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International
[Graphique] Porc : la guerre en Ukraine renforcera-t-elle la concurrence sur le marché chinois ?

La guerre entre l'Ukraine et la Russie n'aura pas d'impact direct sur les exportations européennes de porc mais elle pourrait impacter le commerce avec l'Asie notamment vers la Chine.

© Vyashini Chokupermal

« Si les échanges de porc entre l’UE et l’Ukraine sont limités et que le commerce avec la Russie s’était tari en 2014 avec la peste porcine africaine (PPA) et le premier embargo économique, le marché du porc risque toutefois d’être impacté de façon indirecte. L’entrée dans une nouvelle ère diplomatique et économique pourrait renforcer les exportations de porc et de blé de la Russie vers l’Asie et en particulier la Chine, exacerbant la concurrence sur cette zone pour les exportateurs européens et américains », analyse l’institut du porc (l’Ifip) dans un récent communiqué.

Croissance de la production de porc en Russie

La stratégie de la Russie c’est avant tout de garantir son autosuffisance alimentaire, puis sur le long terme, de viser le marché de l’export notamment les pays asiatiques comme la Chine. Le but, devenir un acteur important sur la scène internationale du secteur porcin. « La Russie a presque doublé sa production porcine au cours de la dernière décennie grâce aux tarissements des importations et aux politiques gouvernementales visant à booster la production nationale », rapporte la FAO. La production porcine russe devrait encore augmenter de 10 % d’ici à 2030, selon le rapport de l’OCDE et de la FAO sur les perspectives agricoles entre 2021 et 2030.

Le pays est d’ailleurs devenu excédentaire en porc depuis deux ans et a commencé à se positionner sur le marché de l’export. La croissance de la production a cependant été ralentie par la PPA, qui a entrainé l’an dernier l’abattage de près d’un million de porcs. En 2021, la production porcine a ainsi progressé de seulement 2,5 % sur un an contre 8,6 % entre 2019 et 2020. L’ouverture des marchés d’Asie du Sud-Est aux exportations de porc russe devrait permettre d’écouler les volumes excédentaires présents sur le marché intérieur. Cette année, la production devrait progresser de 600 000 tonnes, selon l'Union nationale russe des producteurs de porc (RUPP).

Les entreprises russes de la viande multiplient les investissements dans le secteur porcin mais l’impact des sanctions économiques sur les capacités d’investissement sera toutefois à surveiller. « La société Cherkizovo, l'une des plus grandes entreprises productrices de viande en Russie, a investi près de 8,5 milliards de roubles (126 millions de dollars) dans la construction de nouvelles exploitations porcines situées à Tambov », indique Pigprogress. Ce projet devrait permettre à la société de produire 45 000 tonnes de viande porcine supplémentaire par an afin d’approvisionner ces usines de charcuterie-salaison en matières premières.

Par ailleurs, avec la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les disponibilités notamment en blé risquent d’être réduites sur le marché international. L’abondance sur le territoire russe, de matières premières pour l’alimentation des porcs pourrait être favorable à une production excédentaire de viande porcine russe. De quoi alimenter le marché de l’export.

La guerre modifiera le flux des échanges

« Depuis que la Russie a atteint son auto-suffisance, le pays développe ses exportations à destination des marchés mondiaux. En 2021, la Russie a exporté 250 000 tonnes de viandes de porc et coproduits porcins. Les principaux débouchés se trouvent en Europe de l’Ouest mais aussi en Asie (Vietnam, Kazakhstan, Hong-Kong) », analyse l’Ifip.

L’Ukraine et la Biélorussie demeurent d’importants débouchés pour la Russie. Or avec la guerre, « le flux vers l’Ukraine, actuellement au rythme de 4 000 tonnes par mois, se réduiront dans un premier temps. Ceci laissera davantage de disponibilités pour conquérir d’autres marchés, en particulier en Asie.»

Le porc russe fait de l’œil aux asiatiques

Le porc russe gagne en effet du terrain dans les pays du sud -Est asiatique. La demande du Vietnam, touché par la PPA, soutient les exportations russes de porc. Au premier semestre 2021, la Russie s’est placée à la première place du podium des exportateurs de viande vers le Vietnam, devançant ainsi les États-Unis, l'Inde, les Pays-Bas et la Pologne. La Russie a exporté 61 800 tonnes de viande vers le Vietnam de janvier à juin 2021, soit 2,6 fois plus qu'à la même période en 2020, selon les statistiques des douanes russes. En valeur cela représente 121 millions de dollars. Les envois russes de porc ont représenté la majeure partie des volumes, les expéditions ayant été multipliées par 2,5 pour atteindre 55 000 tonnes pour une valeur estimée à 116 millions de dollars. Cette hausse est à mettre en lien avec l'accord de libre-échange entre le Vietnam et l'Union économique eurasienne (UEE), initialement signé mi-2015. Le commerce agricole entre les deux pays a doublé au cours des 12 derniers mois. Si la tendance des asiatiques à acheter davantage de produits agricoles russes se poursuit, cela pourrait concurrencer les autres origines dont l’UE. D’autant plus si un accord de régionalisation est signé avec la Chine, étant donné le renforcement des liens commerciaux sino-russe ces derniers temps. Pour rappel, lors de Jeux Olympiques d’hiver, les deux pays avaient annoncé des accords sur le gaz et les céréales.

 

Zoom sur les échanges de l’UE

« Pendant de nombreuses années, la Russie a été un partenaire majeur de l’Union européenne dans le secteur porcin. Mais depuis l’embargo de 2014, la relation entre les deux puissances est quasi-inexistante. La Russie importe des quantités minimes de viandes de porc et coproduits (14 700 tonnes), et l’UE ne représente que 10% de ses approvisionnements. Depuis l’embargo européen vers la Russie, une faible part des échanges d’animaux vivants a subsisté. En 2021, l’UE et le Canada ont exporté près de 14 100 porcs vers la Russie, pour une valeur de 12 M€. Il s’agit principalement de reproducteurs. Le commerce vers la Russie pourrait être interrompu, ce qui pénalisera fortement les Danois (25% des approvisionnements) et les Néerlandais (37%) », indique l'Ifip

 

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