Marque Vignobles de France : Viniflhor dit « oui »
Gros ordre du jour au conseil de direction de Viniflhor mercredi dernier. Les participants devaient en effet statuer sur le cas « vignobles de France », un nouveau vin de pays destiné à l’export et fruit d’assemblages entre vins de différentes régions françaises. Au terme de longues discussions, le projet a finalement été adopté par la majorité.
De nombreux participants étaient pourtant partagés entre l’opportunité d’augmenter les débouchés et la crainte de voir ce nouveau produit concurrencer les appellations existantes tout en nivelant par le bas la qualité. Aux avant-postes de la contestation, le président du syndicat des vins du pays d’Oc, Jacques Gravegeal, dénonce ce « mélange de vins de cépage nationaux (…) qui n’offre ni garantie, ni solution pour résoudre la crise actuelle ».
Hostiles au projet, les vins de pays d’Oc sont pourtant très concernés puisqu’ils entreront dans les volumes de « vignobles de France » à hauteur de 70 à 90 %, de l’aveu même du directeur de Viniflhor, Philippe de Guenin. Avec la réforme de l’OCM viticole en 2008, les Languedociens craignent également une grande déréglementation qui conduirait à la création de vins de table européens avec cépage et millésime. « Les 15 000 viticulteurs de la région méritent un peu de considération », tonne M. Gravegeal avant de détailler les effets pervers du projet, défendu par les pouvoirs publics et une grande partie de la profession.
L’agrément confié aux négociants
« Les vins de pays sont notre principale source de revenus. Avec les vins de pays d’Oc, nous disposons déjà d’une marque reconnue qui se vend bien à l’export. Si ces vins partent en « vignobles de France », il y aura de sérieuses pertes économiques », prévient-il.
Malgré les avis défavorables de plusieurs interprofessions et du conseil de bassin Languedoc-Roussillon, la décision du comité des vins de pays de Viniflhor a été largement validée. Après quelques hésitations, le nom définitif sera bien « vignobles de France », une dénomination qui apparaîtra sur les étiquettes même si les négociants devraient davantage insister sur la marque, au centre de leur communication. Comme le prévoyait le projet, les vins de pays seront une première fois agréés au niveau local, avant d’être assemblés puis à nouveau agréés par les négociants eux-mêmes, l’opération se déroulant sous le contrôle de Viniflhor.
Les vins ainsi obtenus pourront provenir d’un, deux ou trois cépages différents, mais l’objectif principal des opérateurs reste la vente à l’export de vins monocépages « made in France », censés reprendre des parts de marché à la concurrence. Là où certains craignent un phénomène de « déversoir » des vins médiocres, la direction de Viniflhor se montre rassurante.
Un espace de compétitivité pour l’AFED
« Les négociants investissent beaucoup d’argent dans leurs marques de vin ; ils n’ont pas intérêt à commercialiser de mauvais produits. En plus, les vins qui ne seront pas agréés, soit par l’opérateur, soit par le Viniflhor suite aux contrôles, perdront également leur agrément initial en vin de pays », rappelle Philippe de Guenin. A l’AFED (éleveurs, embouteilleurs et distributeurs de vins et spiritueux) et à l’ANIVIT (interprofession des vins de table et des vins de pays), on se félicite de voir apparaître cette nouvelle appellation, aboutissement de six années de travail.
Un communiqué paru jeudi décrit le concept comme un « espace de compétitivité dans l’offre de vins de pays». En théorie, tout peut maintenant aller très vite. Le Viniflhor doit éditer dans les semaines à venir un cahier des charges à destination des opérateurs, suite à quoi l’arrêté pourra être signé. Si tout se passe bien, les premiers vins « vignobles de France » pourraient donc être assemblés avant l’été, mais on sait d’expérience qu’en période préélectorale, les signatures sont parfois longues à obtenir… C’est tout ce que souhaite le syndicat des vins de pays d’Oc qui travaille en parallèle sur la segmentation de sa gamme pour mieux commercialiser les 4,7 Mh l agréés annuellement. De quoi mieux affronter une nouvelle concurrence, le cas échéant.