« Le travail collectif sur la consommation d'énergie a commencé il y a trente ans en nutrition animale »
Fabrice Putier, directeur de Tecaliman, centre technique de l'alimentation animale (Nantes).
Les Marchés Hebdo : L'industrie de la nutrition animale est-elle très spécifique en matière d'énergie ?
Fabrice Putier : Pour une production de 21 millions de tonnes d'aliments composés, la consommation française d'énergie est estimée entre 1200 à 1400 GWh/an. L'électricité en représente en moyenne 60 % dont 90 % pour les moteurs et l'air comprimé. L'énergie thermique pour la vapeur utilisée en granulation est, quant à elle, principalement issue des combustibles fossiles.
LMH : Pourquoi le secteur s'est-il très tôt intéressé aux économies d'énergie ?
F. P. : La démarche collective animée par le centre technique a été lancée en 1986 et s'est rapidement cristallisée sous la forme d'un observatoire des consommations d'énergie. Nous sommes financés de façon volontaire par nos adhérents et donc en contact très étroit avec les usines. Or, il existait un groupe de responsables très sensibilisés. L'énergie apparaît assez vite dans la liste des leviers que peut actionner un responsable de production. 80 à 85 % du coût lui échappe, car il ne peut guère intervenir sur la formulation, dictée par les besoins des animaux et par le cours des matières premières. Ensuite, il peut améliorer l'utilisation de l'outil en passant par exemple en deux, voire trois, équipes ou en réduisant le personnel en automatisant. Le secteur a été automatisé très tôt. Viennent enfin le transport et l'énergie.
LMH : Où en êtes-vous aujourd'hui ?
F. P. : La mesure précise des consommations d'énergie se généralise comme leur liaison avec les données de production. Nous incitons les industriels à instrumenter et compléter les bases de données captées avec d'autres données comme l'ouverture et la fermeture de trappes si elles conditionnent le démarrage ou l'arrêt d'opérations énergivores. Tecaliman évalue aussi l'intérêt de solutions matérielles. C'est le cas des variateurs de vitesse sur la ventilation du sécheur-refroidisseur pour pla-cer la vitesse au bon point de fonctionnement. Nous avons aussi publié fin février un guide pour aider les entreprises dans leur démarche d'audit énergétique.
LMH : Le secteur peut-il réduire sa facture énergétique ?
F. P. : Nous réalisons des audits énergétiques des usines depuis plusieurs années. Nous sommes assez dubitatifs sur des valeurs de 20 % d'économie parfois avancées. Il ne faut pas réduire les consommations d'énergie au détriment de la qualité des produits. Nous sommes en revanche partie prenante avec la profession pour réinterroger la valeur ajoutée des opérations les plus énergivores. Faut-il vraiment broyer si fin ou granuler les aliments par exemple ?