Comment valoriser son lactosérum de brebis
Le lactosérum, ce sous-produit issu de la fabrication des fromages, peut être valorisé. Lors des Rencontres du fromage fermier, qui se sont déroulées en fin d’année dernière en Savoie, Émilien Fatet d’Actalia a justement évoqué différentes pratiques.
La première possibilité qui s’offre au fromager afin de valoriser le lactosérum consiste à fabriquer une brousse (ou sérac). « Le sérum contient des protéines sériques, solubles. L’idée est d’arriver à agglomérer ces molécules entre elles afin de les rendre solides », résume Émilien Fatet, formateur à Actalia (La Roche-sur-Foron, Haute-Savoie). Pour ce faire, il existe plusieurs moyens : le chauffage est l’un d’eux. « À une certaine température, on va dénaturer les molécules et arriver à les faire changer d’état : elles vont alors floculer. On va obtenir des espèces de grains de protéines qui vont remonter à la surface et s’agglomérer entre eux. »
En fait, plusieurs paramètres vont influencer la dénaturation des protéines sériques (PS) et leur floculation lors de l’action de la chaleur. Le calcium aura par exemple un effet déstabilisant sur les PS ; la température de dénaturation diminue en présence de chlorure de calcium. La présence de chlorure de sodium aura en revanche plutôt tendance à faire augmenter la température de dénaturation. La dénaturation des PS sera par ailleurs plus rapide avec un pH basique (la température de dénaturation est plus élevée à pH acide). Par contre, leur floculation sera favorisée par des pH acides, donc l’effet de ce paramètre est ambivalent. Enfin, l’augmentation de la concentration en PS augmente le taux de dénaturation de ces protéines par la chaleur. C’est important : la composition du sérum conditionnera la qualité du produit fini.
Le sérum obtenu contient naturellement de la matière grasse. Néanmoins, le fromager pourra ajouter du lait entier lors de la fabrication de son fromage, afin d’augmenter le rendement et améliorer la texture. « C’est un fromage qui est avant tout constitué de protéines. Dans une certaine mesure, on peut apporter de la matière grasse ainsi que des protéines supplémentaires (caséines + protéines sériques) en ajoutant du lait. Attention, l’ajout du lait se fait à chaud, une fois que la présure contenue dans le sérum a été dénaturée. » L’ajout de sel est également pratiqué dans certaines régions, comme la Corse.
Le fromager peut également utiliser le lactosérum afin de fabriquer du beurre (on parle en réalité de crème de sérum). Mais attention, ce choix n’est pas forcément rentable. Il faut en effet s’équiper (acquérir une écrémeuse, une baratte ainsi qu’un moule). Le rendement est par ailleurs moindre : comptez 120 litres de lactosérum pour un kilo de beurre. Il faudra également être vigilant sur l’aspect gustatif car le beurre obtenu est sujet au rancissement. « Quand on met le sérum dans une écrémeuse, on va obtenir une petite quantité de crème, qui va permettre de fabriquer le beurre. Mais toute la matière grasse a déjà subi beaucoup de traitements biologiques et mécaniques, notamment lors de la fabrication du fromage. Le produit final sera concerné par le rancissement en vieillissant. »
Enfin, dernières possibilités : traiter le lactosérum comme un effluent ou le distribuer à des animaux (notamment des porcs) pour ses valeurs nutritives. Il est également possible de le donner aux ovins, afin notamment de limiter l’apport de concentrés. Néanmoins, le lactosérum peut perturber la flore du rumen ; des risques sanitaires peuvent également survenir (visna maëdi).