Démarche différenciante
Valoriser les efforts de l’amont jusqu’au consommateur, les industriels s’y mettent
La nutrition des animaux représente de 60 à 80 % de la valeur du produit en sortie d’élevage. Quelques démarches en valorisent des aspects positifs jusqu’aux consommateurs.
La nutrition des animaux représente de 60 à 80 % de la valeur du produit en sortie d’élevage. Quelques démarches en valorisent des aspects positifs jusqu’aux consommateurs.
Oméga 3, céréales sans pesticides, OGM < 0,9 %, insectes, algues, protéines locales…, la nutrition des animaux d’élevage est porteuse d’histoires qui intéressent le mangeur, mais qui lui sont peu racontées. Elle reste souvent dans l’ombre des démarches plus globales sur le mode d’élevage ou le bien-être animal, auxquels elle contribue, un peu comme la prose de M. Jourdain.
Les signes officiels de qualité ont communiqué tôt vers les consommateurs. Dès 1966, les poulets entiers sous label Rouge de Loué affichent : « nourri au blé et au lait écrémé ». Les premiers « nourri sans OGM » apparaissent dès 1999, le premier bateau d’OGM étant arrivé dans l’Union européenne fin 1996. « Nous avons été précurseurs, car nous avons monté notre filière d’approvisionnement très tôt », souligne Pascal Vaugarny, chargé des dossiers réglementaires à la Coopérative agricole des fermiers de Loué (Cafel). Le « sans OGM » est se développe désormais dans toutes les filières, poulet et lait en tête.
Nous avons monté notre filière d’approvisionnement très tôt
Vu les volumes, certains éléments sont travaillés collectivement comme la sécurité sanitaire (via le système de certification Oqualim) et l’aspect durable des matières premières (plateforme Duralim, non-déforestation – bas carbone). Agriconfiance, qui existe depuis près de trente ans, s’engage sur la qualité des céréales. Très techniques, ces démarches apparaissent donc plus comme socle des cahiers des charges qu’en mentions différenciantes. Ainsi, Le Porc français (ex. VPF) ou Œufs de France exigent que les éleveurs se fournissent auprès de fabricants d’aliments localisés en France, adhérant à Oqualim.
Que dire au consommateur
Quatre types d’éléments se frayent toutefois un chemin en GMS ou en restauration. Tout d’abord, la nature des matières premières. Ainsi, les truites vendues à Auchan et à Match dans le nord du pays consomment une alimentation « enrichie en farine d’insectes et en huile de microalgues », communiquent les deux distributeurs.
Second critère, la proportion, comme les « 80 % de céréales de volailles label Rouge ». Suivent les caractéristiques nutritionnelles avec, en tête, leur richesse en oméga 3. C’est le cas dans les assiettes préparées par Compass. Béatrice Menu, directrice des achats alimentaires du groupe, explique : « Nous sommes engagés avec Bleu-Blanc-Cœur pour les aspects oméga 3 et santé en général, dans le cadre global de notre démarche RSE. Celle-ci passe aussi, pour nos achats hors signes de qualité, par des exigences en alimentation des animaux sans OGM et vers des protéines françaises. » Cette question de la provenance est le quatrième critère, très en pointe aujourd’hui. La définition du « local » doit toutefois être encore travaillée.
Sojalim nous assure du soja de France cultivé dans le Sud-Ouest
Les nouvelles filières Qualité Carrefour intègrent ainsi une obligation d’origine française pour 100 % des matières premières. La filière du porc basque Kintoa va plus loin : les céréales doivent être produites dans la zone AOP avec une traçabilité à la parcelle. « La coopérative Euralis assure la ségrégation des lots dès la collecte. Pour le soja, qui ne pousse pas dans notre zone, Sojalim nous assure du soja de France cultivé dans le Sud-Ouest », précise François Piveteau, vice-président de la filière et directeur de la maison Pierre Oteiza.
Manque de disponibilités en protéines
Si 99 % de céréales incorporées dans les aliments pour animaux sont déjà « bleu, blanc, rouge » pour les adhérents à Duralim, notre dépendance en certains minéraux indispensables et en protéines reste forte. Malgré le nouveau plan Protéines, il n’y en aura clairement pas assez localement pour tout le monde. C’est vrai en conventionnel comme en bio. Les démarches locales se multiplient pourtant.
Tromelin, Valorex et Eureden veulent ainsi relancer la culture des protéagineux en Bretagne. Et la Normandie expérimente son soja sur 100 hectares cette année, grâce aux éleveurs de l’Association des producteurs des Trois Vallées livrant Danone, avec la Coopérative de Creully (Calvados).
D’autres solutions se présentent, comme le sainfoin relancé en France en 2008 par Multifolia. Une démarche soutenue par des fabricants comme le breton MG2Mix et le vendéen Arrivé-Bellané. Cette petite fleur rose veut faire valoir ses protéines, énergie, fibres et métabolites d’intérêt nutritionnel naturels, par exemple contre les parasites digestifs. « Nous avons de belles histoires à raconter aux consommateurs et, surtout, les travaux scientifiques qui les valident », sourit Pascale Gombault, présidente fondatrice de la coopérative Sainfolia.