L’avis d’un consultant en négociations commerciales
« Il va y avoir une énorme pression de la part des distributeurs »
Les Marchés Hebdo : Comment bien préparer ses CGV dans un cadre législatif de dernière minute ?
Philippe Duvocelle : Je préconise au management de bien accompagner les négociateurs en amont et pendant la négociation. Il va y avoir une énorme pression de la part des distributeurs qui sont bousculés et qui ont peur de perdre leur avantage concurrentiel. Ça va envoyer du bois cette année, plus que d’habitude. Il va y avoir deux points clés : la hausse du seuil de revente à perte (SRP) et l’encadrement des promotions. Chaque industriel doit voir de quelle manière il peut être concerné par ces deux points clés. Il n’y a pas que les grands groupes qui vont être concernés par la hausse du SRP, il y a des marques locales de PME à très forte notoriété qui pourraient l’être également. Il y aura un effet collatéral sur des sociétés qui possèdent dans leurs références des produits concernés par le SRP.
LMH : Cela signifie-t-il que les distributeurs vont davantage « marger » sur les produits des PME ?
P. D. : Les distributeurs ont l’habitude de fonctionner avec des marges faibles. Ils construisent leur assortiment en fonction des catégories, des produits SRP incontournables, des MDD et des premiers prix. Là, c’est tout leur assortiment qui bouge. On ne sait pas quelle stratégie ils vont adopter. Il y a aura des effets collatéraux, mais lesquels ? La hausse du SRP a été imaginée au départ pour faire baisser les prix. Or, elle risque de faire monter les prix. Des produits qui vont augmenter pour que le distributeur, selon sa stratégie, garde un décalage de prix. Les PME n’ont pas plus de risques que d’autres entreprises.
LMH : Comment anticiper l’encadrement des promotions ?
P. D. : Il y a plein de fournisseurs et de distributeurs qui expliquent déjà à tout le monde comment ils vont contourner la loi sur l’encadrement des promotions. La DGCCRF n’a pas l’air non plus très au clair sur la manière de calculer la limitation de 34 % en valeur. La jurisprudence va se construire au fur et à mesure. Dans les CGV, je conseille aux industriels de traiter le processus de promotion de leur marque. La dynamique promotionnelle d’une marque est différente de celle d’un produit. Stratégiquement, c’est intéressant pour un industriel d’investir davantage dans la promotion de sa marque plutôt que celle des produits. En tout cas, je conseille à un industriel d’être très clair sur la position qu’il prend quelle qu’elle soit. Ce sera l’occasion de développer une vraie collaboration avec les distributeurs, pour comprendre concrètement comment ils comptent appliquer ces éléments-là.