Lait
Les bons réflexes pour réussir l’affinage de ses lactiques au lait de brebis
Bien orienter l’implantation et la pousse des flores de surface sur les lactiques ne s’improvise pas. On fait le point avec Vivien Benezech, ex-fromager au sein de la ferme expérimentale du Pradel (Ardèche).
L’affinage est la période pendant laquelle les fromages subissent de nombreuses transformations physico-chimiques. Ils vont en outre se couvrir de micro-organismes divers (bactéries, levures, moisissures). Ce sont ces derniers qui vont participer à ces transformations. Autant d’interventions qui donneront au fromage sa texture, son aspect et son goût. L’affinage commence concrètement dès le démoulage, il se poursuit lors de la phase de ressuyage (s’il y en a un), au séchoir et se termine au hâloir. Tout au long, le fromager se doit d’être vigilant.
Le ressuyage, par exemple, va permettre aux levures et au geotrichum de se développer. quelle que soit la flore, l’étape est particulièrement importante car un bon développement de geotrichum et de levures peut protéger les fromages d’un développement de flores d’altération (mucor, pseudomonas..) et va aussi participer à la désacidification du fromage. Et c’est seulement à partir d’un pH de 5 que les moisissures vont pouvoir se développer.
La période de salage revêt aussi son importance pour l’implantation de la flore. Lors de cette phase, le sel va apporter une quantité définie de chlorure de sodium (NaCl) dans le fromage frais entre l’égouttage et le séchage. Le sel va permettre l’expression aromatique des composants libérés au cours de l’affinage. Outre son influence sur le goût, il permettra d’améliorer l’égouttage ou encore de former la croûte.
Le sel doit être sec. Attention, un salage trop abondant, insuffisant ou même précoce peut avoir un impact. Si on veut favoriser l’implantation du pénicillium, il convient d’avancer le salage à la fin du moulage, durant l’égouttage en moule. Si on veut en revanche favoriser l’implantation du geotrichum, le salage peut être retardé pendant le ressuyage (maximum 24 h après le démoulage). S’il manque du sel, le goût pourra être altéré, la sélection des flores sera par ailleurs moindre… Si le salage est en revanche excessif, les conséquences gustatives pourraient être désagréables.
Il y a aussi la problématique de la quantité de sel. Pour définir la dose de sel, il faut connaître le poids moyen du fromage au démoulage et on adaptera la dose en fonction. Il faut compter 1 % du poids de fromage en sel, cette dose peut être augmentée à 1,2 % si l’on désire favoriser le développement du penicillium. Pour un picodon, l’objectif de poids démoulage allant de 130 g à 140 g, on objective 1,3 g à 1,6 g en fonction de la flore.
Dans le hâloir, on privilégiera une température allant de 9,5 à 12 degrés. Pour favoriser le développement du geotrichum, celle-ci peut être légèrement supérieure.
Le temps de séchage peut varier en fonction de la flore désirée et du temps de ressuyage qui l’a précédé. Il peut durer de 12 à 48 heures, les objectifs de perte de poids pour un fromage à flore dominante geotrichum seront de 25 % à 30 % pour un fromage à flore dominante penicillium 35 % à 50 %.
Une bonne maîtrise de l’ensemencement aura un impact sur la bonne implantation des flores. Tout comme la qualité de ses équipements. Il faut bien isoler ses locaux, à commencer par le toit. C’est nécessaire pour gérer la température et l’hygrométrie. Il faut vraiment s’entourer d’un bon frigoriste. Mettre en place un climatiseur dans des bureaux et construire une fromagerie, ce n’est pas la même chose.