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Des rencontres et des concours au Salon de l’agriculture
Pendant neuf jours, le dynamisme de la filière ovine a pu contraster avec l’ambiance parfois morose du Salon en pleine crise de l’élevage.
Le Salon de l’agriculture a ouvert ses portes du 27 février au 6 mars dans une ambiance contrastée. L’enthousiasme des quelque 610 000 visiteurs qui ont arpenté ses allées, un chiffre en baisse de 11% seulement malgré le contexte sécuritaire, détonnait avec les banderoles, tee-shirts et brassards « je suis éleveur, je meurs ». « Si la filière ovine ne connait pas aujourd’hui les mêmes difficultés que les filières bovines, les éleveurs ovins n’échappent pas à la crise car 60 % de nos exploitations sont mixtes », a tenu à rappeler Michèle Boudoin, présidente de la FNO. Dans un contexte où la consommation et le prix restent des sujets de préoccupation majeurs, la FNO a profité du Salon pour rencontrer les principales enseignes de la grande distribution. « Nous avons voulu échanger pour connaître leurs besoins, la place de la viande dans leurs magasins, leurs stratégies de segmentation, leurs idées pour redynamiser la consommation et leurs politiques de prix. Ces éléments sont importants pour pouvoir, sur le terrain, conforter la contractualisation en allant jusqu’au deuxième niveau, c’est-à-dire jusqu’à une forme de contractualisation entre les groupements de producteurs et les distributeurs. »
De belles présentations de races malgré les difficultés
Malgré la morosité, les éleveurs sélectionneurs n’ont pas boudé le Salon et les races en concours ont affiché de belles présentations. « Nous sommes agréablement surpris que les éleveurs jouent le jeu, malgré le contexte » s’est réjouit Aline Bonnot, directrice de l’OS Mouton Charollais. Une vingtaine d’éleveurs avaient emmené 64 animaux pour le concours de la race, soit autant que l’an dernier. « Nous avons des agneaux d’à peine un an qui atteignent un poids de 100 kilos, a souligné Pascal Chaponneau, président de l’OS. Cela représente une progression énorme. Quand je vois la conviction et la hargne mises par les éleveurs pour préparer les animaux pour venir au Salon, je me dis que si les élus pouvaient mettre autant d’énergie à résoudre les problèmes, la crise serait résolue. » Les prix de championnat viande, mâle et femelle, ainsi que le prix d’ensemble ont été remporté par le Gaec de Champagny. En race Mouton vendéen, 13 éleveurs avaient amené 57 animaux. « Le Mouton vendéen est une race docile, ce qui facilite le travail et la contention, vantait Christophe Morisset, éleveur de la Vienne. Nous recherchons dans nos objectifs de sélection à préserver la mixité de la race avec un équilibre entre les caractères bouchers et de reproduction. En effet aujourd’hui, il ne suffit pas d’avoir une bonne qualité de viande, il faut produire des agneaux pour vivre du mouton. »
La viande d'agneau en concours pour la première fois
Mais le concours général agricole, ce n’est pas que les races, c’est aussi les produits. Les viandes y participaient pour la quatrième édition mais c’était la première fois que l’agneau sous signe officiel de qualité concourrait. Pour des questions de logistiques, les dégustations avaient eu lieu en janvier au lycée des métiers de l’hôtellerie Jean Drouant à Paris mais les résultats ont été dévoilés le 27 février au Salon. Les prix récompensaient un partenariat entre groupement d’éleveurs, ODG et abatteurs. Ainsi l’abatteur Bigard à Castres associé aux éleveurs du groupement Sica-2G a remporté une médaille d’or pour son agneau Lou Paillol Label Rouge ; Arcadie Sud-Ouest à Rodez associé aux éleveurs d’Unicor a remporté une médaille d’argent pour son Agneau fermier du Pays d’Oc label rouge et l’abatteur Destrel de Gramat associé aux éleveurs de la Capel a également remporté une médaille d’argent pour son agneau fermier du pays d’OC label rouge. « Ce qui sera intéressant, c’est de voir les répercussions, sur la durée que peut avoir ce prix sur les ventes et la consommation de notre produit » note Jérôme Rédoulès, président de la Sica-2G.
