Le renouveau de la race brigasque
Race laitière rustique, la brigasque est particulièrement adaptée aux territoires montagneux des Alpes du Sud. Des éleveurs passionnés ont entrepris de la sélectionner.
Elle était considérée comme orpheline. Une poignée d’éleveurs s’attelle à faire revivre la race brigasque en région Provence Alpes Côte d'Azur. Parmi eux, Amélie Griveau et Jean-Baptiste Martin, qui sont en train de constituer un troupeau laitier avec cette race rustique très adaptée à leur territoire de montagne, dans le Queyras. Le couple exploite 20 hectares de prairies, extrêmement morcelées, mais en grande partie irrigables, 60 hectares de parcours et dispose d’un alpage individuel. « Le comportement alimentaire de la brigasque est intéressant, souligne le jeune éleveur. Elle mange d’abord les ligneux. Même, à l’intérieur, elle valorise bien les fourrages grossiers. C’est une race purement laitière mais elle est bien conformée et très agréable à traire. » La laine est valorisée sous forme de tapis, tissés en Sardaigne. Les dix-neuf éleveurs de cette race, qui compte à peine mille brebis et a été sauvée par deux néo-ruraux passionnés, sont regroupés dans une association. Leur but : « gérer les différentes souches et la consanguinité », « aider les jeunes qui veulent s’installer en brigasque et créer un engouement ». « On peut acheter au maximum 20 agnelles par an » Le couple détient 55 brebis brigasques et 40 agnelles et antennaises, et encore 70 Est à laine mérinos. L’objectif, d’ici à deux à trois ans, est de supprimer ces dernières et de porter le troupeau laitier à 120-130 brebis. « Il faut du temps parce qu’on peut trouver à acheter au maximum 20 agnelles par an. Et, la race n’ayant jamais été sélectionnée, elle est très hétérogène ; il faut beaucoup réformer après la première lactation. Maintenant, j’ai cinq ou six souches, je peux travailler avec mes béliers », explique l’éleveur.
Ne disposant d’aucune référence de production laitière, les éleveurs ont entrepris, avec l’association Brebis Lait Provence, de faire des pesées de lait. Jean-Baptiste Martin estime la production actuelle à 90 litres par brebis. « Après sélection, nous devrions pouvoir monter à 150 litres », prévoit-il. Les brebis mettent bas vers la mi-octobre, la traite (à la main provisoirement) se déroule de début décembre jusqu’à fin juillet. Au bout d’un mois, elles sont conduites en monotraite. La brigasque a une bonne persistance laitière, la production remonte de 30% à la mise à l’herbe alors que toute complémentation est supprimée. Qelles sont taries, elles partent deux mois en alpage. Les agneaux sont élevés sous la mère pendant six semaines avant d’être abattus entre 12 et 17 kilos (vif). Les carcasses sont découpées, la viande conditionnée sous vide et vendue en direct au détail. L’exploitation est conduite en agriculture biologique. Le lait est transformé prioritairement en yaourts, nature et aromatisés avec des herbes locales (génépi, hysope, verveine). Le couple fabrique également de la tome de Provence, du fromage blanc en faisselle, des fromages lactiques et de la brousse et prévoit de relancer une fabrication locale, la tome de la Brigue. La bonne valorisation du lait (4,80 € le litre), devrait donner toute sa viabilité au projet, dans lequel les jeunes éleveurs ont investi 175000 euros (extension et réaménagement des bâtiments, séchage en grange, fromagerie). Et assurer l’avenir de la brigasque.
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