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La Lacaune viande boostée par le gène culard

Le GID Lacaune a réussi l’introgression du gène culard dans son schéma de sélection de la Lacaune viande au-delà de ses espérances. Les éleveurs en profitent pleinement.

Un nouveau numéro pour une nouvelle race ovine : 210. Depuis 2013, c’est le code de la race Lacaune viande GID. Après 10 ans de travail, le GID (anciennement Gebro) a réussi à fixer le gène de l’hypermuscularité (culard) de la race texel belge sur la Lacaune viande. Devant des résultats probants, les instances de sélection ont décidé d’introduire ce gène dans l’ensemble de la population du schéma GID. Aujourd’hui, deux tiers des brebis du noyau de sélection sont porteuses du gène, dont 15 à 20 % d’homozygotes. Tous les béliers diffusés (IA et monte naturelle) sont homozygotes. Cette opération a donné un second souffle à un schéma qui était en perte de vitesse. Le nombre de sélectionneurs (20 en 2019) et de brebis (10 000) a été multiplié par deux depuis 2013. Les ventes de béliers ne cessent d’augmenter (180 en 2018). « Nous avons retrouvé un pool à minima pour faire du bon travail », se réjouit Bruno Crassous, directeur du GID Lacaune.

80 % des agneaux classés R3

« Les éleveurs voient dans notre génétique un juste équilibre entre des animaux maternels et bien conformés, permettant de produire des agneaux en toute saison », ajoute le responsable de l’entreprise de sélection. Le pari n’était pas gagné d’avance. Introduire le gène culard aurait pu dégrader les qualités de la race rustique. Ce fut très peu le cas. La facilité de désaisonnement de la Lacaune est entièrement conservée. Les qualités maternelles, qui ont légèrement décroché au départ, ont été retrouvées après cinq ans de sélection focalisée sur le standard de la race Lacaune. Côté agneaux, le résultat est concluant, même sur les hétérozygotes. « Nous avons gagné trois quarts de classe et 3 % de rendement, indique Bruno Crassous. 80 % des agneaux sont classés R3. Les éleveurs nous disent qu’ils sont plus vigoureux à la naissance et les mères sont restées très maternelles. » Il n’y a pas de difficultés à l’agnelage. La progression a été spectaculaire sur la voie femelle. Avant, les agneaux femelles plafonnaient à 14-15 kilos pour des raisons de gras. Elles ont gagné deux kilos.

« Travailler efficacement en toute saison »

« De nombreux utilisateurs n’hésitent plus à travailler en race pure sans avoir recours aux croisements terminaux. Ils sont séduits par les résultats carcasses et par la capacité de nos mâles à travailler efficacement en toute saison, affirme Bruno Crassous. Notre race n’est pas hyperprolifique (1,7 à 1,8), mais elle répond bien à la demande de nombreux éleveurs chez lesquels la main-d’œuvre disponible en période d’agnelage tend à diminuer. Menée en rythme de trois agnelages en deux ans strict, une productivité supérieure à 200 avec des taux de mise bas approchant les 130 % est tout à fait envisageable. »

En outre, depuis 2013, les béliers qui sortent de la station de contrôle individuel sont indexés sur l’efficacité alimentaire. Un caractère facilement héritable. Les animaux les plus économes ont davantage de bactéries fibrolitiques dans leur rumen. Ils valorisent mieux les fourrages. « Même en alourdissant les agneaux, les consommations de concentrés ont tendance à baisser, assure Bruno Crassous. Les éleveurs nous disent aussi que les mères restent en bon état malgré des apports de concentrés limités. Un bon état corporel en fin d’allaitement est favorable à la reproduction. »

Des agneaux laitiers croisés mieux conformés

Cette génétique intéresse de plus en plus d’éleveurs laitiers du bassin de Roquefort pour produire des agneaux mieux conformés avec les brebis Lacaune lait. Une étude comparative réalisée l’an dernier en station de testage des qualités bouchères (1 250 IA dont 80 % en Lacaune viande GID et 20 % en Lacaune lait) a montré que les béliers viande permettaient de gagner 1,4 kg à un mois et que la mortalité était diminuée de 3 % (meilleure vigueur des agneaux). Un gain chiffré à sept euros par agneau pour le naisseur. Après engraissement, ils ont été abattus plus tôt (gain de 8,5 jours), avec des notes de conformation supérieures (+ 0,75) et un meilleur rendement (+ 1,2 %). Des performances qui intéressent aussi les engraisseurs d’agneaux laitiers. « Ils bénéficient de la génétique, mais ils ne la payent pas, regrette le directeur du GID Lacaune. Des éleveurs seraient prêts à acheter des béliers lacaune viande GID [ 450 à 530 € ], mais ils ont besoin d’un coup de main de la filière. »

Une productivité numérique de 180 %

David Monmoton est un des sélectionneurs du schéma GID Lacaune. Il élève 330 brebis et 25 vaches limousines. Les brebis sont conduites en système trois agnelages en deux ans avec trois périodes de mise bas resserrées sur un mois : septembre, janvier, 15 avril -15 mai. La lutte d’automne est faite en monte naturelle. Il obtient une productivité numérique de 180 % (pour un taux de mise bas de 113 % et une prolificité de 170 %), du fait d’une bonne maîtrise de la mortalité (8 %). Les brebis consomment en moyenne 130 kilos de concentré. En 2017, il a vendu 390 agneaux lourds (essentiellement des mâles) qui pesaient près de 19 kilos en moyenne (122 €). Ils ont mangé 57 kilos de concentré. Il a également vendu 16 mâles pour la reproduction (160 €). Il conserve 60 agnelles pour le renouvellement et vend les autres pour la reproduction (122 à 135 € en 2017). Les brebis de réforme sont vendues à des bouchers (80 €). Il dégage une marge brute hors aide de 154 €/brebis présente.

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