Les produits laitiers et les prairies récompensées
Les fromages et produits laitiers au lait de brebis ont également été récompensés de 10 médailles d’or, 17 d’argent et 11 de bronze au concours général agricole. Autre concours impliquant les éleveurs, celui des prairies fleuries qui a mis à l’honneur, le 4 mars dernier, les prairies ayant le meilleur équilibre agri-écologique et qui participent à l'autonomie en fourrage des exploitations. Dans la catégorie fauche (et pâturage), le premier prix est revenu à l’élevage ovin et bovins allaitants de la Ferme des Champs Lambert dans le Territoire de Belfort. Le premier prix dans la catégorie pâturage (et fauche) est revenu à Jean-Pierre Casavieille, éleveur-fromager bovin et ovin dans les Pyrénées-Atlantiques. Le jury a salué "la passion de son travail et de sa recherche d’autonomie fourragère, sur une prairie à l'aspect paysager remarquable en forte pente, entièrement fauchée à la main et récoltée au râteau".
Des éleveurs motivés malgré l'ambiance morose
Un prix pour I-Zy Sheep, la remorque multifonction
Les jeunes de l’enseignement agricole étaient très présents et mobilisés sur le Salon, que ce soit pour participer aux ovinpiades, faciliter la circulation des animaux vers le ring ovin... Pour capter ces jeunes et les intéresser aux filières agricoles coopératives, Coop de France a imaginé un concours étudiant « Inventez les coopératives de demain », dont les prix ont été remis le 1er mars au Salon. Dans la catégorie Appui et conseil aux exploitations, le premier prix a été remporté par un groupe de six étudiants d’AgroSup Dijon ayant imaginé, en partenariat avec la coopérative Feder, une remorque automatisée multifonction I-Zy Sheep. « Nous avons essayé de voir ce qui existait déjà et d’apporter un plus, explique Roxane Arnoult. Ici, le point fort de l’outil est de combiner quatre fonctions : chantiers de tri, pesées, échographies et traitements et d’enregistrer ou commander ces opérations grâce à la lecture électronique. De plus, il est mobile ce qui permet de réaliser ces opérations, même aux champs et de s’adapter à toute sorte de bergerie. Cela permet aussi d’en faire un outil mutualisable à plusieurs agriculteurs. » Si l’outil n’existe aujourd’hui que sur le papier, Feder a apprécié le travail mené par les étudiants. « Le concept est très intéressant, souligne Anne-Marie Bolot, technicienne. Cela mérite d’être approfondi pour voir ce qu’on peut en faire et nous en débattrons au prochain conseil d‘administration de la coopérative. »
Des éleveurs de raïoles récompensés
Adrien Rigal a reçu le deuxième prix de la fondation du patrimoine pour l’agro-biodiversité animale. Avec son frère Lucas, il élève 340 brebis de race raïole dans un système très pastorale des Cevennes. « La raïole est docile et valorise bien les glands, les châtaignes, les landes et les fourrages grossiers » explique l’éleveur de 28 ans. En plus du pâturage sur les parcours, les brebis entretiennent aussi les fonds de vallée enfrichés autour de Belcastel, l’un des plus beaux villages de France dans l’Aveyron. « D’un effectif de 1 000 brebis recensés en 1994, nous sommes passés à 2 500 aujourd’hui » apprécie Martine Fiolet de l’association de sauvegarde des raïoles, caussenardes et rouges du Roussillon. Avec la dotation de 6 000 euros offerte par Ceva Santé animale, les jeunes éleveurs souhaitent clôturer une partie de leur parcours et développer la vente directe des agneaux grâce à un atelier de découpe.