et quelques entreprises) ainsi que les restaurants qui font de la livraison à domicile ou du « à emporter ».

Cette pression de consommation supplémentaire sur les grandes surfaces a complexifié la gestion des commandes. Face à une consommation imprévisible et à un manque de main-d’œuvre, les distributeurs ont eu tendance à simplifier les gammes et la gestion des linéaires. La plupart des enseignes de la grande distribution ont ainsi fermé les rayons de boucherie traditionnelle, par mesure de sécurité sanitaire mais aussi par manque de demande ou pour réaffecter le personnel sur la préparation des barquettes. L’essentiel de la viande ovine se concentre désormais dans les rayons libre-service et dans les drives. Certaines enseignes ont, malgré la fermeture de leurs rayons traditionnels, continué à s’approvisionner en carcasses entières que leurs propres bouchers ont ensuite découpées. Cependant, certaines enseignes semblent rouvrir ces rayons qui inspirent confiance aux clients.

Voir aussi la conjoncture ovine spéciale Coronavirus sur idele.fr

Les plus lus

Agneaux à l'engraissement en Afrique du Sud
De l’intérêt des levures dans la ration des brebis et des agneaux
Le fabricant de levures Lallemand présentait une série d’études confirmant l’intérêt de l’ajout de levures vivantes dans la…
<em class="placeholder">Mathilde Poulet</em>
« Je travaille comme technico-commerciale avant de m’installer en élevage ovin »
Prendre son temps pour construire un projet viable et profiter de l’expérience du terrain en amont, voilà les objectifs de…
<em class="placeholder">Florent et Charles Souyris et Philippe Galtier, Gaec de Cuzomes</em>
Aveyron - « Nous avons investi pour travailler 35 heures par semaine dans notre élevage ovin »
Dans l’Aveyron, les trois associés du Gaec de Cuzomes montrent comment ils ont optimisé la productivité du travail et la…
Manon Fleuroux élève un troupeau de 60 brebis
« Nous devons nous réapproprier la mort de nos animaux »
Manon Fleuroux élève un troupeau de 60 brebis à Montréal dans l’Aude et est engagée dans la création d’un abattoir mobile. Suivie…
Samuel Bulot, président de l’Institut de l’élevage.
« L’Institut de l’élevage doit venir dans les cours des fermes »
Samuel Bulot a été élu président de l’Institut de l’élevage le 13 juin. Éleveur laitier bio en Côte-d’Or, il mesure l’…
Ludovic Gilbert et Théo Haller
"Reprendre la ferme de papy, du rêve à la réalité"
Depuis son enfance, Théo Haller a rêvé de reprendre l’exploitation de son grand-père maternel décédé lorsqu’il avait dix ans,…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Réussir Pâtre
Consultez les revues Réussir Pâtre au format numérique, sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Réussir Pâtre