« Ne plus parler de volumes est une erreur. Il faut s'inscrire dans une dynamique de gestion de volumes »
Thierry Roquefeuil, président de la Fédération nationale des producteurs de lait.
Les Marchés Hebdo : Où en sont les producteurs à quelques semaines de la fin des quotas ?
Thierry Roquefeuil : La fin des quotas, les producteurs s'y préparent depuis 2008 avec la mise en place de la contractualisation avec les transformateurs. C'est quelque chose que la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) soutient et veut faire avancer dans l'intérêt des producteurs. Nous pensons que pour que la filière laitière française reste dynamique, il faut passer par des discussions entre l'offre et la demande. Mais c'est une relation nouvelle, qui se bâtit progressivement, et ça reste compliqué. Cela permet une bonne dynamique économique, mais pour cela les entreprises doivent aller au bout de leurs engage-
ments. Nous souhaitons que ce qui soit signé soit respecté, du côté des entreprises, comme du côté des producteurs d'ailleurs. Après, la conjoncture ne nous aide pas. Nous nous attendions à une année 2015 difficile, mais depuis le mois d'août, les marchés sont dégradés. L'embargo russe a amplifié le problème.
LMH : Comment s'annonce la production française face à ses concurrents européens ?
T. R. : En lien avec les prix des marchés et le besoin des entreprises... donc j'espère en hausse. Sur le premier semestre 2014, nous avons produit un milliard de litres de lait supplémentaires par rapport à la même période de 2013. Mais il ne faut pas avoir la naïveté de croire que nous sommes les seuls à aller chercher d'autres débouchés dans les pays émergents. En France, nous avons une capacité de production et une dynamique qui peuvent freiner les ardeurs d'autres pays. Mais nous devons aussi faire face à certaines contraintes, environnementales et sociales notamment, que n'ont pas d'autres pays européens, et qui représentent un coût pour le producteur. Produire du lait à 300 €/tonne n'est pas possible dans un contexte où l'harmonisation n'est pas le cas sur d'autres domaines.
LMH : Finalement, la fin des quotas rime avec crise ou opportunité ?
T. R. : Ne plus parler de volumes est une erreur. Il faut s'inscrire dans une dynamique de gestion des volumes, et ne pas produire de lait sans prendre en compte les débouchés. C'est ce que nous essayons d'appuyer en France, avec la contractualisation notamment, mais ce n'est pas forcément le cas dans tous les pays européens. Passer par une période de crise, c'est aussi une façon d'avancer. Mais si on pouvait avancer sans une grosse crise, ce serait bien.