« Nos porcs charcutiers ont franchi la barre des 1 000 grammes de croissance quotidienne en engraissement »
À l’EARL Koat Penhoat, Anne Le Manach et Philippe Hervé ont complètement changé leur conduite d’élevage en engraissement et la génétique mâle afin d’exploiter les nouvelles possibilités de croissance offertes par l’arrêt de la castration des mâles entiers.
À l’EARL Koat Penhoat, Anne Le Manach et Philippe Hervé ont complètement changé leur conduite d’élevage en engraissement et la génétique mâle afin d’exploiter les nouvelles possibilités de croissance offertes par l’arrêt de la castration des mâles entiers.
Depuis le début de l’année, les performances des porcs charcutiers à l’EARL Koat Penhoat à Plounévézel (Finistère) sont passées à une autre dimension, avec l’arrêt de la castration et une modification de la conduite d’élevage qui a fait suite à un changement de génétique mâle.
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« Sur les neuf premières bandes complètes de mâles entiers issus du verrat TN Tempo de chez Topigs Norsvin (les truies sont conduites en vingt et une bandes), les croissances ont atteint 1 050 grammes par jour en moyenne (GMQ corrigé 30-115 kilos) », indique Anne Le Manach, gérante avec son conjoint de l’EARL.
Sur ces lots, l’âge moyen de départ est de 163 jours, pour un âge standardisé à 115 kilos de 155 jours. Matthieu Plessis, technicien Topigs Norsvin, a calculé l’indice de consommation sur trois bandes : « Il s’établit en indice corrigé 30-115 kilos à 2,30, contre 2,47 avant l’arrêt de la castration. » À l’abattoir, le TMP atteint 61,28, un niveau inférieur à la moyenne Uniporc mâles entiers du début de l’année 2024 (61,74), mais obtenu avec un poids chaud moyen plus élevé d’un kilo (97,43 kg contre 96,31 kilos) et, surtout, avec des croissances très élevées.
La GTE clôturée au 30 juin confirme ces résultats (voir tableau). « C’était le principal objectif de cette évolution qui a permis de gagner une semaine de croissance, soit l’équivalent d’une bande en engraissement, explique l’éleveuse. Grâce à ce gain de place, nous avons diminué la densité d’un porc par case. Nous gagnons ainsi en homogénéité en fin d’engraissement et les animaux sont moins exposés aux maladies, même si le statut sanitaire de l’élevage est bon actuellement. Nous intégrons également cette évolution pour déterminer la taille d’un projet d’engraissement neuf. Elle nous permettra de limiter le montant de l’investissement. »
Le taux de carcasses malodorantes varie entre 0 et 0,4 % selon les lots. Un très bon score que Matthieu Plessis explique par la sélection Nador sur le TN Tempo et par l’âge extrêmement bas des porcs charcutiers quand ils sont abattus.
Plafond alimentaire de 2,8 kilos par jour
Pour en arriver à ces résultats, les éleveurs se sont appuyés sur les conseils du technicien de Topigs. « Le point essentiel à travailler concerne la courbe d’alimentation. Elle doit augmenter le plus rapidement possible. » En pratique, la courbe de l’EARL Koat Penhoat démarre à 45 grammes par kilo de poids vif avec un ajustement d’une semaine, puis une progression de 32 grammes par jour jusqu’à un plafond de 2,8 kilos. « L’objectif est de s’approcher d’une alimentation à volonté durant cette phase de croissance. »
En fin d’engraissement, le technicien préconise une courbe en cloche, avec une baisse de la ration quotidienne de 100 grammes si l’éleveur veut optimiser le TMP. « Le potentiel du TN Tempo est proche de la moyenne Uniporc mâles entiers (61,7), affirme le technicien. Mais pour y arriver, il faut adapter le programme alimentaire et la courbe d’alimentation. » La surveillance des auges est un point clé de l’optimisation de l’ingéré. « Elles doivent être vides avant chaque repas, surtout en été, pour éviter les fermentations ».
En matière de valeurs alimentaires, Matthieu Plessis préconise un rapport lysine/énergie nette compris entre 0,92 et 0,95 pour l’aliment croissance, et entre 0,85 et 0,87, en finition. « Ces niveaux sont légèrement supérieurs aux normes en vigueur, afin de tenir compte du fort potentiel de dépôt musculaire du TN Tempo. » À l’EARL Koat Penhoat, l’aliment est distribué à la soupe trois fois par jour. « Le passage à deux repas par jour est à l’étude. L’objectif est d’améliorer l’homogénéité des cases en fin d’engraissement », précise Anne Le Manach.
Premiers départs à 140 jours
Les éleveurs procèdent au premier tri à l’âge de 138 jours, pour un départ à 140 jours d’âge pour un poids moyen des têtes de lots de 95 kg. « Nous avons été surpris au début par sa morphologie complètement différente de notre génétique précédente, se souvient Anne Le Manach, qui constate que cinq jours de retard, c’est tout de suite 6 kilos de carcasse en plus. » « Les issus du TN Tempo ont la particularité de s’allonger durant la phase de croissance, et de s’éclater seulement en phase de finition », prévient Matthieu Plessis. Il faut généralement entre trois et quatre tris pour faire partir un lot sur autant de semaines. « De la maternité où les porcelets expriment de la vigueur dès la naissance jusqu’aux derniers départs, la conduite d’élevage est devenue simple, avec des animaux qui ont de l’appétit et qui restent toujours homogènes », conclut l’éleveuse.
En chiffres
EARL Koat Penhoat à Plounévézel
« Une base Large White pour optimiser la croissance »
Le TN Tempo est un verrat synthétique issu à l’origine d’un croisement entre une lignée Large White et un Piétrain Dalland. « Les objectifs de sélection 2023 sont essentiellement basés sur les performances d’engraissement (45 %) et la robustesse (35 %) », relève Thierry Bellec, responsable génétique Topigs Norsvin France. La sélection sur la robustesse se base sur la mesure de treize critères, dont les taux de pertes en maternité, post-sevrage et engraissement. Grâce à la génomique, elle inclut également une sélection sur un gène de résistance au SDRP et prend en compte un package de cinq anomalies congénitales. En ce qui concerne les performances d’engraissement, Thierry Bellec souligne l’importance des mesures de la croissance et de l’ingéré quotidien jusqu’à 120 kilos. Depuis peu, la sociabilité des animaux est évaluée, afin de limiter la compétition à l’auge. « En cinq ans, nous avons amélioré le GMQ de 120 grammes par jour et l’IC de 0,25 point, ce qui a permis d’économiser plus de 24 kilos d’aliments entre 30 et 120 kilos », conclut-il.